Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog d'André Boyer

LA GUILLOTINE ET LA FAIM

18 Août 2023 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

LA GUILLOTINE ET LA FAIM

La « loi des suspects » permettait aux comités révolutionnaires de surveillance d’arrêter qui bon lui semblait. 

 

Jugez-en, puisque cette loi proclamait qu’étaient déclarés suspects :

« Ceux qui par leur conduite, leurs relations, leurs propos ou leurs écrits se sont montrés partisans de la tyrannie, du fédéralisme et ennemis de la liberté ;

« Ceux qui ne pourront justifier de leurs moyens d'existence et de l'acquit de leurs devoirs civiques ;

« Ceux qui n'auront pu obtenir de certificat de civisme ;

« Les ci-devant nobles qui n'ont pas constamment manifesté leur attachement à la Révolution,

« Les émigrés, même s'ils sont rentrés,

« Les prévenus de délits, même acquittés… »

Depuis « l’inauguration » de la guillotine sur un voleur de grand chemin, Nicolas-Jacques Pelletier, le 25 avril 1792, la première utilisation politique de la guillotine concernera l’exécution de Laporte, le 23 août 1792. Puis le nombre d’exécutions s’accrut régulièrement pour atteindre trente par jour à Paris après la loi sur le tribunal révolutionnaire du 10 juin 1794.

On procéda notamment à l’exécution de Marie-Antoinette le 15 octobre 1793 après un procès odieux où Hébert essaya de l’accuser de crimes sexuels sur son fils, et à celle de Philippe Égalité le 6 novembre 1793, bien mal récompensé de son zèle révolutionnaire.

La guillotine, présentée à l’Assemblée Constituante le 28 novembre 1789 par le docteur Joseph Guillotin, avait été conçue par le chirurgien Antoine Louis, lui-même inspiré d’un dispositif utilisé en Italie et perfectionné par un mécanicien allemand, Tobias Schmidt, qui inventa le couperet en forme de trapèze. Elle avait pour but d’assurer une mort immédiate et sans souffrance, une invention humanitaire en somme. Le docteur Guillotin y voyait, pour se situer dans l’air du temps, un moyen d’introduire l'égalité de tous les citoyens face à la peine capitale.

Le 3 juin 1791, l'Assemblée constituante édicta que « tout condamné à mort aura la tête tranchée », mais les députés eurent tout d’abord à repousser une proposition de loi abolissant la peine de mort, émanant de Robespierre !

De septembre 1793 à juillet 1794, environ cinquante guillotines furent installées en France, fonctionnant jusqu'à 6 heures par jour à Paris. On estime que soixante-deux mille personnes furent guillotinées pendant cette période de neuf mois.

C’était donc la Terreur, mais pour quoi faire ? Ce n’était pas pour le bien du peuple en tout cas, car la misère s’accroissait. La Convention ne pouvait ni l’ignorer ni la réduire, et sa réponse administrative la conduisit à sa perte.

En février 1793, elle répondit aux affamés qu’il fallait qu’ils se contentent de l’égalité pour nourriture : « La ruine du despotisme, le règne de l'égalité, le triomphe des principes de l'éternelle justice reconnus, voilà une partie de nos dédommagements »

Trois mois plus tard, sous la pression de l’émeute, La Convention finissait par céder, en instituant un maximum pour le prix du grain.

Aussitôt les paysans cessèrent d'apporter leurs produits sur les marchés, augmentant encore la pénurie, et provoquant en retour de la part de la Convention un prurit réglementaire encore plus violent, qui se traduisit par la loi du 29 septembre 1793. Cette loi instituait le maximum général sur toutes les denrées de première nécessité et les salaires.

Le blocage des salaires ! ce fut l’erreur fatale, comme l’on en commet toujours lorsque l’on surréglemente.

À l’automne 1793, ce furent des femmes du peuple qui attaquèrent les chariots chargés de nourriture entrant dans Paris. La Convention y répondit par l’invention des cartes de rationnement qui bénéficiaient en priorité aux patriotes, deux mois après avoir institué les « cartes de civisme », qui attestaient de la pureté révolutionnaire du détenteur. Les autorités locales reçurent les pleins pouvoirs pour enquêter, perquisitionner et appliquer la peine de mort pour les thésauriseurs.

Les listes d’habitants affichées à l’entrée des maisons n’empêchaient pas les perquisitions des commissaires du peuple, prétextant la recherche de nourriture stockée. Les contemporains décrivent comment les inspecteurs fouillaient dans tous les coins, forçant les coffres-forts, brisant les sceaux des lettres, des testaments, sautant sur la moindre feuille de papier dont les phrases banales étaient censées dissimuler des codes secrets, saisissant les assignats, l’or, l’argent, les bijoux.

La plupart des perquisitions étaient fondées sur la délation, une délation encouragée dans les termes suivants par le député de la Convention, Jean-Pierre André Amar, ce riche reconverti dans la surenchère terroriste  : « Dénoncez, dénoncez ! le père doit dénoncer son fils, le fils son père. Il n’y a pas de patriotisme sans dénonciation ».  

  

Mais la famine menaçait le pouvoir de la Montagne.

 

À SUIVRE

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article