Le Directoire, dictature militaire
15 Novembre 2014 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE
Les victoires militaires de la Convention, puis du Directoire, avaient complètement modifié la situation stratégique, donc politique, économique et sociale de la France.
Il fallait désormais compter avec les généraux sur le plan politique, intégrer le flux de ressources financières émanant des territoires conquis et voir se développer une classe sociale formée des innombrables militaires envoyés ou revenus du front.
Les victoires militaires avaient en effet permis d’installer en Italie des « républiques sœurs », cisalpine, ligurienne, romaine et même parthénopéenne. La Suisse avait été transformée en République helvétique et la Hollande en République batave.
Déjà à l’avènement du Directoire, la France de 1795 était nettement plus étendue que celle de 1789. Il s’y ajoutait maintenant Avignon, la Savoie, Nice, les anciennes enclaves allemandes, l’évêché de Bâle et les ex-Pays-Bas autrichiens, ce qui représentait 580 000 km2, plus qu’aujourd’hui en 2014.
La République comptait alors environ 32 millions d’habitants, dont 28 millions sur le territoire de l’ancien royaume. Mais pendant l’hiver 1798-1799 une nouvelle coalition dirigée contre la France s’ajoute à des insurrections royalistes en divers points du pays.
À l’été 1799, la situation militaire est devenue critique, car les conquêtes de la République engendrent dans les pays conquis de multiples mécontentements, sociaux, nationalistes et religieux. En Belgique, une guerre des paysans doit être réprimée. En Suisse, les ruraux catholiques mènent une guerre d’embuscade. En Calabre, les insurgés chassent progressivement les Français, qui perdent Naples. Dans toute l’Italie, insurrections et coups de main tiennent en alerte les troupes. Le Directoire tente en vain un débarquement en Irlande tandis que Bonaparte se trouve en difficulté en Égypte où il s’enlise dans une défaite navale et un conflit avec les Turcs.
L’assassinat des plénipotentiaires français à Rastatt, le 28 avril 1799, est le prélude à la reprise des combats face à une coalition qui comprend désormais la Turquie qui se joint à l’Angleterre, l’Autriche, la Russie et Naples. Les troupes anglaises débarquent en Hollande tandis que les Russes et les Autrichiens marchent vers la Suisse. Ces offensives sont stoppées par le général Brune qui parvient à repousser le débarquement anglo-russe en Hollande et par le général Masséna qui bat les armées russes et autrichiennes à Zurich.
Tous ces événements militaires poussent le Directoire à décréter une nouvelle levée en masse, l’armée française atteignant alors et même dépassant l’effectif considérable d’un million de soldats. Un emprunt forcé sur les riches est institué pour équiper les nouvelles troupes, et une loi créé des listes d'otages dans chaque département.
Qui sait que cette loi, adoptée par les Conseils le 12 juillet 1799 (24 messidor an VII), prévoit que les administrations des départements troublés par des assassinats politiques ou des émeutes pourront arrêter comme otages les nobles, les parents d'émigrés et les ascendants des présumés coupables. Ces otages seront civilement responsables des indemnités dues aux victimes et des récompenses accordées aux agents de la répression. Ce ne sont pas des nazis qui ont imaginé cette loi, mais des républicains français !
Douce France…
Qui accepte aujourd’hui de reconnaître que la France du Directoire, première puissance démographique de l’Europe, n’était qu’une brutale dictature militaire ?