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Le blog d'André Boyer

Notre avenir 2: quelles solutions?

8 Mai 2010 Publié dans #ACTUALITÉ

Le 5 mai dernier, j’ai commencé une série d'articles relatifs aux consequences des deficits publics sur notre avenir. Les évenements se sont accélérés depuis. L’objectif de cet article et des articles suivants est de vous expliquer ce qui va se passer dans les prochains mois et les prochaines années.

solutions.jpg.gifJe terminais mon article en observant « qu’en France, comme dans de nombreux pays développés, le fardeau de la dette est si lourd qu’il commence à étouffer la croissance économique, puisque les remboursements croissants de la dette ne sont consacrés ni à l’investissement, ni à la consommation. »

 

Quelles sont donc les solutions ?

 

Le problème, c’est que l’histoire a montré que la discipline budgétaire n’a jamais permis, à elle seule, de réduire le ratio d’endettement d’un pays. Depuis 1980, une trentaine de pays se sont efforcés de réduire leur ratio dette/PIB, mais leur succès est toujours venu plus de la croissance économique que de l’austérité budgétaire. Or les perspectives de croissance des pays développés sont assez faibles pour plusieurs raisons :

- Tout d’abord, la prospérité des deux dernières décennies repose en grande partie sur le crédit facile, la croissance de la consommation et  la mondialisation. Le crédit facile est désormais en voie de disparition, celle de la consommation est justement freinée par la nécessité de pratiquer une politique d’austérité. Il reste la mondialisation pour les pays qui sont assez compétitifs pour en profiter, c’est-à-dire ceux dont la balance commerciale est positive. Ce n’est pas le cas de la France (50 milliards € de déficit environ, ni celle de la Grèce bien sûr, dont le déficit est catastrophique puisqu’il atteint 30 à 35 milliards €).

- Ensuite, les taux d’intérêt sont  historiquement bas. Ils ne risquent pas de baisser encore mais plutôt de s’élever, rendant la charge de la dette à venir plus coûteuse et la croissance plus problématique.

- Enfin, le vieillissement de la population qui affecte la plupart des pays développés engendre un potentiel de croissance amoindri et des dépenses publiques accrues.

 

En conséquence, si ni l’austérité ni la croissance ne peuvent être suffisants  pour stabiliser la dette, et comme il n’est pas possible que cette dernière monte jusqu’au ciel sans exploser, il ne reste plus que trois solutions, l’inflation, la déflation, ou carrément la défaillance de paiement.

L’inflation est la solution la plus classique et la plus confortable pour tous les protagonistes, Etat, consommateurs et entreprises, à l’exception notoire des prêteurs qui sont remboursés en monnaie de singe. Elle intervient à travers la  « monétisation » la dette, qui signifie que l’État demande à sa banque centrale d’acheter la dette émise. Cette dernière est réglée avec de l’argent créé, ce qui augmente la quantité de monnaie en circulation, donc de l’inflation. Certains demandent ainsi à la Banque Centrale Européenne (BCE) d’acheter les emprunts des pays de la zone Euro en difficulté, ce qui reviendrait à importer de l’inflation dans l’ensemble de la zone, donc dans les pays « vertueux ».  On peut douter que ces derniers soient d’accord.

On peut objecter à cette « solution » que l’inflation est une solution inopérante parce que les taux d’intérêt augmentant avec l’inflation, ils aggravent ipso facto la charge de la dette. Ses partisans répondent que les taux d’intérêt suivent avec retard l’inflation et que de toutes façons les dettes anciennes, qui ont été consenties à des taux d’intérêts bas, seront remboursées avec de la monnaie dévaluée. Si bien que l’inflation, solution éprouvée pour amortir en douceur les dettes, reste une solution d’autant meilleure pour un État endetté qu’elle est brutale et inattendue pour les prêteurs.

Bien sûr, les banques centrales ont officiellement pour mandat de stabiliser les prix, mais le cadre institutionnel de leur mandat est destiné à s’adapter aux  circonstances. On se souviendra à cet égard avec quelle vitesse la crise a fait oublier les fameux « critères de Maastricht » à l’Union Européenne !

Il existe cependant une situation dans laquelle l’option de l’inflation est fermée, c’est celle de la zone Euro. Elle sera fermée tant que les Allemands y seront opposés. Tant que ce sera le cas, la solution ouverte à chacun des Etats de la zone Euro est celle de l’austérité budgétaire.  Or nous venons d’observer que son efficacité risquait d’être insuffisante pour stabiliser la charge de la dette. Il ne reste plus alors qu’à agir ou à prier pour que l’économie nationale du pays endetté soit en croissance.

Or la croissance d’une économie nationale, dans le cadre de la mondialisation, implique d’améliorer la compétitivité internationale du pays. Affaiblir la monnaie est une option, que ce soit l’Euro, le dollar, la livre sterling ou le yen. Mais cela ne se décrète pas si aisément, puisque chacun peut y répondre par une baisse concomitante de sa propre monnaie, annulant ipso facto l’effet escompté.

Une autre solution pour obtenir, sinon la croissance, du moins un meilleur équilibre des comptes avec l’étranger, est à la portée de chacun des Etats endetté, mais elle est particulièrement amère : elle consiste à provoquer dans son propre pays une déflation de l’économie par une politique monétaire et budgétaire très restrictive qui, mécaniquement, réduit les importations et accroît les exportations. C’est la politique qu’a pratiquée l’Allemagne ces dix dernières années et qui porte aujourd’hui ses fruits en termes de balance commerciale.

Mais une politique de déflation signifie des coupes claires dans le budget, des hausses d’impôt et des baisses de salaire destinées à faire baisser le niveau des prix dans l’économie. C’est le remède que le FMI et l’Union Européenne se proposent d’appliquer à la Grèce. On verra comment réagiront les cobayes grecs à ce traitement, au plan social et politique. Mais son succès économique n’est pas garanti, car la déflation peut avoir un impact trop fort sur la croissance du PIB et contribuer à accroître plutôt qu’à réduire le ratio dette/PIB.

Il ne resterait alors plus qu’une solution, la défaillance de la dette souveraine. Car dans l’histoire, jamais les emprunteurs n’ont honoré intégralement leurs dettes lorsqu’ils étaient en difficulté, car la  dégradation de la situation sociale et politique qui résultait des contraintes économiques les en empêchait. L’histoire du gonflement de la dette souveraine se termine toujours par une défaillance, soit douce sous forme d’inflation, soit brutale sous forme de renégociation de la dette.

 Nous examinerons dans le prochain article la situation de chacun des protagonistes par rapport à la pression que la dette des Etats va exercer sur leurs économies respectives dans les vingt prochaines années. Vous verrez qu’ il apparaît clairement quatre types de situations différentes, celle des pays émergents dont les soucis sont ailleurs, celle du Japon endetté, celle assez classique des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne et celle très spécifique de  la zone Euro.


La structure de maturité de la dette est la variable qui permet de savoir si un Etat est plus ou moins gagnant avec les remboursement des emprunts anciens souscrits à des taux bas, comme c’est le cas actuellement : comme le stock entier de dette n’est pas renouvelé au même moment, le taux d’intérêt nominal applicable à la dette réagit avec un temps de retard à une hausse des rendements sur le marché. Il faut noter que pour les Etats-Unis, la maturité moyenne est tout juste inférieure à 5 ans, contre près de 14 ans au Royaume-Uni. Ce dernier serait donc plus gagnant que les Etats-Unis à une poussée d’inflation puisque la hausse des  taux d’intérêt nominaux alourdirait plus lentement le coût de la dette  au Royaume-Uni qu’aux Etats-Unis.   

 

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