Les racines du pouvoir et de sa désagrégation
17 Janvier 2009 Publié dans #PHILOSOPHIE
Avec la prééminence de la vie matérielle sur la vie spirituelle et le développement de l’agriculture qui en résulte, les premières villes font leur apparition. C’’est peut-être Jericho, cent siècles avant JC, Jéricho qui est la première ville de l’Histoire. On y trouve, vivants ensemble dans la même enceinte, le nombre fabuleux de mille personnes qui y apprennent la dure leçon de la promiscuité. Aussi la violence s'amplifie t-elle. Pour la maîtriser, les premiers citadins inventent une nouvelle structure, la Cité.
Aux portes de cette Cité, les pillards, les cavaliers et les nomades menacent. Depuis que le premier Australopithèque est descendu de l’arbre, aucune société humaine n’a jamais subsisté sans autorité. Le pouvoir politique a toujours été présent, que ce soit dans la bande, la horde ou la tribu. Avec la Cité et bientôt les Cités regroupées dans des Empires, le pouvoir se perfectionne pour répondre à la complexité croissante des agrégats humains.
Mais qu’est-ce que le pouvoir ? Ce n’est pas seulement la force. Il ne trouve sa légitimité profonde que dans le sacré. Le pouvoir ne peut se contenter de raisonner ses sujets, il a besoin d’être consacré. C’est pourquoi il lui faudra toujours invoquer la religion, les valeurs éthiques et la tradition. Aujourd’hui encore, il se réfère à des valeurs sacrées, aussi bien profanes que religieuses. C’est pourquoi la laïque République Française possède une trilogie de termes sacrés, « Liberté, Égalité, Fraternité » et elle ne s’interdit pas les commémorations liturgiques, à l’instar du deux centième anniversaire de la Révolution.
En Égypte, Pharaon parvient à détenir l’un des pouvoirs sacrés les plus spectaculaires de l’Antiquité. Il réussit, grâce à ce pouvoir, à fédérer les trente cités qui s’égrènent le long du Nil pour créer, deux mille cinq cent ans avant JC, un Empire Égyptien qui représentait, avec ses sept à huit millions d’habitants, quinze pour cent de l’humanité. De son côté, l’unité de la communauté chinoise est assurée par l’écriture. La Chine est gouvernée par les mandarins, la caste de ceux qui savent écrire. À la particularité de l’écriture, la Chine ajoute l’application systématique de la culture irriguée qui représente un extraordinaire progrès par rapport à l’efficacité de l’agriculture moyen-orientale et européenne. C’est ainsi que la Chine finira par constituer un empire huit à dix fois plus important que l’Empire Egyptien à son déclin.
Les deux grands Empires contemporains, le Chinois et l’Égyptien, avaient donc tous deux une écriture idéographique et un système centralisé. L’excès de concentration du pouvoir au sommet rendait de plus en plus difficile la gestion des conflits. La Chine a vu son pouvoir se dégrader, en conservant sa cohérence, tandis que l’Empire Égyptien s’effondrait sous la pression de ses assaillants. C’est ainsi que la centralisation tue le pouvoir. On ne devrait pas oublier la leçon en France, le pays le plus centralisé d’Europe, sinon du monde, dont le Président prétend à la fois s’occuper de l’avenir du capitalisme mondial et du moindre fait divers local. La leçon de l’histoire montre que le pouvoir s’y noie, que les structures se désagrégent et que les hommes partent à la recherche de pouvoirs plus raisonnables, donc plus légitimes…