La connivence des médias et du pouvoir
10 Mai 2009 Publié dans #HISTOIRE
Dans mon blog du 22 avril dernier, Je constatais la symbiose qui existe en France entre le monde politique, les hauts fonctionnaires, les grands chefs d’entreprise, les artistes connus, les journalistes et les animateurs. Ensemble, ils constituent ce que Raymond Barre appelait un microcosme et que je qualifie d’oligarchie puisqu’elle s’autoproclame classe dirigeante.
Un livre, publié il y a quelques années et déjà oublié, d’un journaliste nommé Daniel Carton, intitulé « Bien entendu, c'est off : Ce que les journalistes politiques ne vous racontent jamais » illustre bien ce phénomène, jusque dans les détails. Voici comment l’éditeur présente le livre en quatrième de couverture :
…Au fil de sa carrière de journaliste politique à La Voix du Nord, La Croix, Le Monde et Le Nouvel Observateur, Daniel Carton a relevé nombre d'exemples de cette connivence intéressée qui voit le silence des uns payé par les services des autres : un logement, des voyages, des places à l'Opéra ou à la Comédie-Française... Cette complicité faite de bronzage en commun sous le commode prétexte d'universités d'été, voire plus si affinités, et d'une subtile pratique du tutoiement scelle le pacte qui unit « la France d'en haut ». Daniel Carton, pour sa part, a choisi de se situer délibérément du côté de cette « France d'en bas » sans cesse manipulée et qui n'a pas le droit de savoir ce qui se chuchote « off ». La politique comme on ne la raconte pas… C’est tout cela que nous raconte l’auteur, cette cohabitation quotidienne amicale, quasi-incestueuse, qui a peu à peu transformé beaucoup de journalistes en relais complaisants, voire serviles du pouvoir[1].
Ensemble, journalistes et pouvoir, finissent par croire que leur petit monde qui dirige effectivement le pays doit en outre le guider, le convaincre, faire « œuvre de pédagogie » comme ils le disent avec une étonnante suffisance. Il leur arrive souvent de déplorer que les Français soient malcommodes à diriger, comme s’il était légitime, que dis-je naturel, que le « peuple » les écoutent, les suivent.
Comme s’ils donnaient l’exemple.
Comme s’ils savaient mieux que les autres.
Comme s’ils avaient un chemin à montrer.
Comme s’ils étaient désintéressés.
Comme s’ils ne se trompaient que rarement.
Comme s’ils avaient obtenu des succès mémorables…
Que nous y consentions ou non, acceptons le fait que les medias organisent le filtrage des nouvelles en fonction de ce que pense l’oligarchie à laquelle ils appartiennent. Prenons en acte, nous les Français ordinaires qui n’avons droit à leur sollicitude que lorsqu’ils tentent de nous convaincre du bien fondé de leurs idées. Il ne leur vient par contre rarement à l’idée qu’ils ont des responsabilités qui les engagent. Car ce n’est pas le peuple qui modifie les lois électorales, ce n’est pas le peuple qui décide que l’on ne peut pas juger le Président, ce n’est pas le peuple qui a décidé de l’introduction de l’Euro, ce n’est pas le peuple qui a jeté par les fenêtres du Crédit Lyonnais cent cinquante milliards de francs, ce n’est pas le peuple qui a décidé de faire des économies au risque de tuer des milliers de personnes dans l’affaire du sang contaminé, ce n’est pas le peuple qui a emprisonné les accusés d’Outreau. C’est le microcosme politico médiatique qui l’a décidé, qui a justifié les choix qui ont été faits, tout en veillant à que les comptes ne soient pas soldés et que le choix électoral soit réduit au minimum.
C’est l’énorme machine médiatique qui veille à ce que la balance des forces bascule toujours dans la direction qui convient à l’oligarchie.