CONTRE COVID-19, UNE GUERRE SANS CHEF ET SANS ARMES
La France ne réagit pas du tout par la fermeture des frontières à la diffusion de la pandémie du Covid-19. On pouvait pourtant supposer qu’elle s’y était préparée, puisque les autorités avaient eu le temps d’évaluer le risque qu’elle pouvait faire courir à la France avant qu’elle ne l’atteigne et mis en place les moyens nécessaires pour y faire face.
Il faut convenir que l’OMS, sous la forte pression de la Chine, a fait tout, au début, pour empêcher une réaction mondiale contre la pandémie. Le 23 janvier, l'OMS jugeait qu'il était prématuré de déclarer l'urgence de santé publique de portée internationale, une position qu’elle confirmait le 28 janvier.
Le 30 janvier, l'OMS décidait enfin de déclarer l'état d'urgence de santé publique de portée internationale, tout en ne recommandant toujours pas de limiter les voyages et les échanges internationaux. Il faudra attendre le 11 mars pour que l’épidémie sera qualifiée de pandémie par l’OMS.
Cette position de l’OMS semblait convenir à La France, qui freinait des quatre fers avant de prendre des mesures de protection pour sa population.
Pourtant dès le 22 janvier, le monde entier connaissait la dangerosité de l’épidémie dans la province de Hubei et les mesures de confinement prises par le gouvernement chinois.
Pourtant, le 31 janvier, la France rapatriait dans l'Oise 193 ressortissants français de Wuhan, qui deviendra du coup le premier foyer de Covod-19, puis effectuait deux autres rapatriements, les 2 et 9 février. C’était donc que la situation en Chine était jugée sérieuse par les autorités françaises.
Pourtant de nombreux pays prenaient des mesures de précautions :
- Le 30 janvier, le gouvernement russe fermait sa frontière terrestre avec la Chine. Le même jour, après avoir recensé deux cas sur son territoire, l'Italie décrétait l'état d'urgence pour six mois et suspendait les vols la reliant à la Chine.
- Dès le 31 janvier, l'Arménie, l'Australie, l'Inde, l'Irak, l'Indonésie, le Kazakhstan, le Koweït, la Malaisie, les Maldives, la Mongolie, la Nouvelle-Zélande, les Philippines, Singapour, le Sri Lanka, Taïwan, le Viêt-Nam et les États-Unis interdisaient l’entrée de leurs pays aux Chinois ou à toute personne ayant récemment voyagé en Chine.
- Le 10 février, plus fort encore, les pays de l’espace Schengen, à l’exception de la France, suspendaient temporairement la délivrance de visas chinois.
Il y a donc un point de vue français sur la crise. Il semblerait que dans un premier temps, il ait été fondé sur la conviction, pour ne pas écrire la croyance, que le virus n’allait pas atteindre sérieusement le territoire français, pour concerner seulement quelques cas dans quelques régions spécifiques qui seraient vite circonscrits. Cela rappelle un peu l’attitude d’un autre gouvernement français face à Tchernobyl ou des dispositions prises pendant la drôle de guerre en 1940.
Cette conviction conduisit le gouvernement français à autoriser, aussi tard que le 26 février, le match de football OL-Turin à Lyon en présence de 3000 supporters italiens, alors que la situation sanitaire était déjà grave en Lombardie. Lorsque certains s’en inquiétèrent, la préfecture du Rhône répondit que « les éléments médicaux et sanitaires ne justifiaient pas de prendre de mesures particulières. »
Le 6 mars encore, Emmanuel Macron et son épouse Brigitte assistaient ostensiblement à une représentation de la pièce Par le bout du Nez au Théâtre Antoine à Paris, avec pour objectif d’inciter les Français à ne pas rester cloitrés chez eux.
Puis, six jours plus tard, le 12 mars, Le président français, tout en persistant dans sa volonté d’éviter "l’écueil du repli nationaliste ", croyait nécessaire de souligner que « ce virus n'avait pas de passeport » mais reconnaissait que la France traversait sa « plus grave crise sanitaire » depuis un siècle. Il est vrai que, ce jour-là, on comptait 2 876 personnes infectées et 61 morts. Puis il annonçait la fermeture des crèches, des écoles, des collèges, des lycées et des universités à partir du lundi 16 mars.
En moins de cinq jours, l’ensemble des Français allait directement passer de l’insouciance au confinement…
Rappelons encore que le 14 mars à 19 h 30, le Premier ministre, manifestement dans l’urgence, prononçait la fermeture le soir même, à minuit, de tous les lieux recevant du public : restaurants, cafés, cinémas, discothèques. Du jamais vu en matière de précipitation, au point que cette décision brutale n’était même pas coordonnée avec les élections municipales du 15 mars, qui étaient maintenues.
Enfin le lundi 16 mars, dans une nouvelle allocution, le Président de la République rendait publique la décision de confiner dans leurs domiciles tous les Français à compter du mardi 17 mars 2020 à 12 heures, pour quinze jours renouvelables, en ayant le droit, à titre dérogatoire, de n'en sortir que dans quelques cas bien spécifiés.
La France s’arrêtait alors en quelques heures, tournait ses regards vers les hôpitaux et découvrait effarée que ces derniers manquaient de lits, d’appareils de réanimation, de respirateurs, de tests de dépistage, de gel hydro alcoolique, de blouses, de masques, de tout en somme et qu’il fallait les commander derechef en Chine faute de disposer d’usines pour les fabriquer, même le paracétamol, et qu’il fallait se battre comme des chiffonniers avec les étasuniens dans des aéroports chinois pour ramener les produits à la maison.
On se hâta donc de leur expliquer qu’il était normal que rien n’ait été prévu puisqu’une telle crise était imprévisible par nature, et que tous les autres pays étaient logés à la même enseigne.
Pourtant, s’il était vrai que les États-Unis s’enfonçaient dans une crise pire encore que la nôtre après avoir mis les mêmes œillères, il leur suffisait de tourner leurs regards vers leur voisin allemand, qui, lui, était nettement moins impacté par le COVID-19 que la France. Si, à ce jour le 4 avril, la France compte 6507 morts et l’Allemagne, plus peuplée et plus âgée, seulement 1330 morts, cela n’est probablement pas sans rapport avec les 25 000 lits de soins intensifs avec assistance respiratoire dont disposait l’Allemagne avant la crise comparativement aux 5000 lits français et la rapidité avec laquelle l’Allemagne a accru le nombre de ces tests jusqu’à 50000 par jour alors que la France en pratique 10000 par jour.
Heureusement, l’Université française écrasait tous ses concurrents grâce à l'excellent spectacle qu’elle a eu l’idée d’offrir aux supporters frustrés du traditionnel OM/PSG, avec un magnifique match entre le professeur Raoult et ses bons collègues de l’INSERM.
En dehors de cette remarquable improvisation, tout montre que la France n’était pas préparée du tout à cette guerre qu’elle doit livrer sans moyens. Aujourd’hui, le poids du combat repose tout entier sur le courage anonyme de troupes, aujourd’hui applaudies, hier méprisées par celui-là même qui les a appelées au combat.
À SUIVRE : UN HORIZON FUMEUX