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Le blog d'André Boyer

TRANCHER LE NOEUD GORDIEN

6 Avril 2023 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

Alexandre tranche le noeud gordien

Alexandre tranche le noeud gordien

La force de m’arracher à l’IECS. J'en ressentais les conséquences affectives, puisque j’étais aussi attaché à son équipe qu’une bonne partie de cette dernière l’était à ma direction.

 

En outre, l’aspect matériel ne m’était pas indifférent. J’avais un salaire de directeur en sus de celui de professeur que j’exerçais toujours. Démissionner, c’était réduire mon salaire de plus de la moitié. Il s’y ajoutait des avantages non négligeables, un bureau de 40 m2 contre un bureau de 7 m2 qui m’attendait, deux secrétaires contre aucune, des crédits de déplacement illimités contre de chiches allocations à marchander avec mes collègues, en d’autres termes les avantages du pouvoir à abandonner.

Mais ce n'était pas nouveau, puisque lors de mes deux précédentes démissions, celle de la Mobil et de la direction du CEPUN, je m'étais déjà résolu à une amputation comparable de salaire et de statut, comme prix consenti de la liberté et du renouveau.

D'un autre côté, comme je l'ai exposé dans mon billet précédent, à cette époque de ma vie, je privilégiais la fonction de professeur que j'aspirais à retrouver pleinement, sur celle de directeur. En outre, j'avais un projet qui me taraudait depuis longtemps, celui d’organiser la création d'une formation à la gestion en Indonésie, puis en Inde et enfin au Brésil, avec toujours l'idée directrice d'offrir à la France et à ses entreprises des cadres francophones et francophiles dans chacun de ces grands pays en cours de développement rapide. Si je gardais la direction de l'IECS, je ne trouverais ni le temps, ni plus fondamentalement l'énergie, pour réaliser ces projets que je chérissais.

Dans le fond de mon cœur, je savais bien que je ne pourrais pas me résigner longtemps au statu quo. Il me fallait décider à bouger, en trouvant un point d'appui psychologique.

Un psychiatre m'y aida, malgré lui.

Ce devait être au mois de mars 1995, je me sentais plutôt mal, anxieux, hésitant, taciturne. Un ami me donna le nom d'un psychiatre dont le cabinet était proche de l'IECS. J'y allais deux fois, durant des après-midis gris, bien en harmonie avec mon humeur. Il en allait de même pour le psychiatre, gris aussi, petit, grognon.

Naturellement, il me fit parler et en particulier de mon adolescence et nous en vînmes à mes déplacements bimensuels entre Nice, où se trouvait mon lycée et Puget-Théniers, résidence de mes parents. Je racontais tout le mal que je pensais du déplacement dans un autocar orange dans lequel flottait une odeur tenace de vomi. Il en déduisit audacieusement que j'exprimais ainsi ma réticence à rejoindre Puget-Théniers, donc ma mère que je ne supportais pas, d'après lui.

Ces déductions me parurent aussi péremptoires que déplacées. Quand il mit fin à la deuxième séance, je lui indiquais in petto qu'elle serait la dernière car il m'était antipathique. Je revins en colère à l'IECS, une colère qui se retourna rapidement contre moi-même : étais-je tombé si bas qu'il fallait que je m'impose une psychothérapie aussi fumeuse ? J'en concluais que je me mettais en danger en acceptant de vivre dans un état psychique aussi précaire et qu'il était grand temps de partir. Ainsi, grâce à ce psychiatre avec qui le dialogue m'avait paru si pitoyable, j'avais tranché en quelques dizaines de minutes le nœud gordien qui m'obsédait depuis si longtemps.

Dès le lendemain, j'informais mes proches de ma décision, cette fois-ci irrévocable et proche. Dans mon esprit, elle devint rapidement une question de survie, comme je l'avais ressenti quelques fois dans ma vie, la marquant telles des bornes d'orientation qui m'avaient fait prendre le bon chemin par un sursaut vital instinctif, quoique longuement ruminé.

Je venais de trancher le nœud gordien, une résolution à laquelle il faut se convaincre sans fébrilité et en s'appuyant sur une détermination profonde, car cela allait tanguer, dans l'IECS, à l'IAE de Nice où j'allais revenir, chez mes proches bien sûr et dans ma tête surtout.  

 

Car il restait à régler les détails, à savoir la date de la mise en œuvre de ma décision, donc la procédure du passage de témoin, et surtout le nom de mon successeur.

Je ne fus pas déçu, ce fut homérique.

 

À SUIVRE 

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