UNE STRUCTURE DE POUVOIR POUR DEUX SIÈCLES
1 Mars 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE
La nouvelle Constitution, celle du 22 frimaire an VIII, s’appuie sur une approbation en apparence massive des électeurs.
Il y avait sept millions d’électeurs. En janvier 1800, on compte trois millions de « oui », mais un million et demi de voix ont été rajoutés par le pouvoir. Seules mille cinq cent personnes ont osé voter non, d’après les résultats officiels. C’est donc une approbation pour le moins mitigée.
La proclamation des résultats est précédée par une proclamation des Consuls qui indique fièrement sa volonté de stabiliser la république grâce à un pouvoir fort et stable : « Les consuls de la République aux Français : Une Constitution vous est présentée. Elle fait cesser les incertitudes que le Gouvernement provisoire mettait dans les relations extérieures, dans la situation intérieure et militaire de la République. - Elle place dans les institutions qu'elle établit les premiers magistrats dont le dévouement a paru nécessaire à son activité. - La Constitution est fondée sur les vrais principes du Gouvernement représentatif, sur les droits sacrés de la propriété, de l'égalité, de la liberté. - Les pouvoirs qu'elle institue seront forts et stables, tels qu'ils doivent être pour garantir les droits des citoyens et les intérêts de l'État. - Citoyens, la Révolution est fixée aux principes qui l'ont commencée : elle est finie. »
Cette Constitution durera quatorze ans, jusqu’à la Restauration. Une de ses originalités est d’instituer trois chambres de représentants, le Sénat, formé de quatre-vingts membres inamovibles et à vie, qui juge de la constitutionalité des lois ; le Tribunat, composé de cent membres, qui discute les projets de loi et le Corps législatif, composé de trois cents membres, qui fait la loi sans en débattre.
Pour plus de sûreté, les électeurs perdent le droit d’élire directement leurs gouvernants, puisqu’ils ne peuvent qu’établir des listes de notabilités parmi lesquelles le gouvernement choisit les représentants qui lui conviennent.
Le gouvernement est nominalement confié à trois consuls nommés pour dix années, indéfiniment rééligibles, alors que seul le Premier consul, nommément désigné comme étant Bonaparte dans la Constitution, a seul le pouvoir exécutif.
Dés le début du Consulat, les textes sont très proches de définir un pouvoir exécutif personnel et à vie, au point que les évolutions constitutionnelles vers les titres de Consul à vie et d’Empereur ont plus d’importance sur la forme que sur le fond. Sous la direction des consuls, un Conseil d'Etat est chargé de rédiger les projets de lois et de résoudre les difficultés qui s'élèvent en matière administrative.
La Constitution prévoit également une organisation rationnellement centralisée de l’administration et des finances, qui avait été conçue dès le début de la Révolution. Cette organisation tient toujours aujourd’hui, contre vents et marées, tant elle est liée au caractère constitutif de l’État français.
Dés le 17 février 1800, l’administration du territoire est organisée autour du département et son préfet, de l’arrondissement et de son sous-préfet, de la commune et de son maire, assistés respectivement par un conseil général, d’arrondissement et municipal. Les juges et les administrateurs deviennent des fonctionnaires. La hiérarchie des juridictions civiles et criminelles est assurée par l’installation d’une Cour de cassation et le contrôle du pouvoir judiciaire par un commissaire du gouvernement installé auprès de chaque tribunal.
L’unification du droit français est confiée au Conseil d’État. Le prélèvement de l’impôt est construit autour de deux corps indépendants, qui existent toujours, celui des contrôleurs pour la répartition de l’impôt et celui des percepteurs pour son recouvrement. La Banque de France, créée en février 1800, est un établissement privé contrôlé par l’État, qui est autorisé à émettre un papier-monnaie accepté pour sa valeur intégrale par les caisses publiques. Elle assure les avances de trésorerie à l’État. Le Franc germinal est fixé sur la valeur d’or en réserve que détient la Banque de France.
L’organisation administrative centralisée française est mise en place en 1800 pour les deux siècles qui suivent, au moins, en attendant d’observer les évolutions récentes liées à l’Union Européenne.