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Le blog d'André Boyer

GRÈCE: NOT TOO BIG TO FAIL*

24 Septembre 2025 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

GRÈCE: NOT TOO BIG TO FAIL*

Cette purge entraina le délabrement des services publics, dont témoigne la catastrophe ferroviaire de Tempé du 28 février 2023 et ses 57 morts.

 

Une autre conséquence négative fut la vague de privatisations, qui priva l’État grec de ressources :

  • le rachat d’une partie du port du Pirée par une société chinoise en 2016 ainsi que la vente des ports de Thessalonique, Heraklion et  Igoumenitsa.
  • La privatisation de 14 aéroports régionaux et de plusieurs autoroutes dont l’importante autoroute Egnatia Odos. Plusieurs infrastructures énergétiques ont aussi été vendues.

Cependant les effets positifs se sont fait sentir sur le plan financier, en deux temps : 

  • le déficit primaire du pays s’est résorbé dès 2013 avant de se transformer en excédent à partir de 2015, au prix d’une diminution de 30 % de la dépense publique.
  • Le pays a réussi à atteindre une stabilisation de la dette, qui a amorcé sa réduction à partir de 2021.

Aujourd’hui la Grèce a modifié ses priorités et son style de vie. Fini la priorité à la consommation, via la fraude et l’endettement. Il s’agit plutôt d’augmenter la productivité, ce qui implique concrètement d’accroitre le temps de travail : en juillet 2024, une nouvelle loi a permis à certaines entreprises de passer à la semaine de six jours et à certains secteurs d’appliquer la semaine de 48 heures, lorsqu’il y avait une surcharge de travail. Le résultat quantitatif de ces mesures est que, depuis 2024, les Grecs détiennent la première place européenne pour le temps de travail effectif hebdomadaire, avec 41 heures.

De plus, toujours quantitativement, les impôts sont mieux recouvrés, puisqu’ils ont atteint un taux de 94% en 2014 contre 82% en 2010. Pour sa part, le taux de chômage baisse, quoique lentement, avec 9,2% prévu en 2026 contre 10,4% en 2024.

Si l’on élargit notre réflexion depuis les conséquences des mesures sur l’équilibre financier de la Grèce à son équilibre socio-économique, force est d’observer que les réformes initiées sous la contrainte financière ont eu un coût social extrêmement élevé, puisque la crise a vidé le pays d’une partie de ses forces vives : plus de cinq cent mille grecs ont quitté le pays, en majorité des jeunes plutôt diplômés et la démographie, un bon indicateur du moral de la population, s’est effondrée avec une  population de la Grèce qui est passée de onze millions d’habitants en 2010 à dix millions quatre cent millions en 2024.

Conséquence de la crise ? situation temporaire ? On peut l’espérer dans le futur, mais pour le moment, si la dette a baissé en pourcentage du PIB, elle continue d’augmenter en valeur absolue. C’est donc de fort peu, et le résultat est que l’État grec n’a toujours pas de marge de manœuvre budgétaire pour relancer l’économie. La baisse drastique de l’inflation et la timide remontée des salaires permettent d’entrevoir une situation meilleure dans le futur, qui reste dépendante d’un redémarrage économique fondé sur l’assouplissement du marché du travail et la reprise du tourisme, qui s’est traduit par un record de 35,9 millions de visiteurs en 2025.

La situation actuelle française n’est pas, à une plus grande échelle, sans présenter des points communs avec les origines de la crise grecque : même dépendance à la dette, même culture du « toujours plus » public, même incapacité à réformer l’État, accélérant une course à la dépense artificiellement soutenue par l’Euro.

Le fait que les réformes nécessaires aient été maintes fois repoussées devrait nous inquiéter. Aujourd’hui même, l’intersyndicale a réclamé au Premier Ministre désigné l'abandon du recul de l'âge de départ à la retraite à 64 ans…

Or la thérapie de choc imposée à la Grèce ne se déroula pas comme un long fleuve tranquille. De 2008 à 2014 le pays a connu près de 600 grèves et pas moins de 20 000 manifestations, allant parfois jusqu’à l’affrontement violent. L’arrivée au pouvoir du parti Syrisa dirigé par Alexis Tsípras et de sa coalition de gauche en 2015 conduisit à un affrontement avec l’UE qui tourna à sa défaite, malgré le référendum et ses 61% de votes contre les nouvelles mesures imposées par la troïka.

Car l’ensemble de la société grecque, derrière son gouvernement, recula devant la perspective de la sortie de l’Euro. Dès lors, les corps intermédiaires et la majorité des partis travaillèrent de concert pour permettre la reconstruction du pays : les sacrifices furent acceptés, dans la douleur certes, mais acceptés.

Serons-nous capables de faire preuve d’autant de résilience que la Grèce dans une situation de crise comparable ? Saurons-nous passer d’une situation de crise aigüe, en acceptant, chacun, une part de sacrifices pour réformer la France ? N’allons-nous pas chercher à transférer nos difficultés financières à toute l’Europe selon le principe du « Too big to fail » ?

 

Les récents marchandages sur les économies nécessaires au rétablissement des finances de l’État français ne semblent malheureusement pas aller dans le sens de la responsabilité et de la solidarité collective. On ne peut donc pas citer la Grèce en exemple, pas encore…

* J'ai inventé cette expression à partir du célèbre "Too big to fall"!  

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