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Le blog d'André Boyer

NOTRE AMIE, L'ALLEMAGNE

22 Octobre 2021 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

NOTRE AMIE, L'ALLEMAGNE

Dans quelques semaines, le nouveau gouvernement allemand va être constitué, composé de socio-démocrates, d’écologistes et de centristes. Nous n’en attendons rien de particulier, si ce n’est la pression qu’il va accroitre pour que nous réduisions notre parc de centrales nucléaires à néant.

 

Cette question de divergence des sources d’énergie entre l’Allemagne et la France n’est ni nouvelle, ni mineure, car elle révèle des différences d’intérêt profondes qui tiennent à la géographie et l’histoire.

Les deux pays sont voisins, hélas. Hélas car ce voisinage n’a pas été heureux dans le passé. La France s’est quelque-temps opposée à l’Espagne, s’est longtemps mêlée des affaires italiennes, mais elle a presque toujours subi l’ingérence anglaise et fait face à la concurrence allemande, l’un des deux grands tracas français. Sous cet angle, la capitulation mitterrandienne vis-à-vis de la  réunification de l’Allemagne après la chute du Mur de Berlin, nous a ramené au cauchemar qui hantait la France depuis Richelieu, une Allemagne plus forte que la France.

Les institutions européennes permettent de cacher la confrontation à défaut  de l’amortir, mais l’on peut craindre que le silence qui entoure la divergence des intérêts entre les deux pays ait pour effet d’anesthésier la capacité de résistance française contre l’activisme allemand traditionnel. Il est donc utile, avant de rechercher des terrains d’entente, de regarder en face la nature et l’importance des divergences.

Vu d’Allemagne, ce pays avec ses 83 millions d’habitants sur 357 000 km2 et ses 3 600 kms de frontières terrestres avec neuf pays différents, se voit comme le cœur de l’Europe. Son imbrication avec la France est immémoriale,  assumée récemment par le traité de l’Élysée, signé par de Gaulle et Adenauer en 1963, qui a institué un rapprochement institutionnel entre les deux pays.

Il reste que l’Allemagne regarde ses rapports avec la France, à commencer par son partenariat économique, avec un légitime sentiment de supériorité. La France dépend davantage de l’Allemagne que l’Allemagne ne dépend de la France qui n’est que le quatrième partenaire commercial de l’Allemagne alors que cette dernière est le premier partenaire commercial de la France. Cette supériorité  la pousse à regarder avec condescendance le partenaire français, facilement taxé d’irrationalisme lorsqu’il ne s’aligne pas sur les standards allemands, incompréhension renforcée par l’incapacité habituelle de ses dirigeants à parler, et donc à penser, français.

Symétriquement, le regard de la France sur l’Allemagne est empreint de la fascination du faible pour le fort. La France s’accroche à l’illusion du couple franco-allemand, alors que, dès 1963, De Gaulle avait compris que l’Allemagne ferait toujours passer son engagement au sein de l’Otan avant l’alliance française et, plus récemment, elle n’a fourni qu’un soutien dérisoire à l’opération française au Mali qui a pourtant renforcé la sécurité européenne, pas plus qu’elle n’a soutenu Paris face à Erdogan.

En outre la réunification a fait basculer le centre de gravité de l’Allemagne vers l’est. Symboliquement, Bonn, l’ancienne capitale de la RFA, n’était qu’à 250 kilomètres de Strasbourg tandis que Berlin se situe à quelques dizaines de kilomètres de la frontière polonaise. Ce nouveau centre de gravité a conduit à la constitution d’un hinterland en Europe centrale où l’Allemagne fait fabriquer à bas prix les composants qu’elle utilise pour son industrie. Cela lui permet également d’organiser un puissant dumping social dans le secteur agricole grâce à la venue massive de travailleurs détachés issus d’Europe de l’Est, ce qui met en difficulté les agriculteurs français.

Impuissante, la France ne peut que constater la volonté ancienne et la capacité récente de l’Allemagne à mener une politique étroitement conforme à ses intérêts, du fait de sa nouvelle puissance issue de la réunification (merci du cadeau, Mitterrand) et de l’entrée des pays de l’Est dans l’UE. L’Allemagne a ainsi saboté l’Union pour la Méditerranée. Elle a aussi empêché le rapprochement entre EADS et l’industrie de défense britannique, avec pour projet constant de tuer l’industrie de défense française, rivale des entreprises allemandes et de neutraliser son  aérospatiale civile.

Au plan stratégique, on peut qu’observer que, pour baisser ses coûts salariaux et améliorer ses équilibres démographiques, l’Allemagne a accueilli unilatéralement un million de migrants en 2015 sans consulter ses partenaires de Schengen.

Au plan monétaire, on peut également constater que l’Allemagne profite de l’euro pour obtenir un énorme excédent commercial, compris entre 7% et 9 % de son PIB, tout en nous interdisant de dévaluer pour faire baisser notre coût du travail. C’est ainsi que le déficit de la France avec l’Allemagne représente chaque année environ un tiers du déficit commercial français total. Que, pour maintenir son excédent, l’Allemagne est fondamentalement opposée à tout protectionnisme européen, même s’il est contraire aux intérêts de la plupart de ses partenaires européens.

Mais le plus grave, à long terme, reste sans doute que Berlin ait renoncé en 2011 à l’énergie nucléaire sans consulter ses partenaires européens et sans tenir compte de l’accroissement des émissions de CO2 que cette décision a provoqué, puisque les centrales nucléaires émettent en moyenne quatre-vingt fois moins de CO2 par kilowattheure produit que les centrales à charbon et quarante-cinq fois moins que les centrales à gaz. C’est pourquoi, en décidant d’abandonner le nucléaire pour le charbon, Angela Merkel a fait exploser la pollution émise par l’Allemagne au détriment de la qualité de l’air, produisant plus du double de CO2 par rapport à la France.

Alors que, traitreusement, l’Allemagne s’active afin que le nucléaire ne soit pas considéré  comme une énergie renouvelable par l’UE,  la France devrait à l’inverse exiger de nos « amis » allemands qu’ils réduisent leurs émissions de CO2 au même niveau par habitant que celui de la France.

 

Ce serait un bon début pour remettre au clair la nature de nos relations profondes avec l’Allemagne…

 

 

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