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Le blog d'André Boyer

Comprendre le monde pour le contrôler

11 Janvier 2009 Publié dans #PHILOSOPHIE


C’est la volonté d’agir sur le monde qui a permis à l’être humain d’élaborer le système qu’il nous a légué. Chaque effort pour comprendre les mystères qui l’entouraient s’est traduit par un contrôle plus étroit de son environnement. On peut l’imaginer : avant même de délaisser la protection de l’arbre, notre ancêtre prend conscience qu’il existe. Il regarde autour de lui et il aperçoit des êtres et des choses qu’il lui faut absolument identifier. Il ressent dés l’origine un besoin aigu de comprendre, car il ressent que le monde, à peine entrevu, lui échappe. Il lui faut se saisir de la vérité par un bout quelconque, et tâcher de l’apprivoiser. Puisqu’il est conscient de se trouver à l’intérieur de quelque chose qu’il appellera plus tard l’Univers, il faut qu’il le contrôle pour diminuer son anxiété.

La survie de l’homme ne repose que sur sa clairvoyance. Des fauves à apprivoiser, des peurs paniques à maîtriser. Aucun homme, et surtout pas le premier, n’a jamais pu vivre sciemment dans l’ignorance et le mensonge. Depuis le début de l’histoire de l’humanité, il a toujours été difficile de vivre dans un Univers chaotique ; la recherche de la facilité a incité l’homme à tricher avec la vérité, mais cette dernière l’a toujours rattrapé, le contraignant à regarder les choses en face.

Dés l’origine, il lui a aussi fallu choisir une vision du monde, à partir des informations fragmentaires dont il disposait. Il a d’abord incliné à une vision unitaire, ou moniste, la plus simple, la plus instantanément satisfaisante pour l’esprit humain. Puis il a cherché un autre angle pour comprendre le monde, et notamment sa dynamique ; le dualisme décrit la régulation du Monde selon deux principes complémentaires et conflictuels, qui doivent par principe s’équilibrer. Le bon et le mal zoroastriens ou le yin et le yang du taoïsme témoignent de ces visions binaires de l’Univers, encore que ce dernier soit également moniste puisque le terme « Tao » désigne le principe régulateur de l’Univers. On observe donc que, dés l’origine, deux formes concurrentes de cohérence, l’une dualiste, l’autre moniste, ont coexisté dans l’esprit humain. 

Elles s’y sont même succédé : la vision cohérente et unitaire du monisme se développe en réaction contre les difficiles équilibres de la pensée dualiste. Les Védas, l’Ancien Testament, l’Âge Classique Grec, le Bouddhisme et le Taoïsme en témoignent, comme les philosophes grecs qui posent le principe que le monde a été constitué à partir d’une matière unique, quelle que soit son apparente diversité. Pythagore, en particulier, se fait le théoricien d’un cosmos unitaire. Pour lui, l’existence des mathématiques révèle un monde invisible et parfait qui constitue les fondements de la réalité. Une réalité mathématique dont Zénon montre les paradoxes, comme celui de la divisibilité illimitée qui fait qu’un voyage dans lequel on accomplit chaque jour la moitié de la distance restante ne peut jamais être achevé.

À la même époque, des philosophes chinois soutiennent des arguments analogues à ceux des Grecs en faveur du monisme : le Taoïsme recommande « d’ aimer toutes les choses également, car l’Univers est un ». Les Upanisads, ces premiers textes sanscrits, font du Brahmane le pouvoir sacré et le révélateur de cette réalité ultime qu’est la conscience qui enveloppe toute chose. On appelle alors « vrai » ce qui rassemble la matière, qui unit les êtres et les choses, qui ne sont rien d’autre que des éléments qui appartiennent à une totalité.

Échanger pour transmettre

Pour comprendre le monde, l’échange est un outil de base que l’homme s’efforce sans cesse d’accroître, comme en témoigne aujourd’hui Internet. Cette communication ne s’est jamais adressée aux seuls contemporains, mais aussi aux morts et aux êtres humains à venir.

Pendant très longtemps, ces échanges ont été limités par le nombre d’humains sur Terre. Quarante mille ans auparavant, il n’y avait guère plus d’habitants sur toute la Terre que dans la ville de Nice au début du XXIe siècle ; les distances qui séparaient les petits groupes d’habitants rendaient difficile pour l’un quelconque d’entre eux de se faire entendre de plus de quelques centaines de personnes.

À cette époque, il n’y avait cinq cent mille personnes sur les cent cinquante millions de kilomètres carrés de terres émergées, soit en moyenne une personne tous les trois cents kilomètres carrés. Il était quasiment impossible de se rencontrer entre hordes différentes. De plus, comme l’australopithèque disposait d’un cerveau quatre fois moins volumineux que celui de l’homo sapiens, il lui était bien difficile de se souvenir de ces rencontres éventuelles.

En dehors de la transmission génétique, l’information disponible dépend des échanges entre individus. Aussi, les progrès matériels de l’humanité ont été fonction du nombre des individus, du volume des communications et de la capacité à conserver l’information. Plus de communications engendrent une compréhension de plus en plus précise du monde, mais aussi plus d’affrontements.

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S
Comprendre le monde pour contrôler...Est-ce comprendre le monde pour contrôler...l'illusion de contrôler Car comment expliquer que plus il ya de compréhension et plus il ya d'affrontements si ce n'est que par l'illusion de contrôle qui in fine réduit le contrôle sans épuiser l'anxiété de la finitude. Bonne journée. Sophia Emic
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