Le coup d'État du 18 fructidor an V (4 septembre 1797)
Les trois Directeurs de gauche préparaient un projet de coup d’État contre les Conseils avec le soutien des généraux, qui étaient clairement opposés au retour du roi et avec celui des éternels Jacobins, toujours prêts à brandir la violence révolutionnaire.
Les royalistes, que l’on appelait aussi clichyens, car les partisans de la restauration des Bourbons s’étaient rassemblés au sein de l’Institut Philanthropique, fondé en août 1796 par l’abbé André Charles Brottier, qui siégeait rue de Clichy. Ils n’avaient pour eux que la majorité des électeurs : leur combat était donc perdu d’avance, du moins à court terme.
Pour organiser son coup d’État, la majorité du Directoire fit d’abord appel à Hoche (photo ci contre), puis à Augereau qui contrôla, le 4 septembre 1797 au matin, les abords des Tuileries, ferma les barrières de Paris et fit arrêter les Députés et Directeurs identifiés comme opposants.
Selon Adolphe Thiers (Histoire de la Révolution Française, Livre 9, Chapitre X), les Directeurs « durent se résoudre à un coup d'état...» (sic).
Ils étaient soutenus d’une part par les Jacobins, qui « considéraient le régime légal comme une concession faite aux contre-révolutionnaires, et ne voulaient que vengeance et proscriptions », ainsi que par les armées :
« Généraux, officiers et soldats, étaient comblés d'honneurs, gorgés d'argent, repus de plaisirs. Ils avaient conçu de leurs victoires un orgueil extraordinaire. Masséna, Joubert, et Augereau surtout, leur donnaient l'exemple du républicanisme le plus ardent. »
Quant au général Bonaparte, il « voyait avec plaisir l'esprit de l'armée, et en favorisait l'essor. Ses premiers succès avaient tous été remportés contre la faction royaliste, soit devant Toulon, soit au 13 vendémiaire. Il était donc brouillé d'origine avec elle. Mais outre ces raisons particulières de détester la faction royaliste, il en avait encore une plus générale et plus profonde; elle était dans sa gloire et dans la grandeur de son rôle. Que pouvait faire un roi pour sa destinée? »
Le Directoire, cependant, souhaitait employer Hoche. Il effectua des mouvements de troupe qui inquiétèrent les assemblées. Pendant ce temps, Bonaparte choisissait l'anniversaire du 14 juillet pour « faire rédiger des adresses sur les événements qui se préparaient. Ces adresses furent couvertes de milliers de signatures, et envoyées au général en chef. Il les réunit, et les envoya au Directoire, avec sa proclamation, pour qu'elles fussent imprimées et publiées dans les journaux. Une pareille démarche signifiait assez clairement qu'il était prêt à marcher pour...prêter son secours à l'exécution d'un coup d'état... » Naturellement, ces adresses « étaient illégales, car les armées ne pouvaient pas délibérer...Telle était la destinée de notre malheureuse république, que pour se soustraire à ses ennemis, elle était obligée de se livrer aux armées...Le directoire eût bien voulu cacher ces adresses, et ne pas les publier à cause du mauvais exemple; mais il aurait horriblement blessé le général, et l'eût peut-être rejeté vers les ennemis de la république. Il fut donc contraint de les imprimer et de les répandre...Elles donnèrent lieu à de nouvelles plaintes dans les Conseils...Bonaparte causa un nouvel embarras au gouvernement, par le général divisionnaire qu'il lui envoya. Augereau excitait dans l'armée une espèce de trouble, par la violence de ses opinions, tout à fait dignes du faubourg Saint-Antoine...Pour s'en débarrasser, il l'envoya au Directoire...On lui donna sur-le-champ le commandement de la dix-septième division militaire, qui comprenait Paris...On attendait les fonds que Bonaparte avait promis. Ces fonds étaient en partie destinés à gagner les grenadiers du corps législatif... »
Les royalistes pressaient Pichegru d’agir, mais« il n'avait du reste encore aucun moyen réel; car quelques émigrés, quelques chouans dans Paris, ne constituaient pas une force suffisante... » Par contre, le Directoire savait que s’il n’agissait pas avant les prochaines élections, il « n'aurait pas même trouvé alors la minorité conventionnelle qui restait dans les conseils pour l'appuyer, et pour donner une espèce de légalité aux mesures extraordinaires qu'il voulait employer. »
Enfin le jour de l’action vint, le 3 septembre 1796.
