MISSION ACROBATIQUE EN INDE
À la fin de mon dernier billet sur mes actions universitaires à l’étranger ( Survoler l’Afrique de la gestion, 3 octobre 2024) j’indiquais que j’avais accompli une mission en Inde sous l’égide d’Edufrance fin 1998, dont j’attendais beaucoup).
On se souviendra peut-être que je m’étais donné comme mission à moi-même, sans attendre ni l’accord ni la reconnaissance d’aucune autorité, universitaire ou politique, de contribuer aux échanges entre la France et les principaux pays en voie de croissance et au développement des entreprises françaises à l’étranger, en créant des centres de formation en Chine, Indonésie, Inde et Brésil, tout en étant prêt à agir ailleurs et autrement en fonction des circonstances.
C’est ainsi que j’étais intervenu aussi en Bulgarie, Tchécoslovaquie, Madagascar, Algérie ou au Maroc, dans des cadres différents, le plus souvent avec l’appui de la FNEGE qui partageait une grande partie de mes objectifs.
L’Inde était donc le troisième objectif successif de mon plan initial. Pour ce faire, je saisissais l'opportunité de l’organisation par Edufrance d’une série de forums de promotion de l’enseignement supérieur français en Inde entre le 29 novembre et le 6 décembre 1998, destiné à « vendre » aux Indiens des formations à la gestion en France, pour me glisser parmi les organisations qui offraient leurs formations.
Une cinquantaine d’écoles y participaient qui avaient été assez artificiellement classées en trois catégories, Management, Engineering, Tourism et Hotel Management. Le Ceram (le futur Skema et l'ex ESC Nice*) y était représenté dans les trois catégories. Mais on trouvait également l’ESSEC ou l’Institut pour l’Aéronautique et l’Espace ou l’Institut Vatel. Tout ce monde se flattait de fournir des programmes en anglais en France, ce qui n’était pas tout à fait vrai à l’époque, mais qui est aujourd’hui une banalité. L’IAE de Nice, que je représentais avec une assistante de recherche, prétendait offrir l’inverse, à savoir une formation à la gestion française en Inde qui n'était encore qu'un projet, autant dire que nous faisions tâche dans le tableau.
Je me dois de souligner que cette mission était exceptionnellement financée par l’IAE de Nice, grâce à sa directrice de l’époque Maryse Martin, à la fois ma collègue et ma compatriote pugétoise. Jusqu’à cette dernière mission, jamais en effet, l’IAE de Nice n’avait soutenu la moindre de mes actions à l’étranger, pour des raisons qu’il ne m’appartient pas d’analyser ici.
Le programme comprenait trois expositions dans trois ville successives, avec, classiquement, des séminaires d’information autour de sujets tels que « Pourquoi faire des études de management en France ? » qui étaient directement contradictoires avec mes propres objectifs, mais que je pouvais comprendre. Nous nous sommes ainsi rendus à Delhi, à Bangalore et à Bombay, accompagnés, ou encadrés, par divers officiels français, comme Ségolène Royal, Ministre déléguée à l'enseignement scolaire, Claude Blanchemaison, l’Ambassadeur de France en Inde, Jean-François Poncet, Jérôme Monod (Suez) ou René Blanchet, Recteur de l’Académie de Paris.
À posteriori, la présence simultanée au cours de cette mission en Inde de Ségolène Royal, avec qui j'avais eu maille à partir au sujet des subventions de l'IFTG (Prague) et de Claude Blanchemaison qui, en tant qu’Ambassadeur de France au Vietnam et diplômé d'HEC, s'était opposé à la création d'un Institut de Gestion Français à Hanoï sous l'égide de l'université française que je présentais pour favoriser la Chambre de Commerce de Paris, aurait dû m'alerter: l'Ambassade de France en Inde ferait tout ce qui était son pouvoir pour me mettre des bâtons dans les roues, sans se préoccuper une seconde de l'intérêt du projet pour la France en général et pour les entreprises françaises en particulier. Et c'est exactement ce qui se passa.
Comme on l’imagine, les rencontres ponctuées d’échanges de cartes de visites et de discussions, les cocktails et les repas se succédèrent sans discontinuer pendant ces huit jours qui furent loin d’être désagréables, quoique parfaitement épuisants.
Mes lecteurs savent, depuis le récit de ma mission en Indonésie, que ces déplacements et ces mondanités ne pouvaient en rien me distraire de mon objectif, créer une formation en gestion en Inde en français, dont je conviens qu’elle consistait à clairement détourner de son objectif le programme organisé conjointement par Edufrance et l’Ambassade de France en Inde.
Pour obtenir gain de cause, je rencontrais près de trois cents prospects en six jours de rencontre, soit un nombre énorme de dirigeants d'écoles, de professeurs et de toutes sortes de responsables de formation à la gestion en Inde. La plupart du temps, je recevais un excellent accueil dont je me méfiais un peu, la culture indienne n'étant ni la culture chinoise, presque brutale, ni la culture indonésienne, ouverte derrière ses silences. En Inde, le business était roi et les promesses n'engageaient que ceux qui y croyaient, comme le professait Charles Pasqua.
Progressivement, je me faisais néanmoins une idée de plus en plus précise sur les acteurs indiens qui pourraient être associés à notre projet de programme.
* Je pourrais écrire un billet entier sur la manie, souvent stupide, des Écoles de Commerce de changer de nom, mais je vous en dispenserai pour ne pas lasser votre patience...
À SUIVRE
Prochain billet : HANNAH ARENDT