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Le blog d'André Boyer

LA TROISIÈME NEIGE

5 Juin 2022 , Rédigé par André Boyer Publié dans #CULTURE

LA TROISIÈME NEIGE

LA TROISIÈME NEIGE

 

Après Les Douze d'Alexandre Blok et Le pays des Canailles de Sergueï Aleksandrovitch Essenine contemporains de la Révolution russe de 1917, voici La Troisième Neige d'Evgueni Evtouchenko qui annonce le changement après la mort de Staline

 

Le texte entier porte un regard, celui d'un "nous" indéterminé, autour d'une attente de la "neige", la vraie, la pure, qui ne fond pas. Les hommes de la ville, inquiets, attendent la neige qui tombera par trois fois avant d'arriver enfin, "pure, immense, toute de simplicité, épaisse avec assurance, poudreuse avec timidité". La troisième neige, les hommes ne l'attendaient pas, mais elle est pourtant là au moment même où ils désespéraient de la voir tomber:

"pas encore de neige!

il est temps,

grand temps qu'elle vienne"

Or la neige tomba,

tomba le soir venu

(...)

Elle se répandait fragile

et pas très sûre d'elle-même

(...)

Cette première neige n'était que

l'annonce d'une autre couche de neige

Elle vint ?

Elle se rua.

Ses bourrasques nous aveuglaient,

ses hurlements n'arrêtaient pas.

(...)

Mais cette deuxième neige ne sut

résister aux pas des hommes.

(...)

Un beau matin,

mal réveillés,

Le seuil de la

porte franchi,

sans savoir  

qu'elle était

tombée,

nous avons foulé son tapis.

Elle reposait,

pure, immense,

toute de

simplicité,

épaisse avec assurance,

poudreuse avec timidité

(...)

C'était elle,

c'était la vraie neige.

Nous l'attendions.

Elle était là*

 

Evgueni Evtouchenko est né en 1933 près d'Irkoutsk, en Sibérie Orientale, et mort à Tulsa, en Oklahoma, en 2017. Il a écrit La Troisième Neige à 20 ans. L'attente de cette troisième neige, qui finit par advenir, exprime l'espoir de changement qui habite les Soviétiques, une fois Staline mort. Le succès de ce poème est sans doute plus politique que poétique, encore que la métonymie et l'ellipse rendent bien la tension dramatique de l'attente.

L'hermétisme du poème permet en outre plusieurs lectures. Le "nous" n'est pas désigné, il montre que le poète est attiré par l'âme inquiète, contradictoire voire superficielle, impatiente, avide de changement des hommes. Ce "nous" désigne aussi le peuple soviétique qui vient à peine de sortir de vingt années de souffrances terribles et dont l'auteur crie la soif de changement, qui est soif de pureté et de vérité.

 

Aussi, des dizaines de milliers de jeunes venaient écouter Evgueni Evtouchenko, qui devint ainsi la voix de sa génération, car l'on a vu et l'on voit toujours dans Evtouchenko le premier poète qui a eu le courage de parler, après vingt années de mensonge et de flagornerie.  

 

* Adaptation française de P. Chaulot, Julliard, 1963.

 

À SUIVRE

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