Albany
La région d’Albany, capitale de l’État de New York, est située à plus de 200 kilomètres au nord de la ville du même nom. La région, à proximité du Vermont, révèle toutes ses merveilles lors de l’Indian Summer. Les arbres se parent alors de couleurs éclatantes, le climat est d’une douceur étonnante avant de basculer brutalement dans un hiver généralement très rigoureux.
SUNYA est une université typique du nord est des Etats-Unis, une université rêvée pour un étudiant français. À six kilométres du petit centre ville d’Albany, cent mille habitants, un vaste ensemble (Uptown Campus) de plusieurs kilomètres carrés abrite bâtiments universitaires, dormitories et équipements sportifs. Quinze mille étudiants environ ne se contentent pas d’y travailler, ils y vivent.
J’ai donc découvert à SUNYA la vie étudiante américaine, qui est une expérience beaucoup moins austère que la vie étudiante française. Pour commencer, à force de rebuffades, j’y ai appris la pratique de l’anglais en devant par exemple répéter cent fois le mot donuts avant qu’une serveuse finisse par comprendre mon anglais, handicapé par sept années d’apprentissage stérile.
À SUNYA, j’ai découvert aussi le sens du mot gay en me rendant innocemment, lors de mon arrivée, à des réunions d’étudiants gay qui n’étaient pas que joyeuses. J’y ai vu les premiers « gros » qui se sont multipliés depuis, à force de Mac Donald et de Coca. Élisabeth, une étudiante niçoise qui avait eu la seconde bourse de l’Université de Nice pour SUNYA, s’est ainsi vue affecter une chambre avec une grosse, ce qui lui a posé de graves problèmes de cohabitation.
J’ai perçu le rapport de force entre les femelles et les mâles américains, qui se traduirait plus tard par un féminisme débridé aux États-Unis. Au début de chaque semestre, les étudiantes se choisissaient un boy friend, que l’on peut traduire par « chevalier servant », qu'elles changeaient le semestre suivant afin que les mâles ne se croient pas adoubés pour l’éternité. Il s’agissait rarement de relations sexuelles, mais plutôt de servir ces demoiselles, de les aider dans leur cours, de leur porter des sacs trop lourds pour elles ou d’aller leur chercher des sandwichs.
J’ai ressenti l’hystérie américaine autour du sentiment d'insécurité en octobre 1973. Le 6 octobre, le jour de Yom Kippour, l’Egypte et la Syrie ont déclenché une offensive militaire contre Israël. Brejnev menaçait Nixon, affaibli par le scandale du Watergate, tandis que ses conseillers négociaient en sous-main avec les soviétiques, que la Garde Nationale US sortait ses avions de leurs cocons et que des réservistes rejoignaient leurs unités sur tout le territoire américain. Vu de SUNYA, qui était une université à majorité juive, nous étions proches de la guerre mondiale : l’Université nous préparait à rejoindre des abris anti-atomiques, elle organisait des exercices d’évacuation des dormitories et du campus. Cela ne dura que quelques jours, suffisants pour comprendre l’état d’esprit collectif des Américains.
J’ai vu l’importance extraordinaire du sport dans les universités américaines. La qualité des installations sportives traduit le rôle majeur du sport pour la formation des étudiants. Par le sport, ils apprennent concrètement ce qu’implique la compétition, être battu et se relever aussitôt pour progresser ou gagner. Ils jouent le plus souvent en équipe et réalisent ainsi à quel point compte l’effort collectif.
Je me suis inséré dans ce cadre, participant avec assiduité à l’équipe de course de demi-fond de SUNYA. J’étais souvent épuisé par les efforts physiques qu’impliquait la pratique de ce sport, me souvenant encore de la jouissance extrême d’une douche interminable après avoir gagné au sprint une course de plusieurs kilomètres, porté par des jambes flageolantes.
Je me rappelle aussi que l’entrainement physique m’a permis d’échapper à une tentative d’agression. Je revenais un dimanche soir d’un week-end à Montréal, 350 kilomètres au nord d’Albany, par un bus Greyhound. À l’aller, le voyage m’avait offert une belle rencontre, au retour, il s’est achevé par une belle peur.
