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Le blog d'André Boyer

LE SABORDAGE DE MARCOM

5 Août 2021 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

POUR SORTIR DE CE CLOAQUE, UNE PEINTURE DE VALERI TSENOV

POUR SORTIR DE CE CLOAQUE, UNE PEINTURE DE VALERI TSENOV

L’affaire de Mihaïlovgrad constituait un avertissement sérieux, qui indiquait que la direction bulgare avait une vision différente de la nôtre quant aux objectifs de Marcom.

 

Il aurait fallu, après la découverte de ce qui apparaissait à la partie française comme un abus de bien social, convoquer une assemblée extraordinaire pour demander un changement de politique ou un changement de direction. Nous ne l’avons pas fait, par négligence ou par paresse et j’en porte une partie de la responsabilité. Sans doute mon énergie était-elle plutôt mobilisée par la prise en main de l’IECS Strasbourg dont je venais d’être nommé directeur, plutôt que par la gestion stratégique de Marcom.

Bien entendu, le Directeur de Marcom, Branimir Botev  a en conclu qu’il avait les mains libres, même si Paul Fourquet, le directeur adjoint, lui signifiait de plus en plus ouvertement son désaccord avec la politique qu’il menait.

L’incroyable intervint au début de 1992. La FNEGE m’avertit que Paul Fourquet portait officiellement de graves accusations contre  Branimir Botev. Le C.A. de Marcom avait autorisé le Directeur et son Adjoint à embaucher quatre nouvelles secrétaires. Or ces dernières non seulement avaient été recrutées sans l’assentiment du Directeur Adjoint, mais ce dernier prétendait en outre qu’il ne s’agissait nullement d’un recrutement de secrétaires mais de prostituées !

Paul Fourquet avait des preuves qu’il nous envoya et nous fîmes notre enquête auprès de l’Ambassade, dotée de ses propres moyens d’information, qui nous confirma le caractère suspect de ce recrutement.

Il n’était évidemment pas question pour la partie française de Marcom, qui comprenait le Ministère des Affaires Étrangères, la FNEGE, notre représentant au sein de l’école, Paul Fourquet et moi-même en tant que chargé de mission, d’accepter de couvrir, si peu que ce soit, le comportement de Branimir Botev qui revenait à transformer Marcom en maison de passe potentielle !

J’imagine que vous pouvez juger cette situation comme invraisemblable ou que le qualificatif de « prostituées » pour ces quatre recrues de Marcom était exagéré. Pourtant toutes les informations que nous avions pu recueillir convergeaient vers le constat de Paul Fourquet.

Nous avons donc décidé de convoquer un C.A. exceptionnel en respectant les délais de convocation. Il nous fallu environ un mois pour réunir à Paris, en février ou mars 1992 les représentants bulgares et français du C.A., sans la présence de Botev et de Fourquet. Le C.A. me donna plein pouvoir pour compléter l’enquête sur place, pour rencontrer toutes les parties concernées et pour leur signifier, si les faits étaient confirmés, l’intention du C.A. de licencier dès que possible Branimir Botev et de le remplacer.

Je me rendis donc rapidement à Sofia, en mars ou avril 1992, où je trouvais une atmosphère explosive. Paul Fourquet vint me chercher à l’aéroport et il était, on s’en doute, dans tous ses états. Nous nous sommes rendus à Marcom où nous avons retrouvé Botev, que les accusations qui pesaient contre lui avait rendu muet. Nous avons rendu visite au Ministère de l’Education Nationale, qui nous a semblé tacitement favorable au maintien de Botev à la direction de Marcom.

La rencontre avec le Conseiller Culturel, loin de clarifier la situation, s’est révélée déroutante. Nous sommes passés d’une affaire de morale à la basse politique. Ce fonctionnaire m’a fait savoir qu’il était hors de question de licencier Botev dans la mesure où «  ce n’était pas à moi de faire la politique étrangère de la France en Bulgarie ». J’ai compris à demi-mots que Botev avait des liens particuliers avec l’Ambassade de France et j’appris plus clairement qu’il avait de hautes responsabilités au sein du Parti Communiste Bulgare.

Je n’étais pas venu à Sofia pour participer à des compromissions politico-diplomatiques. Je lui ai donc répondu que, contrairement à ses vœux, j’étais bien en charge de la politique étrangère de la France au sein de Marcom, que je recommanderai le licenciement de Botev et que je le ferai savoir à l’intéressé avant mon retour en France.  

De fait, deux jours à Sofia dans une ambiance à couper au couteau m’ont suffi pour me faire une opinion et pour trancher. Botev a dû quitter la direction, mais Fourquet, désormais persona non grata à l’Ambassade qui lui reprochait d’avoir parlé, rentra rapidement en France. Un nouveau directeur de Marcom fut nommé, mais toute cette agitation s’est révélée négative pour Marcom, qui, n’ayant plus le soutien du gouvernement bulgare ni celui de l’ambassade de France, ferma ses portes au bout d’une ou de deux années. 

 

Notant que cette affaire n’avait pas empêché Branimir Botev de devenir plus tard Vice-Ministre de l’Économie et de l’Énergie en Bulgarie, j’ai tiré de cet échec plusieurs leçons relatives au pouvoir, au management et à mes  principes personnels…

 

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R
"cette affaire n’avait pas empêché Branimir Botev de devenir plus tard Vice-Ministre de l’Économie et de l’Énergie en Bulgarie" <br /> doit on en conclure que sans son licenciement il ne le serait pas devenus ?
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A
Non, il le serait devenu de toutes façons, car c’est ( ou c’était) un personnage qui avait des relations haut placées <br /> Cordialement <br /> André Boyer