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Le blog d'André Boyer

CONTRÔLER LES CHINOIS, VASTE PROGRAMME

25 Juillet 2019 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

CONTRÔLER LES CHINOIS, VASTE PROGRAMME

Le peuple chinois est actuellement dirigé par Xi Jinping, un dirigeant qui est fermement opposé aux Droits de l’Homme en tant que valeur universelle et plus concrètement au modèle démocratique occidental.

 

Dans cette logique, il est compréhensible que Xi Ping ait fait abolir la limitation à deux quinquennats qui était imposée jusqu’alors aux Présidents de la République Populaire de Chine, ce qui lui permet de rester Président aussi longtemps qu’il aura la confiance du PCC. 

Mais la Chine reste un pays structurellement instable. Le pacte actuel repose sur une hyper croissance économique, qui, par définition, ne peut pas durer. En dehors de quelques centaines de milliardaires et de quelques dizaines de millions de riches, les bonnes relations entre trois classes sociales chinoises sont fortement liées au taux de croissance : la classe moyenne urbaine qui rassemble 150 à 400 millions de Chinois, les migrants ruraux, 280 millions de personnes qui subissent un apartheid social et 600 millions de paysans qui s’efforcent de survivre dans les campagnes. 

Les tensions qui en résultent s’expriment sur la blogosphère, par conséquent surveillée de près par le pouvoir. C’est pourquoi le China Wide Web a été construit comme un intranet, ce qui lui permet de s’isoler du reste du monde ou de couper l’accès à une partie du territoire en cas de problèmes. De nombreux sites occidentaux ont été ainsi rendus inaccessibles, comme Facebook ou Google. Quant aux internautes chinois récalcitrants, ils sont repérés par des délateurs qui y sont fortement incités par des primes importantes. 

Le choix du libéralisme économique est au cœur des problèmes de contrôle de la société chinoise par le pouvoir. Ce libéralisme économique a donné des espaces d’action à la classe moyenne, comme la possibilité de créer son entreprise, de choisir son emploi, d’étudier et de faire des affaires ou du tourisme à l’étranger. 

C’est une grande différence avec le hukou, ce document d’enregistrement qui liait chaque chinois à une unité de travail et qui lui permettait de recevoir un logement, d'avoir accès aux soins de santé et à l’école. Mais le hukou est aujourd’hui en voie de disparition et les agents chargés de l'encadrer sont de moins en moins efficaces. Il faut donc trouver des solutions de remplacement pour surveiller la population, à l’aide des nouvelles technologies. 

Les autorités chinoises s’y emploient activement. Il paraît que l’on trouve désormais 270 millions de caméras en Chine, soit une pour cinq habitants, situées plus particulièrement dans les gares, les aéroports, les transports en commun, les rues, les parcs, les universités, les hôpitaux, mais aussi dans toutes les entreprises. Les projets Skynet et Sharp Eyes, initiés par le Ministère de la Sécurité Publique, ont respectivement pour objectif de reconnaître n’importe qui, n’importe où en Chine, et d’utiliser les objets connectés, comme les smartphones ou les télévisions, pour observer les habitants, chinois ou étrangers. Des centaines de start-ups développent toutes sortes d’objets connectés qui sont autant de capteurs de données personnelles permettant de contrôler la société. Aujourd’hui, quatre cent millions de personnes, un tiers de la population, sont déjà répertoriées dans des banques de données qui permettent de les identifier en trois secondes à l’aide des caméras. 

Les initiatives se multiplient pour développer la surveillance des habitants: dans cinq provinces, la police utilise des drones camouflés en oiseaux pour suivre des suspects ; une entreprise de nettoyage de Nankin suit en temps réel les déplacements de ses employés grâce à des traceurs GPS ; les ouvriers de la manufacture Chongheng Electric de Hangzhou revêtent pour travailler un corset et un casque qui captent les ondes de leur cerveau et leur corps, afin de connaitre leurs émotions; une application de WeChat sait géolocaliser les personnes endettées qui sont signalées dans votre smartphone qui se met à clignoter, avec le nom et le numéro de carte d’identité de la personne endettée dès que la personne endettée s’approche de vous. 

Le pouvoir chinois cherche ainsi, par tous les moyens techniques dont il dispose, à organiser un système de contrôle social adapté aux évolutions rapides qui caractérisent le pays. L’idée de doter chaque personne ou entreprise présentes en Chine, quelle que soit leur nationalité, d’un crédit social est l’une des pierres angulaires de ce projet de contrôle. 

Depuis 2014, soixante-dix projets pilotes ont été lancés jusqu'à ce que soit retenu le modèle de la ville de Rongcheng, qui devrait être généralisé très prochainement, à partir de janvier 2020. Chacun se verra doté de bonus et de malus en fonction de critères définis au niveau local et national. Pour rendre effectif le crédit social universel, au niveau de la Chine, tous les acteurs du numérique, depuis les plateformes de commerce en ligne jusqu’aux réseaux sociaux, ont l’obligation de transférer aux agences étatiques les métadonnées qu'ils ont accumulées. Le Ministère de la Sécurité Publique y ajoute les données biométriques de chaque citoyen chinois. 

La notation n’est pas encore généralisée, mais déjà dans les zones où elle est expérimentée, six millions de personnes se sont retrouvées interdites de prendre l’avion en raison de leurs « méfaits sociaux », et ce n’est évidemment que le début des listes noires que va probablement générer le système des crédits sociaux. 

Avec ce crédit social, on peut dénoncer l’apparition d’un monstrueux Big Brother, mais le pays a toujours eu une tradition de contrôle social étroit, comme en témoigne le hukou, qui est un système bien plus contraignant que le crédit social. 

En France, ce système est inimaginable, pour le moment. Encore que l'on a mis en place depuis plusieurs années, à l'aide du couple radar-ordinateur, un système qui aboutit à priver de permis de conduire cent mille personnes tous les ans, un système qui pourrait être appliqué à d'autres dérives que la conduite automobile, à partir des données accumulées de toutes parts.  

 

Je n’ose imaginer quels moyens mettrait en oeuvre la République Française, si elle devait gérer un milliard trois cent millions d'habitants...

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M
Brave New World
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A
Exactly