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Le blog d'André Boyer

La force de donner un sens à sa vie

28 Juin 2013 Publié dans #PHILOSOPHIE

Mon dernier blog à prétention philosophique du 3 juin dernier, sous le titre « Souffrir et quoi encore ? » s’achevait en rappelant que le monde est une évolution perpétuelle qui ne va nulle part, qui n’atteint jamais son but et qui ne répond à aucun ordre établi.

 

 

chateau de papierC’est pourquoi je vous supplie de ne pas vous laisser mener par le bout du nez par ceux qui prétendent connaître le sens de l’histoire, qui glorifient le modernisme à leur profit contre votre conservatisme et qui veulent changer les règles à leur avantage: la force de l’être humain est de pouvoir choisir lui-même son but.

Mias si, a contrario, il cède au nihilisme, il risque fort de succomber à la tentation d'inventer un monde imaginaire où la vie aurait enfin un sens. C'est ce que pense Nieztsche lorsqu'il écrit: 

« Il ne reste comme échappatoire que de condamner intégralement ce monde en devenir et d’inventer un monde qui se trouverait au-delà du précédent et qui serait le monde vrai » (fragment posthume 1887-1888, 11).

À ce titre, le monde des idées platoniciennes, le paradis des croyants, la société sans classe du communisme, le marché transparent, libre et concurrentiel du capitalisme seraient quelques uns des palliatifs destinés à masquer la sensation d’absurdité que ressent l’être humain face à la vie.

Car Nietzsche estime que «  L’homme préfère encore vouloir le néant que de ne pas vouloir du tout » (Généalogie de la morale, III, 28).

Si le scepticisme systématique est une faiblesse, de même le besoin de certitudes toutes faites en est une autre. C’est en exploitant cette faiblesse que les médias parviennent à inculquer à d’innombrables moutons les médiocres idées préfabriquées qu’ils sont chargés de diffuser par les professionnels de la manipulation de la faiblesse humaine.

Force est de constater en effet que l’être humain est prêt à croire aux affabulations les plus invraisemblables, comme l’astrologie, ou à se laisser intimider par les manipulations les plus perverses, comme celle du péché originel qui expliquerait la souffrance de l’humanité toute entière, où même à se laisser tyranniser, malmener, voire torturer par n’importe quelle discipline, pourvu qu’elle lui procure le mirage d’un sens.

De ce dernier point de vue, le comble de l’absurde est atteint avec le « sacrifice » des terroristes manipulés pour tuer et mourir ! Pour Nieztsche, le fanatisme lui apparaît comme le symptôme le plus pathologique de la faiblesse humaine, un fanatisme dont l’unique fonction serait d'occulter à ceux qui s'y livrent le non-sens de la vie.

Serons nous assez forts choisir nos propres buts, inventer nos propres idéaux, donner nous-mêmes un sens à notre existence ou serons nous assez faibles pour nous mettre en quête de quelqu'un qui nous dicte un sens préfabriqué de la vie, auquel il nous suffira de nous soumettre?

To be or not to be, that is the question...

Thus conscience does make cowards of us all,
And thus the native hue of resolution
Is sicklied o'er with the pale cast of thought...

(Shakespeare, Hamlet, Acte III, ouverture de la scène 1)

(À SUIVRE)

 

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La désindustrialisation de la France: on fait quoi?

24 Juin 2013 Publié dans #ACTUALITÉ

 

Il y a quarante-huit heures, j’ai fait paraître un premier blog consacré aux causes immédiates de la désindustrialisation de la France.

Le blog ci-après aborde la question de ses conséquences.

Industrie.jpgContrairement au Japon, à l'Allemagne, à la Suède, à la Suisse ou à l'Autriche, la France n'est désormais plus guère présente dans le haut de gamme, hormis l'aviation, la pharmacie et quelques industries de luxe.