Il était minuit et je décidais de parcourir à pied, mon petit sac au dos, les six kilomètres qui me séparaient de mon dormitory. Je remarquais un groupe de cinq ou six noirs qui me suivait. Je pris un pas plus rapide, ils firent de même. Je partis en courant, au milieu de la route, pour attirer l’attention des rares automobilistes. Le groupe poursuivant tenta de me rattraper, mais j’accélérais encore, aiguillonné par la peur. Finalement ils abandonnèrent après un ou deux kilomètres, mais pour plus de sûreté, je terminais ma course à un rythme soutenu jusqu’à ma chambre, sauvé par ma pratique du sport.
Et ma thèse dans tout cela ?
(À suivre)
De la thèse à l'agrégation
Dans le récit de mes activités professionnelles de 1969 à 1980, il me reste à écrire la manière dont je suis finalement devenu professeur en Sciences de Gestion en mai 1980, après avoir mené à son terme l’écriture d’une thèse dans cette discipline.
Fin août 1972, je démissionne de la Mobil Oil pour rejoindre l’Université de Nice le 1er octobre 1972. Pendant le mois de septembre 1972, nous nous rendons en famille à Göteborg où j’essaie naïvement, en fréquentant son université, de trouver un sujet de thèse qui serait tombé du ciel ou d’une étagère ou d’une soudaine inspiration.
Évidemment, aucun sujet ne m’inspire sur le coup, mais j’y puise en revanche l’idée de créer une Université du Troisieme Age (voir mes quatre blogs sur « L’invention de l’Université du troisième âge » du 1er mai 2012, « La création de l’Université du troisième âge », 13 mai 2012, « Les premiers pas d’une université du troisième âge », 17 décembre 2012, « U3 en majesté », 21 avril 2013).
Arrivé à Nice, je rencontre aussitôt mon directeur de thèse, Jean-Claude Dischamps, qui détient une idée précise sur le sujet de ma thèse et sur la manière de m’occuper les six mois suivants par le truchement de la campagne électorale qu’il s’apprête à mener pour être élu député.
Je reviendrai ultérieurement en détail sur cette période particulière, par son intensité, par les faits qui se sont déroulés et par ses conséquences sur mon apprentissage de la vie. Il me suffit d’écrire ici qu’elle ne m’a pas permis d’avancer ma thèse avant avril 1973, et encore pas tout à fait, car j’avais beaucoup de cours à effectuer, afin de rattraper les cours que je n’avais pas pu donner au premier trimestre 1972.
Alors que ce serait presque impensable aujourd’hui, c’est mon directeur de thèse qui m’a donné le sujet de la thèse. J’aurai pu surement discuter le sujet, mais je n’ai pas osé tant ses connaissances et son autorité m’en imposaient. Or le sujet qu’il me proposait sur la fiscalité et la croissance des entreprises ne me plaisait pas particulièrement, car j’avais envie, confusément, de traiter un sujet de management. Mais lequel précisément, je ne savais pas. C’est pourquoi je fis confiance à son choix qui me semblait dicté par l’expérience et par sa propre thèse qui portait sur « Les comportements économiques et les distorsions fiscales ». Je me disais logiquement qu’il pourrait mieux m’encadrer s’il connaissait le sujet.
Dans les faits, l’avancement de la thèse ne s’est pas passé comme prévu, trente-trois ans d’expérience de direction de thèses me permettant d’ajouter aujourd’hui : « comme d’habitude ».
Ce n’est pas que l’assistance de mon Directeur de thèse m’ait manqué. Bien au contraire, il m’a soutenu avec une fidélité inébranlable. Mais après tout, il avait écrit une thèse d’économie et moi je devais produire une thèse en gestion. J’ai mis longtemps à comprendre la différence entre les deux, si bien que ma thèse exprime mes hésitations entre une logique tournée vers la collectivité et celle qui privilégie l’entreprise et sa maximisation du profit.
Plus concrètement, mon directeur de thèse était Président de l’Université de Nice quand j’ai commencé la thèse. Il était très occupé mais il était physiquement proche à l’heure où Internet n’existait pas encore. Puis, après avoir présidé l’université jusqu’au 31 octobre 1974, il devint Directeur de l’Enseignement Supérieur (c’est à lui que l’on doit la création du concours d’agrégation en Sciences de Gestion) puis Recteur à Clermont. Bref, il s’éloigna.
