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Le blog d'André Boyer

CRISE DE L'AUTORITÉ, CRISE DE LA TRANSMISSION

11 Octobre 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

CRISE DE L'AUTORITÉ, CRISE DE LA TRANSMISSION

DIDEROT REMPLACE L'AUTORITÉ PAR LA RAISON

 

Nous vivons une « crise » de l’autorité qui touche non seulement la sphère politique mais aussi la famille, l’école, le pouvoir judiciaire et bien sûr l’entreprise.

 

L’autorité ne peut être réintroduite, car il est impossible de retrouver un paradigme perdu et si l’on songe à le faire par la force, ce serait un contresens puisque l’autorité exclut le recours à la contrainte.

L’autorité exclut également d’user de la persuasion qui présuppose une relation entre égaux. La persuasion ne s’impose que dans un monde où prévaut l’accord des volontés individuelles et ou ne subsiste que l’arbitraire des subjectivités, réglé par les échanges contractuels.

La relation d’autorité est-elle donc devenue définitivement obsolète ? Il est vrai que l’acception traditionnelle de  l’autorité n’a plus cours, si cela signifie que l’autorité est transmise par la tradition. Il est vrai aussi que la crise de l’autorité est consubstantielle à l’avènement de la modernité.

Si diverses que soient les définitions de la « modernité », on s’accorde au moins sur l’idée qu’elle se caractérise par un mouvement d’arrachement à la tradition. Dès lors, qu’est ce qui permet à un pouvoir et plus généralement à une institution de prétendre à la reconnaissance de sa légitimité, si la source de l’autorité est déconnectée de la tradition ?

La modernité a-t-elle donc inventé une nouvelle figure de la transcendance à moins que cette dernière est disparu et avec elle l’autorité en général ?

À cet égard, il faut citer l’article « Autorité » de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert : « Qu’importe que d’autres aient pensé de même ou autrement que nous, pourvu que nous pensions juste, selon les règles du bon sens et conformément à la vérité ? » . C’est ce qu ‘écrira également Kant dans le § 40 de sa Critique de la faculté de juger : « penser par soi-même », « sans préjugés ». Penser par soi-même, n’admettre aucune autorité : l’ultime source de toute autorité, ce n’est pas la tradition mais la raison.

 

Si l’autorité ne peut plus prendre appui sur le passé en tant que tel, la crise de l’autorité comme rupture du fil de la tradition est une crise de la temporalité.

Cette crise affecte significativement l’éducation. Autrefois, il allait de soi que les enfants, nouveaux venus dans un monde qui leur préexiste, ne pouvaient y être introduits que par leurs prédécesseurs adultes, parents et éducateurs, qui assumaient la double responsabilité du développement de l’enfant et du maintien ou de la continuité du monde. Or nous sommes aujourd’hui dans la situation où cette double exigence doit s’exercer dans un monde dont la consistance n’est plus structurée par l’autorité ni retenue par la tradition.

Déjà, Chateaubriand usait, dans les Mémoires d’outre-tombe, d’une formule saisissante : « le monde actuel, le monde sans autorité consacrée, semble placé entre deux impossibilités : l’impossibilité du passé et l’impossibilité de l’avenir ».

 

Ainsi la perte de l’autorité proviendrait non seulement de la défection du passé mais aussi de celle du futur…

 

À suivre

 

À partir de l’ouvrage de Myriam Revault d’Allonnes, Le pouvoir des commencements, Essai sur l’autorité, Seuil, 2006.

 

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