Or, dans la production du bas de gamme, elle est en concurrence avec les pays émergents mais désormais aussi avec l'Espagne et les Etats-Unis dont les coûts de production sont plus faibles que les siens : la balance commerciale avec l'Espagne, naguère excédentaire d'une dizaine de milliards d'euros, est aujourd'hui déficitaire de quelque cinq milliards d'euros, car ce dernier pays a désormais des capacités disponibles pour exporter des produits agroalimentaires, des biens intermédiaires ou des automobiles.

La concurrence américaine porte pour sa part sur toutes les productions consommatrices d'énergie, comme la chimie pétrolière ou gazière, les gaz de schiste donnant aux États-Unis un fort avantage compétitif, de l'ordre de 20 % par rapport à l'Europe.  C’est écrire s’il est actuellement mal à propos de créer une zone de libre échange avec les Etats-Unis !

On a donc un effet de sandwich : le haut de gamme est fourni par des pays qui s'y spécialisent, et le bas et le milieu de gamme vers des pays qui ont des coûts salariaux ou des coûts d'énergie plus faibles.

Ce problème est difficile à corriger, car la montée en gamme que la Suède a réussi dans les années 1990 et le Japon dans les années 2000, exige un long travail aux résultats incertains, que les constructeurs français d'automobiles, par exemple, ne veulent même plus tenter, estimant qu'ils n'en ont ni la capacité ni la crédibilité nécessaire et qui n’est vraiment possible que pour de nouvelles industries. Si l’on souhaite plutôt agir sur les coûts salariaux unitaires, il faudrait pouvoir les baisser de 20 % pour être au niveau de l'Espagne et des États-Unis, qui sont des pays dont les produits se situent désormais à un niveau de gamme voisin de celui des produits français.

L'anomalie en termes de profitabilité génère un taux d'autofinancement faible, de l’ordre de 60 % alors qu'il dépasse 100 % dans pratiquement tous les autres pays. Or l'incapacité des entreprises françaises à s'autofinancer les rend plus vulnérables aux chocs conjoncturels.

En résumé, cette situation de maladie hollandaise n'admet que deux voies de sortie, la montée en gamme ou la baisse des salaires, dont aucune n'est aisément praticable. Elle engendre, en l’absence de réaction de la puissance publique, un  amenuisement continu de la taille de l'industrie en France, la baisse de son niveau de gamme et de sa profitabilité, avec le lent déclin de sa capacité à fabriquer des produits complexes vendus à des prix relativement élevés.

Alors quelles solutions ?

On peut en recenser à priori trois :

- Vendre des produits de plus en plus haut de gamme. Irréaliste avant deux décennies. 

- Baisser les salaires ? il faudrait baisser en même temps les retraites et les allocations sociales. Impossible n’est ce pas ?

- On pourrait aussi sortir de l’Euro et dévaluer le franc de 20%, mais c’est une perspective et même une pensée impie. 

On peut y ajouter encore deux solutions héroïques:

- Ne rien faire du tout et laisser disparaître l’industrie française. L’ennui réside dans ce que le déficit commercial, actuellement, de l’ordre de cinq milliards d’euros par mois, nécessitera de vendre progressivement tous les avoirs du pays. Bienvenue aux acheteurs allemands et chinois, entre autres…

- Nier le problème, se retourner de l’autre côté et se rendormir…

 

Bonne idée…

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Les raisons directes de la désindustrialisation de la France

22 Juin 2013 Publié dans #ACTUALITÉ

La Mission d’information sur les coûts de production en France a récemment recu Patrick Artus à l’Assemblée Nationale, le 13 Son intervention m’a inspiré le texte suivant :

made--in-france.jpgLe problème de l'industrie française tient à la fois au coût du travail et au niveau de gamme de ses produits. Les coûts salariaux dans l'industrie, charges sociales comprises, sont pratiquement les mêmes en France et en Allemagne. Mais ils doivent être corrigés en tenant compte du niveau de gamme: au niveau de gamme de l'Allemagne, le coût salarial est de 45 euros de l'heure en France, contre 34 euros outre-Rhin, la différence s'élevant à quelque 30 %.

