LES RÉACTEURS À NEUTRONS RAPIDES
27 Mai 2018 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE
L’ensemble de ces réacteurs est destiné à être remplacés, dans quelques dizaines d’années, par des réacteurs à neutrons rapides (R.N.R), qui n’ont jusqu’ici été construits que sous forme de prototypes refroidis au sodium.
Ces réacteurs utilisent l'uranium de manière plus complète que les réacteurs pressurisés à eau, grâce à la surgénération. Ils permettront de faire face à la prévisible pénurie de l'uranium, alors que, depuis l’accident nucléaire de Fukushima en 2011, le prix de l’uranium n’a cessé de baisser, empêchant toute nouvelle exploration.
Cependant le développement des capacités de production au niveau mondial n’a jamais été aussi important puisque 59 réacteurs sont en cours de construction dans 14 pays, la construction de 164 réacteurs est planifiée et plus de 350 projets sont actuellement dans les cartons. Les réserves actuelles permettent de répondre à la demande pendant 25 ans, mais si les prix de l’uranium, actuellement de l’ordre de 50 à 70$ le kg pour une demande mondiale d’environ 70000 tonnes, s’accroissent, la recherche reprendra et de nouvelles réserves devraient être mises à jour.
Les réacteurs à neutrons rapides sont conçus pour faire face à la future pénurie d’uranium, en utilisant le plutonium produit par les réacteurs à eau actuels comme matériau fissile et l'uranium appauvri, sous-produit des usines d'enrichissement en uranium 235, comme matériau fertile. On estime que les matières nucléaires produites par le fonctionnement d'un réacteur à eau sur les 60 ans de sa durée de sa vie doivent permettre d'exploiter des réacteurs à neutrons rapides d'une puissance équivalente pendant 5 000 ans !
Les réacteurs à neutrons rapides, qui se distinguent des précédents par l'absence de modérateur, ne fonctionnent qu'avec un combustible dont la teneur en matière fissile est supérieure à 15%. La faiblesse des captures parasites et le meilleur rendement en neutrons du plutonium 239 permettent à ces réacteurs d'être surgénérateurs avec le cycle uranium 238-plutonium 239.
Ainsi, alors que les réacteurs des autres filières ne tirent principalement leur énergie que de l'uranium 235 avec un appoint du plutonium formé in situ, les surgénérateurs, en transformant progressivement avec un meilleur rendement l'uranium 238 en plutonium, sont susceptibles de consommer l'uranium en totalité. Or l'uranium naturel contient 99,2745% d’uranium 238 et 0,720% d’uranium 235 !
Aussi un réacteur à neutrons rapides multiplie t-il le potentiel énergétique de l'uranium, comparé à un réacteur à neutrons thermiques, par un facteur compris entre 50 et 100, selon les effets parasites qu’il subit, ce qui permettrait de couvrir les besoins énergétiques de l’humanité pendant plusieurs siècles.
Si la capacité des réacteurs à neutrons rapides est connue depuis le début de l'époque nucléaire, le développement industriel de ces réacteurs s’est révélé plus complexe que celui des réacteurs à eau. Les États-Unis, l'U.R.S.S, la Grande-Bretagne et la France, suivis par l'Allemagne, le Japon, l'Italie, l'Inde, et plus récemment par la Chine ont chacun tenté de maitriser la technique de ces réacteurs.
Le cas du développement et de l’arrêt de Superphenix en France est révélateur des difficultés non seulement techniques, mais aussi politiques et stratégiques qu’entraine la mise en service d’un réacteur à neutrons rapides.