Cette séparation géographique avec celui qui était à la fois mon Directeur de thèse et mon mentor ne fut pas une bonne nouvelle. Je perdis son soutien moral et matériel local. S’il me laissait provisoirement son magnifique bureau et la responsabilité de son laboratoire avec deux collaboratrices que j’étais censé encadrer, il activa en revanche un sentiment de jalousie qui n’était pas totalement injustifié, j’en conviens, mais que je subis durement alors que je n’étais plus protégé par sa présence. Et puis il me fallut me résigner à écrire ma thèse tout seul, sauf au moment où, à mi parcours, mon Directeur de thèse provoqua chez moi une salutaire réaction.
Avec un an de retard, en septembre 1973, je commençais sérieusement à réfléchir à la signification de ma thèse. En effet, pour rattraper le temps perdu, Jean-Claude Dischamps, dans le cadre d’un accord interuniversitaire, avait obtenu que je passe le semestre d’automne (fall semester) d’août à décembre 1973 à la State University of New York at Albany, S.U.N.Y.A) où je pourrai tranquillement m’y consacrer.
C’était en effet le cadre et le moment rêvé pour démarrer rapidement ma thèse. Le sort en a décidé autrement.
(À suivre)
L'Indonésie, vous connaissez?
Vous devriez.
Pour ma part, j’ai créé en 1996, des programmes de gestion en langue française à Djakarta, aventure sur laquelle je reviendrai dans des blogs ultérieurs. Aussi suis-je surpris par le peu d’importance accordé à l’Indonésie dans l’actualité française, alors que ce pays va bientôt dépasser le PIB de la France et vient d’élire un nouveau Président de la République au suffrage universel, Joko Widodo, surnommé Jokowi, adulé par les medias, donc susceptible de toutes les déceptions.
L’Indonésie est négligée dans l’actualité française alors qu’elle rassemble deux cent cinquante millions de personnes, ce qui en fait le quatrième pays du monde, loin après la Chine et l’Inde et un peu au-dessous des Etats-Unis.
L’Indonésie est aussi le premier pays à majorité musulmane du monde et pourtant on en entend beaucoup moins parler qu’un micro État comme le Qatar et ses deux millions d’habitants.
L’Indonésie possède pourtant des caractéristiques géographiques qui méritent une attention particulière puisque le pays est composé de 13466 îles, dont quatre grandes, Java, Sumatra, Kalimatan (la partie indonésienne de Bornéo et la Nouvelle-Guinée. De plus, le point culminant de l’Indonésie, Puncak Jaya, est plus haut que le Mont Blanc (4810 mètres) de 74 mètres.
Pour nous français, l’Indonésie est intéressante par son organisation territoriale. Afin de lutter contre les tendances à l’éclatement de ses quarante provinces, l’État centralisé indonésien a donné des pouvoirs étendus aux échelons administratifs inférieurs à la province, les kapubaten (les départements) et les kota(les villes) qui sont presque au nombre de cinq cents: ils ne risquent pas de demander l’indépendance ! On devrait y songer en France avant d’agrandir les provinces et de supprimer les départements…
La République d’Indonésie est toute récente. Elle est née le 17 août 1945, lorsque Soekarno et Hatta proclamèrent l’indépendance des Indes néerlandaises. Depuis l’Antiquité,l'Indonésie est un carrefour maritime qui rassemble un réseau d'Etats portuaires qui commercent entre eux ainsi qu’avec l'Inde et la Chine, leur vendant notamment des clous de girofle. Le VIIIe siècle voit le développement de la riziculture et l’établissement de dynasties hindouistes, respectueuses de l'autonomie des villages et constructrices de temples comme celui de Borobudur.
Puis des marchands musulmans abordent l’archipel, des princes se convertissent à l'islam pour s'intégrer à leur réseau commercial. Progressivement s’installent des royaumes fondés souvent par des Chinois musulmans. Après les Portugais, la Compagnie néerlandaise des Indes orientales obtient en 1602 le monopole des activités commerciales et coloniales en Indonésie, expulsant les Portugais de l’Indonésie, à l’exception du Timor oriental.