En outre, l'industrie consomme beaucoup de services, de transport, de personnel intérimaire, d’informatique, de comptabilité, de nettoyage et d’immobilier. La part de cette consommation, presque uniquement constituée de salaires, représente 80 % de la valeur ajoutée de l'industrie française. Or, grâce aux réformes du marché du travail opérées par les lois Hartz I à IV, les salaires des services sont plus bas en Allemagne qu'en France, ajoutant quelque 10 points à l'écart de compétitivité entre les deux pays.

Au total, l'écart des coûts entre la France et l'Allemagne s'établirait entre 30% et 40 %. Depuis la fin des années 1990, les coûts salariaux unitaires dans l'industrie ont un peu plus augmenté en France qu'en Allemagne, mais ce sont surtout les prix qui font la différence entre les deux pays : alors qu'ils augmentent un peu plus vite que les coûts en Allemagne, la France est obligée de baisser les siens pour pouvoir vendre, en raison du niveau de gamme plus bas des produits industriels fabriqués en France.

L'écrasement des marges des entreprises françaises trouve ainsi sa cause dans la baisse des prix plutôt que dans la hausse des coûts, ou plutôt dans l'impossibilité de répercuter les hausses des coûts sur leurs prix. Il a d'ailleurs atteint un pic avec l’appréciation de l'euro, ce qui a forcé les entreprises à baisser leurs prix en euros pour maintenir leurs prix en dollars et également avec l’augmentation des prix des matières premières que l’industrie française n’a pas pu intégrer dans ses prix de vente.

L'ensemble des coûts génère le cercle vicieux de la maladie hollandaise: la faible profitabilité de l’industrie ne créée pas  d'incitation à y investir et le capital se dirige vers d’autres secteurs de l'économie. L'industrie française investit six fois moins que l'Allemagne dans la modernisation de son appareil productif : c’est ainsi qu’en 2012, elle n'a acquis que 3 000 robots, contre 19000 pour l'industrie allemande et 6000 pour l'italienne. De plus, la France est le seul pays de l'OCDE dont la profitabilité des entreprises continue actuellement à diminuer. Cette situation singulière s'explique en grande partie par la disjonction entre l'évolution des salaires et l'état de l'économie. Dans beaucoup de pays comme l'Italie, l'Espagne, le Royaume-Uni ou l'Allemagne, la croissance des salaires ralentit rapidement quand le chômage augmente alors que l’on observe que la montée du chômage ne fait pas obstacle à celle des salaires en France.

L'évolution du coût salarial unitaire comparé en France, en Allemagne, en Italie et en Espagne semble indiquer que ces coûts plus bas dans les trois autres pays qu'en Allemagne à la création de l'euro nettement, sont devenus plus élevés en France et en Italie qu’en Allemagne et en Espagne depuis la période 2004- 2005.

Le défaut de profitabilité de l'industrie française semble moins provenir de la baisse de la durée du travail que de l'appréciation de l'euro à partir de 2001 ainsi que de l'apparition des pays émergents sur la scène du commerce mondial et de la hausse des prix des matières premières…

À SUIVRE...
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Ouahigouya en 1930

17 Juin 2013 Publié dans #INTERLUDE

 

L’université du troisième âge de Nice, dont je vous ai conté la création et le développement dans des blogs précédents, a produit des publications semestrielles à partir de 1978, dont je possède quelques exemplaires. Des articles remarquables y furent écrits, dont celui de Madame Lunel qui raconte son premier séjour en AOF, au début des années 1930. Je vous en propose l’extrait suivant qui vous fera vivre d’autres temps (les commentaires entre parenthèses et les * sont miens) :  

ArachidesC’était le début des années 30. Notre premier séjour colonial s’effectuait en Afrique Occidentale Française et plus précisément à Ouahigouya*.

Le Cercle** dont ce poste était le Chef Lieu venait d’être rattaché au Soudan Français.  En plein centre de la boucle du Niger, à six cent kilomètres au Sud de Tombouctou et à mille kilomètres de Bamako, son Chef Lieu de colonie.

