ARABIE SAOUDITE VERSUS YEMEN
17 Février 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ
L’Arabie saoudite à la tête d’une coalition à l’américaine passe donc à l’offensive pour mener une guerre dont elle connaît d’avance l'incertaine issue.
L'opération qui porte le nom martial de Tempête décisive a été lancée la nuit du 25 mars 2015 avec l’objectif de réinstaller au pouvoir le résident Abd Rabo Mansour Hadi, renversé par l'insurrection Houthi. La coalition rassemblée autour de cette opération rassemble une coalition de pays arabes, tous financièrement ou politiquement dépendants de l’Arabie saoudite, l’Egypte, la Jordanie, le Soudan, le Maroc et les membres du Conseil de Coopération du Golfe, le Koweït, Bahreïn, les Émirats arabes unis et le Qatar. Oman, qui fait partie du Conseil de Coopération du Golfe, n’y participe pas. S'y joindront plus tard des mercenaires colombiens, envoyés secrétement par les Émirats arabes unis, et même des troupes sénégalaises.
Les Etats-Unis, notamment par l’intermédiaire de leur base à Djibouti bientôt concurrencée par une base chinoise toute proche, soutiennent activement la coalition, ainsi que la Grande-Bretagne. La France fait de même par l’intermédiaire de la DGSE et de ventes d’armes.
Les moyens mis en œuvre, au moins dans les premières semaines, ont été considérables. L’Arabie saoudite a mis en jeu une centaine d’avions de combat, les Forces aérienne des Émirats arabes unis, du Bahreïn, du Qatar, de Jordanie, du Maroc, qui y a même perdu un avion, et du Soudan engagent ensemble 76 avions. La marine égyptienne y a participé avec 4 navires de guerre.
Avec ces forces rassemblées, les forces aériennes des coalisés ont effectué dans la nuit du 25 au 26 mars 2015 des frappes sur plusieurs aéroports, des camps militaires ainsi que sur le palais présidentiel. La coalition a annoncé elle-même qu'elle menait plus de 120 raids par jour, faisant de nombreuses victimes dans la population civile. Par ailleurs des soldats saoudiens appuyés par des soldats pakistanais prirent position à la frontière du Yémen.
Le 21 avril 2015, l’opération Restaurer l'espoir succéda à l'opération Tempête décisive. Elle permit la réinstallation des alliés yéménites de l'Arabie Saoudite à Aden le 17 juillet 2015 et de reprendre lentement des villes proches de Sanaa, la capitale.
La tactique de la coalition conduite par l’Arabie saoudite consiste à utiliser l’arme aérienne pour dégrader la capacité militaire des Houthis, auquel s’ajoute un blocus naval. De plus, une force de vingt mille yéménites et de dix mille coalisés a été constituée avec pour objectif à terme de reconquérir la capitale du Yémen, Sanaa.
Les Houthis de leur côté semblent déterminés à garder le contrôle des régions à majorité chiite et lancent des attaques à faible échelle sur le territoire de l’Arabie saoudite.
Mais l’aboutissement de ce conflit n’est pas encore en vue. En effet, si le Président Hadi a repris le contrôle d’Aden, celui du reste du Yémen est problématique étant donné la diversité des acteurs en présence :
- Les forces qui luttent contre les Houthis sont des milices locales qui cherchent à obtenir l’indépendance du Sud du Yémen.
- Dans l’ensemble du Yémen, les combats sont conduits par des groupes locaux qui se refusent à être contrôlés par le pouvoir central, au reste très faible.
- Les Frères musulmans d’Al-Islah apparaissent comme la force politique la mieux organisée ce qui lui permet d’exiger une part importante du pouvoir au détriment du parti du Président, alors le Congrès général du peuple.
Le résultat est que de forts désaccords subsistent sur la future forme de l’État yéménite, centralisé ou fédéré, tandis que l’infrastructure et l’économie du pays en grande partie détruits rendent problématique sa reconstruction, ce qui nécessitera une forte aide internationale, donc au préalable un accord politique.
Comme les Houthis ont montré qu’ils constituaient une force politique majeure, qu’ils contrôlent Sanaa, que le terrain qu’ils occupent est favorable à leur tactique de combat, il faudra prendre en compte leurs intérêts dans toute négociation.
Or l’opinion publique internationale s’inquiète de plus en plus du coût humain de la guerre menée par la coalition et des progrès des islamistes d’Al-Qaïda et de l’EI dans la partie centrale du Yémen. Elle pousse les soutiens de l’Arabie saoudite à rechercher une solution négociée qui permettrait de mettre fin à leur avance en rassemblant toutes les parties prenantes contre les islamistes.
Mais cette solution négociée est d’autant moins en vue que l’Arabie saoudite fait monter encore les enchères en faisant savoir qu’elle est prête à envoyer des troupes au sol en Syrie pour limiter la progression des troupes de Bachar El Assad, s’engageant de la sorte sur un nouveau front anti chiite et anti iranien.
À SUIVRE