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Le blog d'André Boyer

LES PRINCIPES MERCANTILISTES

29 Octobre 2017 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

LES PRINCIPES MERCANTILISTES

 

Vous voudrez bien retenir que le principe qui sous-tend cet article est que le pouvoir s’impose à la théorie et non l’inverse. C’est pourquoi, jusqu'au XVIe siècle, la réflexion économique en Europe était fondée sur la doctrine chrétienne, élaborée presque exclusivement par les penseurs scolastiques.

 

Inspirées par les pensées d'Aristote et Platon et encadrées par l'Église, les conceptions économiques d'alors dénonçaient, suivant en cela Aristote, l’accumulation des biens motivée pour son plaisir personnel. Si la chrématistique, qui est la gestion et la négociation des affaires d’argent, était observée, c’était avec un esprit critique. L’échange d’argent était toléré lorsque la communauté (l'oïkos) n’était pas en mesure de s’auto suffire, mais il était condamné lorsque la motivation était l’accumulation de richesses. Aristote justifiait cette position en affirmant que l’homme était fait pour vivre en communauté alors que  l’accumulation de l’argent était un moyen pour l’individu de prendre le contrôle de la communauté. On ne peut qu’observer, sur ces deux points, que ses analyses n’ont pas vieilli…

L’Église catholique, notamment par l’entremise de Saint Thomas d’Aquin, reprenait les critiques d’Aristote, mais les mercantilistes prirent le contrepied de cette approche traditionnelle, en exaltant au contraire le développement des marchés et du commerce, pilotés qu’ils étaient  par les princes et les marchands.

Entre 1500 et 1750, les économistes mercantilistes exprimèrent des doctrines variées, selon le temps et le lieu, mais on peut néanmoins retenir quelques uns de leurs principes centraux:

- Le commerce extérieur était un enjeu de puissance : comme le système économique était vu par les mercantilistes comme un jeu à somme nulle, le commerce intérieur n’avait que peu d’effet sur la richesse nationale, ce qui justifiait la priorité accordée au commerce extérieur.

- La recherche de la richesse était un but national : les premières théories mercantilistes étaient bullionistes, ce qui signifiait qu’un pays riche était celui qui accumulait de l’or et de l’argent. En conséquence, tous les pays européens, à commencer par l’Espagne et le Portugal, possesseurs des mines en Amérique, prohibèrent l’exportation des métaux précieux et comme le commerce international restait le moyen privilégié de les acquérir, il revint à l'État d’exporter suffisamment pour obtenir une balance commerciale excédentaire d’or et d’argent. En outre, les bullionistes prescrivirent des taux d'intérêt élevés pour encourager les investisseurs à placer leur argent dans le pays.

- La notion de richesse évolua au XVIIe siècle : les mercantilistes élargirent leur définition de la richesse d’un pays en y ajoutant l’ensemble des biens nécessaires à ses habitants : « La vraye richesse d'un Royaume consiste dans l'abondance des Denrées, dont l'usage est si nécessaire au soûtien de la vie des hommes, qu’ils ne sçauroient s’en passer » (Sébastien Le Prestre de Vauban, Projet d’une dixme royale, 1707, p. 77-78).

L'objectif d'une balance commerciale excédentaire fut maintenu, qui pouvait désormais être obtenu grâce à la transformation de biens importés : le principe consistait à importer des matières premières, comme du coton, pour pouvoir exporter des produits transformés, comme du drap. Désormais les mercantilistes prônaient l'interdiction de l'exportation de matières premières brutes pour favoriser le développement d'industries manufacturières exportatrices. De plus, comme l’établissement d’industries manufacturières nécessitait d’importants capitaux, ils recommandaient la suppression des restrictions contre l'usure, mais restaient divisés quant à l’efficacité des monopoles ou  de la mise en place de quotas et de plafonnement des prix. Quels ne sont pas, aujourd’hui, les pays qui restent plus ou moins ouvertement mercantilistes ?

- Les travailleurs devaient être payés au niveau de revenu qui leur permettait de survivre et rien de plus, afin de maximiser les revenus des investisseurs, un principe toujours d'actualité... 

Au nom de cette maximisation, on vit Colbert faire travailler des enfants âgés de six ans dans les manufactures d’État et on obtint au Royaume Uni, même après la période mercantiliste, les Poor Laws, dont la célèbre loi de Speenhamland en vigueur de 1795 à 1834, qui, sous couvert de charité, permettait de rémunérer les travailleurs au-dessous du seuil de survie. Cette loi était destinée à amortir le choc social de l’éviction des paysans de leurs terres afin d’élever les moutons nécessaire à l’industrie du tissage de la laine.

 

Si la théorie mercantiliste s’imposa entre le XVIe et le XVIIe siècle, c’est qu’elle répondait aux besoins des Princes qui gouvernaient des États concurrents, dans le contexte d’enrichissement de l'Europe lié à la découverte de l’Amérique.

 

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M
Le portrait : Colbert ? Attention, s'il a connaissance de ce blog, le CRAN va vouloir te le faire enlever. :)<br /> <br /> On attend la suite de ton papier sur la manière dont les FMN ont imposé le libéralisme.
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A
Le Cran conteste que Colbert soit un mercantiliste ?le papier nécessité en effet une suite<br /> Amitiés