Il n’ y avait aucun colon ni commerçant français, mais seulement sept fonctionnaires qui administraient un territoire grand comme la Belgique, peuplé par deux ethnies, les Mossi du Yatenga, des cultivateurs qui y étaient implantés depuis sept siècles et les Peuhls, des pasteurs qui conduisaient leurs troupeaux dans toute la boucle du Niger.

L’impôt à payer (déjà !) à l’administration française obligeait les uns et les autres à vendre d’importantes quantités de produits, arachides, beurre de karité, coton et kapok***.  Ces ventes se faisaient notamment sur le marché d’Ouhigouya (toujours actif aujourd’hui) et l’administration craignait que les indigènes, supposés inaptes à vendre leurs produits, se fassent spolier par les maisons de commerce (toujours la méfiance tatillone). Aussi les Commandants de Cercle étaient-ils chargés de ramasser les produits et d’en assurer la vente au bénéfice de leurs administrés.

C’est ainsi que, dés la fin novembre 1934, Monsieur l’Administrateur du Cercle de Ouahigouya, par la voie des bulletins officiels du Soudan et de la Côte d’Ivoire, faisait savoir qu’un marché de mille cinq cent tonnes d’arachide se tiendrait place de l’Administration, le 4 janvier suivant.

Nader Attié, le commerçant local syro-haïtien en a été le premier informé. C’était d’ailleurs selon son avis que la date avait été choisie, en fonction des marchés semblables qui se tenaient dans les Cercles voisins, dans un rayon de quatre cent kilomètres, Mopti-Bandiagara, Dédougou, Ouagadougou, Bobo-Dioulasso. C’est qu’il fallait permettre aux commerçants de faire tous les marchés et donc de ne pas les solliciter à deux endroits différents à la même date.

Naba Tiguiré, le Roi des Mossi de Ouahigouya  en fut ensuite averti lorsque, comme de coutume, il se présenta le vendredi suivant au bureau de l’Administrateur. Comme toujours, il approuva : bénéré (cela va bien). Par lui, ses Ministres en furent avertis et à leur tour les représentants des Chefs de Canton. Ces derniers apprirent la nouvelle dans leur Chef-Lieu de brousse et la répercutèrent à leurs Chefs de village. C’est ainsi qu’elle arrive enfin aux Chefs de famille ou plutôt à la première femme de chaque Chef de Famille.

C’est que, selon une coutume qui se perd dans la nuit des temps, la première femme avait la charge de récolter pour la famille les arachides à vendre. La coutume avait même fixé le minimum qui devait être produit : une soixante de kilos environ que la famille devait faire parvenir au marché en deux ballots de trente kilos chacun.

Dans toutes les familles, on décortiqua alors à tout va. Les servantes, les concubines, les enfants vinrent à l’aide de la première femme : un morceau de bois, tenu entre les pieds, un petit choc de l’arachide sur ce bois, et la coque était jetée d’un côté pour servir de combustible. Le ou les grains allaient de l’autre, grossir la prochaine livraison…

(À suivre)

* Ville sahélienne, Ouahigouya est actuellement la troisième ville du Burkina Faso, avec 65 000 habitants.  Son marché du centre ville est l’un des plus grand du Sahel.

**Le Cercle, dirigé par un français, était la plus petite unité de l'administration dans les colonies africaines de la France de 1895 à 1946. Un cercle était composé de plusieurs cantons, qui eux-mêmes se composaient de plusieurs villages. Le commandant de Cercle était placé sous l'autorité du commandant de zone, qui lui-même relevait du gouvernement de la colonie. Au-dessous du commandant de Cercle étaient placé des chefs de canton puis des Chefs du Village. Les chefs étaient nommés par les Français.

