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Le blog d'André Boyer

En attendant Philippe le Bel

3 Novembre 2010 Publié dans #HISTOIRE

Lors du dernier blog que j’ai consacré à l’histoire, le 3 octobre 2010, j’ai rappelé que les Rois, avant la République, ont très rapidement cherché à accroître leur contrôle sur la société française. C’est ce que je vais m’efforcer de montrer dans ce blog et ceux qui vont lui succéder sur ce thème, afin de permettre de mieux comprendre la logique et la permanence du système français dans lequel  nous vivons aujourd’hui.

La tendance permanente de la France au renforcement du pouvoir de l’Etat pointe déjà sous Philippe Auguste (1180-1223), qui assure la diffusion de l’autorité du monarque par la mise en place des baillis. Ces derniers sont des Commissaires Royaux investis de pouvoirs d’administration, de justice et de finances. Philippe Auguste a créé cette fonction pour affermir son pouvoir sur son domaine royal, un domaine qui ne comprend pas encore les possessions de ses vassaux, comme la Bretagne par exemple. D’abord itinérants, les baillis deviennent sédentaires au XIIIe siècle, ce qui renforce leur pouvoir aux dépens des seigneuries locales, par le biais de levées de taxes extraordinaires, d’interventions dans les affaires municipales ou même d’annexions pures et simples dans les cas litigieux.

Saint Louis (1226-1270) succède à Philippe Auguste. Il acquiert pour sa part une réputation d’arbitre international qui est sanctionnée par sa canonisation équivalente aujourd’hui à un prix Nobel de la Paix. Grâce à lui, le Roi de France, déjà le premier de la chrétienté sur le plan matériel, devient également primus inter pares sur le plan spirituel. Mais c’est après lui que commence à s’affirmer la toute puissance de la monarchie française, qui fait aujourd’hui de la France le seul État centralisé du continent européen, sinon du monde.

À cette époque, les Anglais viennent d’arracher la Grande Charte qui constitue le premier grand texte reconnaissant des libertés et des droits intangibles aux sujets du royaume anglais. Alors que Philippe Auguste règne en France, la Grande Charte, appelée Magna Carta, est concédée en juin 1215 par Jean sans Terre sous la pression des barons et de l’Église. Elle garantit à tous les hommes libres le droit de propriété, la liberté d’aller et de venir en temps de paix. Elle donne aussi des garanties en cas de procès criminel, comme l’impartialité des juges ou la nécessité et la proportionnalité des peines. Elle pose le principe essentiel, pour un régime parlementaire, qu’aucun impôt ne sera levé sans le consentement du Conseil du royaume, un Conseil où siégent les barons, les comtes et les hauts dignitaires ecclésiastiques.

Pendant ce temps, les souverains hispaniques ne parviennent pas encore à atteindre l’unité politique de la péninsule, les principautés italiennes se livrent à des luttes intestines, l’Allemagne est éclatée entre de multiples souverainetés hétérogènes coiffées par un Saint Empire Romain Germanique. Ce dernier forme un tissu monarchique et corporatif doté de très peu d'institutions impériales communes. Il sert de cadre juridique à la cohabitation de princes et de ducs quasi autonomes qui reconnaissent l'Empereur comme le dirigeant de l'Empire, mais c’est un Empereur qu’ils élisent eux-mêmes. Il reste que les habitants de l’Empire ne sont pas les sujets directs de l'empereur, contrairement aux sujets du Roi de France, car ils ont soit leur propre seigneur, soit appartiennent à une ville d’Empire dirigée par un Maire élu.

 

Philippe IV le Bel (1285-1314), Roi de France, n’a pas ces soucis de pouvoir concurrentiel. Il devient le  maître d’œuvre d’une monarchie française  qui ne cesse de s’affermir en droit et en fait. C’est pourquoi le régime de Philippe le Bel apparaît étrangement moderne, à l’aulne de la situation actuelle de la France. 

À SUIVRE

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R
bonjour pourquoi incluez vous la Bretagne dans le royaume de France? elle n'y est rattaché qu'en 1532...
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A
Cher Monsieur, <br /> je vous remercie de votre observation, car elle a montré que mon billet restait ambigu. <br /> Dans mon texte en effet, je n'écris pas que la Bretagne appartient au royaume de France, mais la carte de l'Europe que je produis ne fait pas la distinction entre les possessions royales et les États vassaux du Royaume de France, comme l'était la Bretagne à l'époque. <br /> C'est pourquoi j'ai apporté, grâce à vous, les corrections suivantes à mon billet: <br /> 1 J'ai ajouté, au début du billet, une carte de la France qui distingue le domaine du Roi de France proprement dit des autres États, vassaux ou non. <br /> 2 Petit clin d'oeil entre nous, j'ai rajouté dans le texte que la Bretagne était un État vassal du Royaume de France. <br /> 3 J'ai placé plus loin dans le texte la carte de l'Europe, carte nécessaire parce que je compare les organisations étatiques de la France avec celles de l'Angleterre, de l'Allemagne, de l'Italie et de l'Espagne. <br /> 4 J'ai enfin fait quelques menus corrections de forme pour mieux nuancer mon propos. Par exemple dans l'introduction "la permanence du système français dans lequel nous vivons aujourd’hui" remplace " la permanence du système français que nous subissons" afin de ne pas proposer un jugement de valeur à priori sur la question de la centralisation française. <br /> J'espère que ces corrections répondront à votre observations. <br /> Avec mes meilleures salutations, <br /> André Boyer