La Compagnie parvient à contrôler le commerce d'épices dans l'archipel, jusqu’à ce qu’elle fasse faillite en 1800. L’Etat néerlandais est alors contraint de prendre le contrôle direct de l’Indonésie, confirmé en 1824 par l’accord des Britanniques. C’est alors que les Hollandais mettent en place le cultuurstelsel, un système d'agriculture forcée orienté vers les cultures commerciales qui oblige les paysans indonésiens à travailler soixante jours par an pour le gouvernement. Il poursuit par ailleurs la conquête de Sumatra, de Bornéo, des Petites îles de la Sonde et de Bali pour former les Indes néerlandaises qui constituent aujourd’hui l’Indonésie, à l’exception d’un cinquième de Bornéo et de la Papouasie-Nouvelle-Guinée.
L'invasion, puis l’occupation, d’une partie de l’Indonésie en 1942 par les Japonais encourage le mouvement pour l'indépendance. Deux jours après la reddition du Japon, le 17 août 1945, Soekarno et Mohammad Hatta proclament l'indépendance du pays et deviennent respectivement le premier président et le premier vice-président du pays, tandis que les Pays-Bas tentent en vain de rétablir leur pouvoir puisque le 27 décembre 1949 voit la création de la République des États-Unis d'Indonésie plus ou moins reconnue par les Pays-Bas.
Soekarno prend alors le pouvoir. Après les premières élections parlementaires en 1955, il dissout l'assemblée constituante pour établir un régime autoritaire qui doit composer avec les forces militaires et le parti communiste indonésien. En 1965, Soekarno organise, par l’entremise de l’armée dirigée par le général Soeharto, une violente répression contre le parti communiste qui fait cinq cent mille à un million de morts. Un an plus tard Soeharto éjecte Soekarno du pouvoir pour exercer un pouvoir dictatorial qui se prolonge jusqu’en mai 1998. Les émeutes de Jakarta le chassent alors du pouvoir.
En 1999, se tiennent les premières élections démocratiques d'Indonésie depuis 1955 qui voient la victoire d'Abdurrahman Wahid, rapidement destitué en 2001, à la fois pour des raisons de santé et des soupçons de corruption. Il est remplacé par sa vice-présidente, Megawati Soekarnoputri, qui se trouve être la fille de Soekarno. La constitution est amendée pour permettre la première élection présidentielle au suffrage direct qui élit Susilo Bambang Yudhoyono en octobre 2004, ancien officier et membre du Parti Démocrate, avec 61 % des voix au deuxième tour face à la présidente sortante Megawati Soekarnoputri. Il est réélu en juin 2009.
L’élection suivante a eu lieu le mardi 22 juillet dernier. Le gouverneur de Jakarta, Joko Widodo, a remporté l'élection au second tour, avec 53,15 % des voix contre l'ex-général Prabowo Subianto. Joko Widodo, surnommé Jokowi, est perçu par les medias comme un homme du peuple, ce qui leur vaut la dangereuse faveur des medias mondiaux.
Cela vaut la peine de s’intéresser à l’Indonésie, ne serait-ce que parce que l’Indonésie est aujourd’hui la dixième puissance économique mondiale, juste après la France et la Grande-Bretagne et avant l’Italie et le Mexique. À l’avenir, il ne lui faudra sans doute que quelques années, avec une croissance de son PIB de 6% par an, pour que l’Indonésie entre dans le club des cinq premières puissances mondiales.
Un héros démocratique ou un traître à la République?
Comment, perdant les élections, le Directoire transforme un héros en traître
Les élections d’avril 1797 furent une catastrophe pour les Conventionnels. À peine onze d’entre eux furent réélus, sur deux cent seize députés, au point que les Républicains n'avaient la majorité que dans dix départements. Le corps législatif élut deux royalistes, Pichegru et Barbé-Marbois aux présidences respectives des Cinq-Cents et des Anciens. Au sein du Directoire, Barthélemy et Carnot s’opposaient désormais au trio de gauche, Barras, La Révellière-Lépeaux et Reubel.
La nouvelle majorité avait pour programme de révoquer les lois révolutionnaires et de limiter la dilapidation des finances en attendant de pouvoir restaurer la royauté qui ne manquerait pas de s’imposer légalement après le prochain renouvellement par tiers des Conseils !