*** Le kapok est une fibre végétale que l'on tire des fromagers. Elle est très légère, imperméable et imputrescible mais elle est aussi, malheureusement, très inflammable. C'est au kapok que l'on doit l'incendie et la perte du Normandie, le 9 février 1942 à New York. Le paquepot avait été réquisitionné par les USA qui voulaient le transformer en transport de troupes. Des ouvriers américains malhabiles ont provoqué accidentellement l'incendie des gilets de sauvetage en kapok qui s'est ensuite propagé à tout le navire.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Ouahigouya en 1930

L’université du troisième âge de Nice a produit des publications semestrielles à partir de 1978, dont je possède quelques exemplaires. Des articles remarquables y furent écrits, dont celui de Madame Lunel qui raconte son premier séjour en AOF, au début des années 1930. Je vous en propose l’extrait suivant qui vous fera vivre d’autres temps (les commentaires entre parenthèses sont miens) :  

C’était le début des années 30. Notre premier séjour colonial s’effectuait en Afrique Occidentale Française et plus précisément à Ouahigouya*.

Le Cercle** dont ce poste était le Chef Lieu venait d’être rattaché au Soudan Français.  En plein centre de la boucle du Niger, à six cent kilomètres au Sud de Tombouctou et à mille kilomètres de Bamako, son Chef Lieu de colonie.

Il n’ y avait aucun colon ni commerçant français mais seulement sept fonctionnaires qui administraient un territoire grand comme la Belgique, et assez peuplé de deux ethnies, les Mossi du Yatenga, des cultivateurs qui y étaient implantés depuis sept siècles et les Peuhls, des pasteurs qui conduisaient leurs troupeaux dans toute la boucle du Niger.

L’impôt à payer (déjà !) à l’administration française obligeait les uns et les autres à vendre d’importantes quantités de produits, arachides, beurre de karité, coton et kapok***.  Ces ventes se faisaient notamment sur le marché d’Ouhigouya (toujours actif aujourd’hui) et l’administration craignaient que les indigènes, supposés inaptes à vendre leurs produits, se fassent spolier par les maisons de commerce. Aussi les Commandants de Cercle étaient-ils chargés de ramasser les produits et d’en assurer la vente au bénéfice de leurs administrés.

C’est ainsi que dés la fin novembre 1934, Monsieur l’Administrateur du Cercle de Ouahigouya, par la voie des bulletins officiels du Soudan et de la Côte d’Ivoire, faisait savoir qu’un marché de mille cinq cent tonnes d’arachide, se tiendrait, place de l’Administration, le 4 janvier suivant.

Nader Attié, le commerçant local syro-haïtien en a été le premier informé. C’était d’ailleurs selon son avis que la date avait été choisie, en fonction des marchés semblables qui se tenaient dans les Cercles voisins, dans un rayon de quatre cent kilomètres, Mopti-Bandiagara, Dédougou, Ouagadougou, Bobo-Dioulasso. C’est qu’il fallait permettre aux commerçants de faire tous les marchés et donc de ne pas les solliciter à deux endroits différents à la même date.

Naba Tiguiré, le Roi des Mossi de Ouahigouya  en fut ensuite averti lorsque, comme de coutume, il se présenta le vendredi suivant au bureau de l’Administrateur. Comme toujours, il approuva : bénéré (cela va bien). Par lui, ses Ministres en furent avertis et à leur tour les représentants des Chefs de Canton. Ces derniers apprirent la nouvelle dans leur Chef-Lieu de brousse et la répercutèrent à leurs Chefs de village. C’est ainsi qu’elle arrive enfin aux Chefs de famille ou plutôt à la première femme de chaque Chef de Famille.

C’est que, selon une coutume qui se perd dans la nuit des temps, la première femme a la charge de récolter pour la famille les arachides qui lui seront nécessaires. La coutume a même fixé le minimum qui doit être produit : une soixante de kilos environ que la famille devra faire parvenir au marché en deux ballots de trente kilos.

Dans toutes les familles, on décortique alors à tout va. Les servantes, les concubines, les enfants viennent à l’aide de la première femme : un morceau de bois, tenu entre les pieds, un petit choc de l’arachide sur ce bois, et la coque est jetée d’un côté pour servir de combustible. Le ou les grains vont de l’autre, grossir la prochaine livraison…

* ville sahélienne, Ouahigouya est actuellement la troisième ville du Burkina Faso, avec 65 000 habitants.  Son marché du centre ville est l’un des plus grand du Sahel 

**Le Cercle était la plus petite unité de l'administration dans les colonies africaines de la France de 1895 à 1946 dirigée par un européen. Un cercle était composé de plusieurs cantons, qui eux-mêmes se composaient de plusieurs villages.

