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Le blog d'André Boyer

LE TEMPS ET SON CONTRÔLE

1 Mai 2024 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE

LE TEMPS ET SON CONTRÔLE

Le temps et son contrôle

Fondée sur la mythologie, la philosophie grecque présente le temps comme une dégradation, qui détruit tout peu à peu.

 

Allant au-delà de cette mythologie, les philosophes grecs ont introduit une opposition entre le temps du monde et le temps du sujet. Certains philosophes comme Aristote, et dans une certaine mesure Platon, parlent d’un rapport au temps cosmique, alors que d’autres comme Saint-Augustin pensent qu’il s’agit d’une question subjective et que, finalement, le temps n’existe peut-être pas : pour lui le temps n’est qu’une distension de l’âme, parce que je ne connais le passé que par la mémoire et le futur par la crainte, l’espoir ou l’anticipation. Ces réflexions de Saint-Augustin anticipent celles d’Heidegger, qui développera une conception du temps radicalement subjective.  

Cette différence entre un temps objectif et un temps subjectif a engendré une constante oscillation entre l’un et l’autre dans l’histoire de la philosophie. Paul Ricœur a ainsi développé des figures mixtes du temps, à la fois subjectives et cosmiques, en partant d’un temps historique qui est à la fois un temps inscrit dans un calendrier cosmique, un temps du monde, physique, géographique, et en même temps, qui constitue un temps subjectif, un temps vécu, un temps dans lequel des points de vue subjectifs divers se rencontrent ou s’éloignent.

Selon cette approche, il n’y aurait pas un seul temps, mais des registres temporels différents dont il faut accepter les discontinuités et les pluralités.

Le concept de temps suscite d’autres oppositions, comme celle entre Kant et Hegel, avec une conception statique du temps confrontée à une conception dynamique du temps comme dialectique. L’histoire de la philosophie est structurée entre un temps du sujet et du monde vécu sur le mode de la durée, comme on le trouve chez Schopenhauer, Nietzsche ou même Bergson, sur le mode de la volonté de vivre, ou de la poussée vitale, où le temps est une sorte de continuum, et une conception du temps comme rupture, comme une discontinuité.

Si nous revenons à la conception antique du temps, comme une lente destruction, une entropie, une perte, nous observons, sans doute à partir de la Renaissance, que la conception du temps s’est peu à peu inversée, que le temps n’est plus uniquement dégradation, mais peut devenir créateur jusqu’à inverser la conception du monde: pour les Grecs le monde était la vie et la mort était le problème, alors qu’aujourd’hui le mystère n’est plus la mort qui est partout, mais plutôt la vie.     

Selon cette perspective de la vie, miracle ou mystère, nous avons peur de l’entropie, du temps qui détruit. Nous voulons toujours plus de complexité, de croissance. Nous estimons qu’il n’y a de la vie que lorsqu’il y a de la croissance, de l’intensification. ET pour continuer d’exister dans une société où le nombre de connexions augmente sans cesse, il faut entretenir constamment les connexions, envoyer des messages à tout le monde — et comme on connaît de plus en plus de monde, il faut envoyer de plus en plus de messages et en recevoir de plus en plus. 

Sans limites ?

Dans une société, la confiance repose sur le sentiment que le monde dure plus longtemps que moi. Or nous sommes plongés dans une société qui délaisse ces institutions pour des connexions horizontales multiples qui s’accélèrent. On accélère la vitesse, on accélère les transports, les déplacements, on se déplace de plus en plus vite, les connexions sont de plus en plus fréquentes, avec une limite due à la finitude physique et psychique de l’homme

Le temps d’aujourd’hui est en train de devenir un temps inhumain, comme si un processus technique était en train de manager nos cerveaux, nos corps, nos relations, notre emploi du temps, la forme entière de notre société, trop rapidement pour nos capacités.

 

Pouvons-nous encore reprendre le contrôle de notre temps ?

 

 

 

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