La vraie nature de la morale
14 Septembre 2013 Publié dans #PHILOSOPHIE
Eprouver un ressentiment consiste à intérioriser la violence, qui consiste à ruminer une vengeance imaginaire, que l’on n’exercera réellement jamais. Mais la mauvaise conscience est une arme pire encore.
En effet, alors que le ressentiment correspond à la recherche d’un coupable de son mal être, la mauvaise conscience consiste à se martyriser soi-même. Certes, la mauvaise conscience est inhérente à la vie en société, car la tranquillité de la société exige que les individus ne déversent pas leur violence intérieure sur les autres, mais la retournent contre eux-mêmes.
Il n’est d’ailleurs pas suffisant d’expliquer aux déshérités qu’ils sont responsables de leur propre malheur, mais encore faut-il culpabiliser les personnes qui ont l’outrecuidance de s’estimer heureuses.
C’est ainsi que nos moralistes nous expliquent que la prospérité, d’ailleurs en peau de chagrin, des occidentaux provient de leur passé colonial et de l’exploitation de la nature, afin de nous inviter aussitôt à nous en repentir parce que nous en serions, aujourd’hui et personnellement, coupables. Il s’agit à toute force de nous priver du droit au bonheur, nous qui avons la « chance » de vivre dans un ilot de prospérité entouré d’un océan de pauvreté et de malheurs.
D’ailleurs, si par malheur un jour, nous nous trouvions plongés à notre tour dans l’océan en question, nos moralistes nous expliqueraient aussitôt que nous sommes les premiers responsables de nos épreuves.
Car il n’ y a pas d’issue : soit l’homme est coupable de son bonheur, soit il est coupable de son malheur, mais toujours coupable.
À cet effet, celui qui préfère jouir de l’instant présent plutôt que de penser à l’avenir de la planète, ou de lutter contre les injustices doit sans répit être accusé d’égoïsme, d’insouciance ou d’hédonisme, et les pires catastrophes doivent lui être prédites, à cet homme insouciant, sauf s’il fait pénitence !
De ce point de vue, rien n’est plus tristement burlesque que ces vieilles personnes, collées devant leurs écran de TV, qui se désolent des catastrophes futures que leur annonce quotidiennement les journalistes payés pour contrôler le troupeau, alors que leur espérance de vie est assez courte pour leur garantir, même si ces prévisions tragiques se révélaient réalistes, que jamais elles ne les verraient personnellement !
Comme l’envie nous démange de leur crier : mais vivez, que diable !!!!
Aussi, peut-être pire que la souffrance, la violence, l’injustice, l’idée de punition, de culpabilité et de responsabilité empoisonne t-elle la vie des hommes, qui finissent par rendre la vie elle-même coupable de leur souffrance.
Pourtant, nous sommes aussi peu coupables que méritants de ce que nous sommes, alors que la morale veille sur nous, avec pour but légitime de dresser l’individu afin de transformer une meute de bêtes sauvages en un troupeau d’ animaux coupables, donc dociles.