Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog d'André Boyer

LES MAMMIFÈRES FONT DE LA RÉSISTANCE

21 Octobre 2022 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

LES MAMMIFÈRES FONT DE LA RÉSISTANCE

Lorsque les écosystèmes ont commencé à se rétablir au début du Paléocène, la période qui suit immédiatement la collision avec un astéroïde,  la plupart des mammifères étaient des euthériens* de très petite taille, comme Purgatorius qui vivait juste cent mille ans aprés la chute de l'astéroïde, un euthérien doté de molaires adaptées aux fruits et de chevilles mobiles pour grimper aux arbres : il est l’un de nos ancêtres directs.

 

Ces euthériens survivaient grâce à un régime alimentaire flexible et à leurs modes de reproduction. La force spécifique des mammifères résidait en effet dans la durée de la gestation. En nourrissant plus longtemps les bébés dans leur ventre, les mères donnaient un superpouvoir aux juvéniles, qui devenaient plus facilement des adultes de grande taille. C'est ainsi qu'en quelques centaines de milliers d’années les premiers placentaires du Paléocène ont grandi démesurément, après être restés longtemps minuscules.

Puis la stabilité des écosystèmes ont permis à de nombreuses espèces nouvelles de proliférer, faisant évoluer leur morphologie et leurs comportements à partir d’un ancêtre commun pour tirer parti des opportunités diverses de l'environnement.

Il faut noter que les placentaires archaïques du Paléocène n’étaient pas particulièrement intelligents. Certes, par rapport à leurs minuscules prédécesseurs du Crétacé, les mammifères du Paléocène avaient un cerveau plus gros en valeur absolue. Mais le volume relatif de leur cerveau par rapport à la masse corporelle était plus faible que ceux des espèces du Cétacé qui les avait précédés. Tout s’est passé comme si les premiers placentaires avaient grossi si vite que leurs cerveaux n’avaient pas pu suivre le rythme, ou comme s’il était plus important, lorsqu’il y avait de nombreuses niches écologiques vacantes à remplir, de développer des corps plus grands que de plus gros cerveaux, dont les besoins énergétiques étaient élevés.

Ce n’est que lorsque les écosystèmes se furent stabilisés, générant une concurrence croissante entre les nombreuses espèces de nouveaux placentaires, que leurs cerveaux se sont développés à leur tour.

Au cours du Paléocène, il y a 56 millions d’années, la température se mis à monter, car du magma avait commencé à s’accumuler sous les continents du nord et à remonter en panache vers la surface. En percolant à travers la croûte, les roches profondes s'échauffèrent.

Cette activité géologique libéra des milliards de tonnes de dioxyde de carbone élevant en deux cent mille ans la température moyenne de l’atmosphère de cinq à huit degrés. Depuis cette période jusqu'à aujourd'hui, jamais la Terre n’a été aussi chaude qu'à ce moment là. Ce réchauffement soudain, appelé le « maximum thermique du Plaocène-Eocène » a été difficile à vivre pour les mammifères de l’époque.

Mais contrairement à l’impact météorique survenu dix millions d’années auparavant, très peu d’espèces de mammifères se sont éteintes, car elles se sont mises en mouvement vers les hautes latitudes ouvertes par l’élévation de température. Elles ont aussi développé de nouvelles aptitudes, des cerveaux plus gros pour s'adapter individuellement aux circonstances, des ongles pour s’agripper aux branches ou de gros sabots pour faire du galop.

Ces mammifères ont essaimé en Europe, en Amérique du Nord et en Asie, trois continents qui étaient reliés entre eux par des bandes de terre émergées. Ils ont submergé les populations de placentaires archaïques qui ne survécurent pas longtemps à l’invasion.

Au sud de l’équateur, l’évolution suivit un cours diffèrent. L’Afrique et l’Amérique du Sud étaient alors des continents insulaires, avec leurs propres lignées de placentaires, éléphants en Afrique, tatous en Amérique du Sud.

Sur ces deux continents, les monotrèmes et les marsupiaux se maintinrent difficilement, mais les placentaires conservèrent les clefs de l’avenir.

Certains se mirent à se balancer de branche en branche dans les arbres, d’autres parcoururent les airs en battant des ailes, d’autres enfin troquèrent leurs bras contre des nageoires. L’éventail de la faune placentaire actuelle, dont nous faisons partie, a hérité des succès remportés depuis le Paléocène jusqu’à aujourd’hui, au temps de l’Holocène.

 

Ainsi évoluèrent les mammifères placentaires jusqu'à nos jours. Jusqu'à quand? La Terre le décidera en fonction des variations de son atmosphère et de sa température auxquels il faudra s'adapter, mais les mammifères en ont vu d'autres dans le passé...

 

* Des mammifères dont l'embryon se développe entièrement dans le corps de la mère, en étant alimenté par le placenta

Référence: Steve Brusatte, Comment les mammifères ont conquis le monde, Pour la Science, 10/22, pp 54-67

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article