Or, il n’était pas aisé pour les trois Directeurs de gauche de s’opposer à la volonté des assemblées, d’autant plus que la Constitution leur ôtait d’importantes prérogatives, en particulier financières.
La révélation des négociations de Pichegru avec le Prince de Condé fut, dans ce contexte une aubaine pour les trois Directeurs, qui préparaient de leur côté un coup d’État contre les Conseils.
Qui était Pichegru ? il représente dans l’histoire officielle de la France républicaines l’image d’un traître, tandis que Robespierre, Barras ou Bonaparte en seraient les héros, selon la règle d’or qui veut que l’histoire soit écrite par les vainqueurs.
Jean-Charles Pichegru (1761-1804) fait partie de ces talents révélés par la Révolution. Fils de petit cultivateurs, repéré par ses professeurs religieux, il devient répétiteur de mathématiques à l’école militaire de Brienne, puis s’engage dans le régiment d’artillerie de Metz comme simple soldat, participe à la guerre d’Indépendance des Etats-Unis et devient sergent-major avant la Révolution.
Républicain, il se fait élire lieutenant-colonel d’un bataillon de volontaires du Gard, monte rapidement en grade jusqu’à devenir en 1793 général en chef de l’armée du Rhin, où il inflige plusieurs défaites aux Autrichiens et aux Prussiens. Général en chef de l’armée du Nord, il conquiert la Hollande, en particulier en s’emparant de la flotte ennemie grâce à sa cavalerie (1794-1795). Il est alors chargé de l’armée du Rhin et Moselle (1795-1796) qui traverse le fleuve pour s’emparer de la place forte de Mannheim. C’est alors qu’il prend contact avec Condé qui lui promet monts et merveilles s’il aide les royalistes à restaurer Louis XVIII.
En 1795 encore, il réprime l’insurrection des sans-culottes à Paris du 1er avril 1795. Ce fait d’arme lui vaut le titre de Sauveur de la Patrie et d’être nommé général en chef des armées du Rhin, du Nord et de Sambre-et-Meuse. Pichegru est alors le véritable héros de la République.
Mais ses revers sur le Rhin attisent les soupçons de royalisme contre lui. On lui retire son commandement, mais sa popularité persistante lui vaut d’être élu en mars 1797 député au Conseil des Cinq-Cents par les monarchistes du Jura. Il s’impose au sein du Conseil comme le chef de l’opposition royaliste, ce qui lui permet de devenir le Président de ce même Conseil des Cinq-Cents.
Lorsque le Directoire organise le coup d’État du 18 fructidor 1796, ses contacts avec les immigrés sont présentés comme une « conspiration ». Le Directoire en profite pour faire arrêter, non seulement Pichegru, mais tous les dirigeants du parti royaliste qu’il fait déporter en Guyane, dans les déserts de Sinnamary.
Mais Pichegru réussit à s’en évader et à rejoindre Londres après de multiples péripéties. En 1804, il conspire avec Cadoudal et Moreau pour enlever Bonaparte, ce qui aurait fait perdre à l’histoire plusieurs pages glorieuses, mais évité bien des drames. Trahi par « l’ami » qui l’héberge, il est arrêté le 28 février 1804 après s’être énergiquement défendu. Six jours plus tard, il est retrouvé étranglé dans sa prison du Temple, officiellement suicidé. Quel destin !
On notera avec quelle facilité les perdants sont qualifiés de traître et avec quel aplomb le Directoire, comme la plupart des dirigeants politiques, refuse le résultat du suffrage universel lorsqu’il ne leur est pas favorable. Une leçon à retenir par ceux qui croient que des élections peuvent changer la donne politique en France…
La BNP au pays des Bisounours
Après le Crédit Lyonnais, la BNP vient de perdre une fortune aux Etats-Unis tandis que ses cadres s’en tirent avec quelques égratignures d’amour propre.
Les responsables de ces bévues, de ces erreurs stratégiques, de ces faux en écriture semblent en effet s'en tirer à bon compte. Certains ont été sanctionnés par la BNP avec des rétrogradations et des réductions de salaire et certains hauts gradés ont été poussés dehors. Mais aucun n’a subi la moindre sanction pénale. Seuls les actionnaires, les employés et les clients de la banque sont censés supporter le poids de leurs méfaits.
