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Le blog d'André Boyer

LA VIOLENCE DE LA SOCIÈTÉ BRITANNIQUE

22 Novembre 2017 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

LA VIOLENCE DE LA SOCIÈTÉ BRITANNIQUE

 

 

En 1815, le Royaume Uni possédait à la fois le pouvoir absolu sur les mers et était devenu l’arbitre de l’Europe. De ce fait, il devint pour l’Europe, voire pour le monde entier, le modèle politique et économique à imiter.

 

Un modèle à imiter ? Le système anglais était au service d’une oligarchie qui combattait sur deux fronts :

  • un front extérieur, où l’industrialisation profitait des ressources procurées par des plantations coloniales soumises à un échange inégal avec la métropole, lui permettant d’exporter notamment des textiles bon marché. Encore que l’industrie exportatrice britannique se heurtait au protectionnisme de pays européens moins compétitifs, du fait de leur retard industriel et de l’absence de colonies, monopolisées par les Anglais. Ces derniers, adossés à leur idéologie libérale ad hoc, souhaitaient étendre le libre échange au plus grand nombre de pays possibles. Ils y parvinrent en 1860 grâce au traité franco-anglais qui ouvrit la voie à d’autres traités au sein de l’Europe et au développement rapide du marché américain.
  • Un front interne, où l’oligarchie britannique, estimant qu’elle était born to rule, mena une répression constante contre les récalcitrants.  En témoignent le massacre de Peterloo à Manchester en 1819, lorsque la cavalerie chargea une manifestation de soixante mille personnes qui demandaient une réforme de la représentation parlementaire, les condamnations à mort des luddites, entre 1812 et 1817, qui étaient des artisans opposés aux manufactures de textiles, la répression de la révolte du Capitaine Swing en 1830, nom mythique d'une révolte d'ouvriers agricoles en Angleterre,  appelée les Swing Riots.

En 1832, la réforme électorale (Reform Act) établit par l’oligarchie un système électoral censitaire au détriment des classes populaires, alors que Le Chartisme, fondé sur une Charte populaire adoptée à l'initiative de l'Association des travailleurs londoniens, réclamait le suffrage universel masculin, un juste découpage des circonscriptions électorales, l'abolition de l'obligation d'être propriétaire pour être éligible, des élections législatives annuelles, le vote à bulletin secret et une indemnité parlementaire. Pour appuyer ces revendications, trois grandes pétitions furent signées en 1838, 1842 et 1848 par des millions de britanniques, mais le Parlement refusa d’en tenir compte. À tous ces refus de réformes,  s’ajoutait la permanence de la répression contre la  rébellion irlandaise, l’Empire et les Etats-Unis servant de soupapes de sureté pour évacuer vers l’extérieur de la métropole les éléments indésirables, que ce soient les condamnés expulsés  de prisons surpeuplées et les pauvres les plus désespérés. Dans la métropole, la mise à l’écart de  « l’armée de réserve » en sous-emploi chronique s’accomplissait par la prison, l’armée de métier et les workhouses

L’institution des workhouses mérite que l’on s’y arrête. Depuis 1597, The Act for the Relief of the Poor de la reine Élisabeth mettait les indigents, les chômeurs, les mendiants et les vagabonds à la charge des paroisses. Or, après 1815, le nombre de pauvres explosa avec l’industrialisation. En 1824, il atteignait un 1,34 million de personnes, soit 8% de la population du Royaume Uni. C’était une situation intolérable pour les classes dirigeantes, non pas parce qu’elles étaient choquées par les conditions de vie des pauvres, mais parce qu’elles trouvaient qu’elles payaient trop d’impôts pour entretenir des « fainéants ». D’où la promulgation d’une  loi punitive envers les pauvres, The Poor Law Amendment Act (1834), qui mit fin à l'assistance à domicile des indigents pour les enfermer dans des workhouses, moins coûteux.

Les indigents y travaillaient 18 heures par jour dans des conditions de vie plus précaires que les ouvriers les plus mal payés, selon le principe de less eligibility qui ne doit pas encourager les « paresseux » à se faire entretenir dans les workhouses. Et en effet, la discipline y était très stricte, les châtiments corporels, la mise au cachot et la privation de nourriture étaient largement pratiquées et en conséquence le taux de suicide y était très élevé. Les familles étaient dispersées et, , les personnes âgées et malades étaient mises à l'écart pour des « raisons d'hygiène », les enfants travaillaient dans des manufactures voisines de la « workhouse », ou, lorsqu’ils étaient trop nombreux, expédiés au Canada ou en Australie. On se rappellera que Charlie Chaplin vécut avec sa mère Hannah et son demi-frère dans la workhouse de Lambeth en 1896 et en 1898, à l'âge de sept ans et neuf ans.

 

Lisez ce que Friedrich Engels écrit en 1844 sur les motifs des auteurs de la loi sur les pauvres de 1834, qui « n'hésitèrent pas un seul instant à jeter les pauvres dans le lit de Procuste de leurs idées et de les y traiter, selon celles-ci, avec la plus révoltante dureté ».

 

Un modèle à imiter, vraiment ?

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