Le commandant de Cercle était placé sous l'autorité du commandant de zone, qui lui-même relevait du gouvernement de la colonie.

Au-dessous du commandant de Cercle étaient placé des chefs de canton puis des Chefs du Village. Les chefs étaient nommés par les Français.

***Le Kapok est une fibre végétale que l’on tire des fromagers. C’est une fibre très légère est imperméable et imputrescible, mais malheureusement inflammable. C’est l’incendie accidentel des gilets de sauvetage en Kapok qui a provoqué le 9 février 1942 à New York l'incendie et la perte du paquebot Normandie réquisitionné par les USA, de la faute d’ouvriers américains malhabiles. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Meutres en série dans les villes révoltées

10 Juin 2013 Publié dans #HISTOIRE

 

Le 23 mai dernier, J’ai conclus mon dernier blog sur le pouvoir politique sous la Terreur, intitulé « la première Constitution de la République, escamotée »  en évoquant l’extreme férocité avec laquelle la Convention avait entreprit d’éliminer, un par un, les foyers fédéralistes répartis sur le territoire français.

 Terreur

Le 13 juillet 1793, à Pacis-sur-Eure, les bataillons fédéralistes de Puisaye marchant sur Paris sont attaqués et défaits par les gardes nationaux fidèles à la Convention.

Apprenant la nouvelle, les fédéralistes de Bordeaux, qui avaient entamé leur propre marche sur Paris, rebroussent chemin le 31 juillet. Le 16 octobre 1793, Bordeaux sera repris par l' « armée » de Brune.
La marquise de La Tour du Pin a en été le témoin direct et j’en ai rendu compte dans deux de mes blogs précédents.  Après avoir décrit cette « armée de bourreaux », leurs atrocités, et les fanfaronnades des fédéralistes, elle raconte aussi la couardise de ces derniers, alors qu’ils étaient « une troupe armée de 800 ou 1000 jeunes gens des premières familles de la ville », « rangée derrière une nombreuse batterie en avant de la porte ». Elle s’étonne qu’ils aient pu se soumettre « sans résistance à 700 misérables, appuyés par deux canons seulement ».

À Lyon, la ville avait organisé un gouvernement de salut public et levé une armée de 10.000 hommes commandée par un ancien émigré royaliste, le Comte de Précy.

La Convention décida d'assiéger la ville le 9 août. Les troupes républicaines entrèrent dans la ville après deux mois de siège. Sur la base d’un rapport de Barère, la Convention vota la destruction de Lyon. Le décret précisait que « La ville de Lyon sera détruite…Le nom de Lyon sera effacé du tableau des villes de la République… La réunion des maisons conservées portera le nom de Ville Affranchie… Et qu’il sera élevé sur ses ruines une colonne qui portera la mention: Lyon fit la guerre à la Liberté. Lyon n'est plus ».

La répression fut atroce : sur ordre de Collot d'Herbois. 6000 personnes périrent en une journée par le canon chargé à mitraille et par le fer, puis furent jetées dans le Rhône.

Marseille fut reprise aux fédéralistes le 25 août, où Barras organisa un tribunal révolutionnaire. 
C’est alors que, de peur, Toulon se donna aux Anglais et qu’il faudra attendre l'arrivée de Bonaparte pour qu’elle soit reconquise le 19 décembre. Ce jour-là, les Toulonnais furent convoqués au Champ de Mars, où se déroulèrent les exécutions sommaires d’un millier de personnes environ, tandis que la ville, rebaptisée Port-la-Montagne, était en partie détruite et ne gardait que le quart de ses habitants.

 

La répression s’avérant plus difficile en Vendée, la Convention hissa la sauvagerie de la répression à un niveau inégalé dans l’histoire de la France.