Ne vous inquiétez pas, nous répondent-ils, la BNP Paribas est rentable, elle est bien capitalisée et liquide; elle peut payer l'amende sans faire appel aux marchés financiers ou voir ses ratios prudentiels glisser au-dessous des niveaux acceptables.
D’ailleurs la banque a immédiatement acté une charge de 5,8 milliards d’Euros (7,9 milliards de dollars) qui s’ajoute aux 1,1 milliards de dollars qu'elle avait déjà provisionnés et elle va geler le niveau de ses dividendes au niveau de ceux de l'an dernier, pas même le baisser. Le résultat est que le cours de l’action BNP est encore aujourd’hui au-dessus de celui de l’année dernière.
On hésite entre « passez muscade ! » et « tout va très bien, Madame la marquise ! ». 8,9 milliards de $ disparaissent des comptes de la BNP sans aucune conséquence pour personne ? Nous voilà embarqués dans un monde enchanté où la fée BNP serait dotée d’une baguette magique, dont on aimerait qu’elle serve quotidiennement à aider les 63452 entreprises françaises qui ont fait faillite l’année dernière, faute de crédits.
Naturellement, il s’agit d’un leurre. La Banque de France a fait savoir qu’une aussi forte amende appliquée à la grande banque européenne qu’est la BNP pourrait nuire au système financier mondial tout entier. En effet, le plaider coupable de la BNP peut conduire certains pays à lui retirer sa licence bancaire et certains clients à changer de banque. De plus, son exclusion du système de compensation en dollars pour un an sur une grande partie de ses activités, la forçant à effectuer les transactions par l’intermédiaire d'autres banques, est un coup dur pour une banque qui joue un rôle clé dans le commerce international.
Mais il s’agit, maintenant que le mal est fait, de cacher la poussière sous le tapis.
Logiquement et déontologiquement, le gouvernement français et les autorités européennes devraient demander des comptes aux dirigeants de la BNP et les inculper de faux en écritures et de tentatives de fraude. Ils se sont en effet comportés comme de vulgaires tricheurs, comme le présente le rapport américain contresigné par les dirigeants de la BNP (point 22 du rapport des inspecteurs que je joins en annexe et que je vous conseille de parcourir) :
« Pour éviter que ses transactions soient identifiées et bloquées par des banques américaines, BNPP se mit d’accord avec les Entités Sanctionnées dès 2002 et jusqu’en 2007 pour ne pas mentionner leurs noms dans les transactions en dollars US effectuées aux États-Unis. Par exemple : « en raison de l’embargo américain contre le Soudan, veuillez [débiter notre compte en dollars US] sans mentionner notre nom dans votre ordre de paiement » et « transférez la somme de 900 000 dollars US… sans mentionner notre nom – je répète sans mentionner notre nom dans le code d’identification bancaire aux États-Unis ». Ces messages de paiement portaient fréquemment des tampons de salariés de BNPP marqués « ATTENTION: EMBARGO AMÉRICAIN ».
Des dirigeants qui étaient à la fois si peu regardants qu’ils travestissaient les opérations et si stupides qu’ils ont pris le risque de faire perdre 8,9 milliards de $ à la BNP ne devraient plus la diriger. C’est le moins que l’on puisse exiger du Conseil d’Administration de la BNP, comme on doit s’étonner qu’aucun juge ne songe à inculper ces mêmes dirigeants de faux en écritures. On a pourtant condamné Jérôme Kerviel pour ces mêmes dissimulations et des pertes moins importantes au détriment de la Société Générale …
Mais il est bien possible que le régulateur bancaire suisse supplée les autorités françaises. Il a en effet indiqué qu’il allait examiner de plus prés les opérations de Genève de la banque ainsi que les conversations entre les clients et les responsables bancaires cherchant à limiter les dégâts provoqués par leurs actes. Ce ne serait pas la première fois que les autorités suisses osent agir à la place de leurs homologues français…
Il reste que faire semblant de croire que les dirigeants de la BNP sont des victimes innocentes de la vindicte américaine est, à mon avis, une grande faute. Car, en occultant leur responsabilité, on semble vouloir démontrer qu’en France, il suffit d’être du bon côté du manche pour échapper à toute sanction ce qui n’est pas de nature à améliorer le moral des entrepreneurs.
FIN