LE PRIX DU GAZ ASPHYXIE EDF
3 Février 2022 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ
Si les prix de l’énergie ont monté en Europe, cela s’explique par un triple effet conjoncturel, la réouverture des économies après les fermetures imposées par l'épidémie de coronavirus qui ont fait bondir les prix du pétrole, du gaz et corrélativement de l'électricité, la traditionnelle montée de la consommation d’énergie en hiver et, plus particulièrement en Europe ainsi qu’une série d’évènements accidentels qui ont réduit l’offre.
Que s’est-il passé fin décembre 2021 ? Le gaz européen de référence a bondi au-dessus de 180 euros le mégawattheure le 21 décembre, contre 20 euros environ au début de l’année.
On nous explique que cette tension sur le prix du gaz en Europe résulte de flux de gaz norvégiens inférieurs à la moyenne en raison de travaux de maintenance de ses champs géants et de la limitation des approvisionnements en provenance de la Russie qui reconstitue ses propres stocks. Face à cette pénurie de gaz, la Russie affirme qu’elle est en mesure d’exporter à l’avenir des volumes record de gaz vers l'Europe.
En attendant, en janvier 2022, les stocks de gaz en Europe ont été les plus bas jamais enregistrés pour cette période de l'année, alors que la Chine, qui est de loin le plus grand consommateur d'énergie du monde, ordonnait aux entreprises publiques de sécuriser leurs approvisionnements à tout prix.
Les fournisseurs européens de gaz ont dû acheter plus cher les cargaisons de gaz liquéfié pour les empêcher de partir en Asie, tandis que l’on s’inquiétait des retards dans la certification du gazoduc Nord Stream 2 joignant la Russie et l’Allemagne sous la mer Baltique et des risques stratégiques autour de la crise ukrainienne.
Or, comme les centrales au charbon avaient été fermées pour cause de pollution, il ne restait plus en Europe, et surtout en Allemagne et en Europe du Nord, que le gaz et les énergies renouvelables pour produire de l’électricité, en dehors des centrales nucléaires. Le prix européen de l’électricité était donc à la merci du prix du gaz, comme il pourra l’être demain de l’intensité du vent.
C’est alors que le gouvernement français, qui s’était placé lui-même dans la situation de faire dépendre le prix de l’électricité en France du marché énergétique européen, s’est affolé. Il craint les répercussions économiques, sociales et politiques d’une hausse brutale du prix du gaz et de l’électricité et pour y faire face à court terme, il a demandé à EDF de vendre davantage d’électricité à bas prix à ses concurrents afin de limiter la hausse du prix de vente de l’électricité à 4% en 2022.
Pourquoi cette obligation d’EDF ? Parce que, depuis l'ouverture du marché de l'électricité, EDF doit vendre une partie de son électricité aux autres fournisseurs à un prix fixé à 42 euros le megawatt-heure. Cette quantité d'électricité à prix fixe est limitée à 100 TWh (Térawattheures), ce qui oblige aujourd’hui ces fournisseurs à aller acheter l'électricité supplémentaire sur le marché européen à un prix qui est de 250 euros le megawatt-heure, alors qu’auparavant ils l’achetaient au-dessous du prix de 42 euros le megawatt-heure qui était offert par EDF.
Or les prix flambent depuis plusieurs semaines, risquant de faire disparaitre les concurrents d’EDF et pour les sauver autant que pour limiter la hausse des prix de l’électricité aux consommateurs, l'Etat a contraint EDF à vendre 20% d’électricité en plus à prix cassés, ventes qui porteront désormais sur 120 TWh au lieu de 100 TWh, en vertu du mécanisme appelé ARENH (Accés régulé à l'électricité nucléaire historique), soit plus du tiers de la production française d'EDF.
Bien sûr, cela va couter en 2022 à EDF 6 à 7 milliards d’Euros, ce qui sera autant de moins disponible pour ses investissements, que ce soit dans les énergies renouvelables ou dans le nucléaire, d’où les protestations bien compréhensibles de son personnel unanime.
Mais quelle est la logique de ce mécanisme ARENH qui oblige EDF à vendre de l’électricité à bas prix à ses concurrents ?
À SUIVRE