LA PROMENADE DES ANGLAIS
LES FLEURS POUR LES VICTIMES...
Je joins mes lamentations à celles de tous les niçois effondrés par le drame aussi immense qu’absurde du 14 juillet 2016.
Qu’un être humain soit capable de concevoir et de réaliser un crime aussi violent, massif et absurde que de rouler avec un camion sur la foule, en cherchant à en écraser le plus possible dépasse l’entendement.
Pourtant ce n’est pas un acte isolé puisqu’à ce crime se succèdent d’autres crimes, tandis que notre Président semble préférer le respect de principes adaptés à d'autres circonstances à la vie de ses concitoyens, comme si les lois n'étaient faites pour que les membres de la société puissent vivre ensemble.
En principe, il suffirait de les appliquer pour retrouver l’équilibre de notre société.
En principe.
Car comment les appliquer correctement ? Les appliquer à la lettre ? Il faudrait alors construire de toute urgence des prisons, embaucher des gardiens afin de ne plus faire des remises de peine automatiques. Il faudrait sacrifier les aides sociales pour les affecter aux dépenses policières et pénitentiaires. Bref, il faudrait changer les règles non écrites de notre société, plutôt laxistes et bienveillantes, pour les remplacer partout par la rigueur.
La rigueur pour les assassins, la rigueur pour les voyous, la rigueur pour les tricheurs, la rigueur universelle, sinon cela ne marchera pas.
Laissons les hommes politiques sacrifier des vies innocentes sur l’autel de "l’État de Droit". Laissons les se débattre entre des solutions d’urgence et une société qui n’est pas modifiable au gré des émotions et regardons le problème qui leur est posé d’un regard distancié : notre société doit s’adapter aux changements du monde afin de lutter, non seulement contre le terrorisme, mais plus généralement contre l’insécurité.
Pour cela, elle doit prendre en compte la mobilité et l’anonymat de ses membres. Nous vivons en ville, donc seuls. Savez-vous qui habite dans votre rue ? Vos voisins vous connaissent-ils ? Les dépressifs, les personnes âgées peuvent mourir dans leur coin sans que personne ne s’en inquiète. Naturellement, les fous dangereux ont la même liberté.
De plus, les gens viennent littéralement de partout. L’Europe n’est que l’extrémité d’un espace qui s’étend sans obstacle jusqu’aux extrémités de l’Asie et de l’Afrique. Pratiquement personne ne peut empêcher un chinois ou un africain déterminé d’atteindre les rives de l’océan atlantique. On en sait quelque chose à Calais. Les vagues frontières encore dressées ici ou là ne sont efficaces que pour barrer la route aux personnes qui sont bien décidées à respecter la loi. Les autres n’en ont cure.
Désolé de vous faire peur, mais, compte tenu de l’anonymat et de la mobilité des personnes, n’importe qui peut aujourd’hui venir s’installer dans votre rue et décider de vous tuer. En l’état actuel de l’organisation de notre pays, la police n’est pas en mesure de détecter à l’avance cet individu et notre système judiciaire ne permet pas de le mettre hors d’état de nuire préventivement.
On constate en effet une nouveauté par rapport au monde d’autrefois, la disparition du village dans lequel tout le monde connaissait tout le monde. Désormais, nous vivons dans un monde où personne ne connaît personne.
La pente naturelle de cet état de fait est le regroupement dans des zones protégées pour les plus riches à côté de la constitution de groupes ethniques et religieux pour ceux qui peuvent s'en réclamer, tandis que les plus faibles qui n’ont ni les moyens financiers ni les solidarités claniques pour se protéger sont abandonnés à leur sort dans ce monde éclaté.
Pour éviter cette dérive naturelle, une nouvelle organisation collective s’impose, qui n’ait pas la prétention de changer notre société par des injonctions (plus de solidarité ! plus d’ordre ! plus de sévérité !) mais qui se fonde sur la protection qu’assuraient autrefois nos villages disparus, si rassurants par l’identification et la reconnaissance de chacun par le groupe.
Il nous faut les remplacer par une organisation similaire dans les quartiers de nos villes. Le principe de base est que nous devons découper nos villes et finalement notre société toute entière en unités dans lesquelles chacun est identifié, connu et reconnu, car c’est dans l’anonymat et l’isolement que s’échafaudent toutes les dérives.
Pour prendre un exemple concret, on peut imaginer des quartiers regroupant au plus trois ou quatre mille personnes afin que le responsable du quartier puisse les connaître toutes, personnellement. Cela implique une contrainte qui est le point clé de ce dispositif, à savoir l’obligation de déclarer sa présence au responsable du quartier lorsque l’on y habite et cette obligation concerne aussi les personnes de passage dans les hôtels, les logements privés et lorsque l’on héberge chez soi de la famille ou des amis.
Ce dispositif permet de repérer toute personne qui s’y soustrait et donc de lui prêter une attention particulière. On peut imaginer qu’il donne lieu à deux développements :
- À partir de l’obligation d’inscription peut se constituer une cellule centrale de soutien à la population du quartier : le responsable peut être secondé par une assistante sociale en mesure de connaitre les besoins réels de ses administrés puisqu’elle les connait et par un policier chargé de se renseigner et de constituer le premier échelon de tout maintien de l’ordre dans le quartier.
- L’autre, démocratique. Le responsable de quartier pourrait aussi bien être élu que nommé par la commune. S’il était élu, on pourrait concevoir une refondation démocratique du pays à partir des quartiers.
Mais l’essence de cette proposition est la suivante : si nous ignorons totalement qui sont nos voisins, d’où ils viennent, ce qu’ils font et ce qu’ils veulent, nous acceptons de voir notre existence perturbée sinon détruite par n’importe quel individu ou groupe qui le décidera à notre insu, au nom de n’importe quoi.
Il faut donc, à mon sens, s’organiser pour l’éviter. Tous les actes de terrorismes récents en France nous montrent qu’un repérage des individus qui les ont commis aurait permis de les contrecarrer.