Est ce cette répression que Vincent Peillon, notre actuel Ministre de l’Éducation, approuve dans son ouvrage « La Révolution Française n’est pas terminée », lorsqu’il juge que cette dernière se caractérise par « la présence et l’incarnation d’un sens,  d’une regeneration et d’une expiation du peuple français » ? 

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Souffrir? Et puis quoi encore?

3 Juin 2013 Publié dans #PHILOSOPHIE

Dans le blog précédent intitulé « le principe de précaution ou la vie, il faut choisir » du 3 mai dernier consacré à la pensée de Nietzsche, ce dernier insistait sur la contradiction entre la volonté de vivre et l’obsession du risque…

De quoi diable avons nous peur ?

souffranceNous avons à l’évidence peur de souffrir.

Le bonheur nihiliste s’efforce de bannir toute source potentielle de souffrance. Certes, il est naturel de fuir la souffrance et de rechercher le plaisir. Mais la douleur est-elle pour autant le mal absolu ?

Jamais, grâce aux progrès de la médecine et à l’amollissement des mœurs, nous n’avons si peu souffert dans l’histoire de l’humanité. Mais, moins nous souffrons, plus nous devenons sensibles à la souffrance et plus nous avons l’impression de souffrir à tout propos.

Nietzsche relève ainsi que : « notre bien-être économique fait croitre notre sensibilité. On souffre des plus menues souffrances. Notre corps est mieux protégé, notre âme plus malade » (Fragment posthume, 1886-1887,7)

Pour Nietzsche, l’obsession de la douleur et de son contraire, le plaisir, est le signe de l’épuisement de celui qui n’a plus assez de force pour affronter la douleur. Il observe que : « Les hommes créateurs ne prennent jamais le plaisir et la douleur pour des questions ultimes de valeur, il faut vouloir les deux si on veut aboutir à quoi que ce soit » (Fragment posthume, été 1887, 2)

Sans la douleur, aucune expérience, aucun apprentissage n’est possible. Elle est nécessaire à l’expérience du plaisir lui-même :

« Et si plaisir et déplaisir étaient liés par un lien tel que celui qui veut avoir le plus possible de l’un, le plaisir, doive avoir aussi le plus possible de l’autre ? » (Le Gai savoir, I, 12).

Au fond, nous savons bien, de part nos expériences, que cette observation de Nietzsche est triviale. Chaque occasion de plaisir peut-être la source d’une douleur potentielle. Chercher une grande histoire d’amour signifie qu’il faut être prêt à affronter un grand chagrin d’amour. Réduire le périmètre de ses expériences à celles où nous ne risquons pas d’être déçus, blessés, trahis, ramène notre vie à l’insignifiant : celui qui n’a jamais souffert n’aura que des joies superficielles.

D’ailleurs la douleur est parfois inhérente au plaisir lui-même, c’est le cas lorsque l’on regarde un film d’horreur ou que l’on déguste un plat pimenté sans même mentionner la violente intensité du plaisir sexuel.

Aussi la souffrance n’est-elle vraiment insupportable que lorsqu’elle n’a aucun sens.

C’est à partir de cette observation que Nietzsche a pris conscience que le nihilisme n’était nullement la conséquence du déclin des religions et des idéologies, mais qu’il constituait la maladie originelle de l’homme.

Alors que les animaux agissent par instinct sans se poser de questions sur le but de leur existence, l’être humain décide lui-même de son but de la vie, ce qui est sa grande force mais aussi sa grande détresse.

Le but de sa vie ? Lorsque l’homme cherche dans la nature une intention qui lui dicterait ce qu’il doit faire, il ne rencontre qu’un mur. Lorsqu’il cherche à se mettre au service d’un principe universel, il découvre qu’il n’en existe nulle part.

En revanche, il prend conscience que le monde est une évolution perpétuelle qui ne va nulle part, qui n’atteint jamais son terme et qui ne répond à aucun ordre préétabli.

 

(À SUIVRE)

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