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Le blog d'André Boyer

Lagom ou la vie à la suédoise

13 Mai 2013 Publié dans #PHILOSOPHIE

 

Quand on vit en Suède, on a l’impression que tout est bien rangé dans sa petite case, même les gens.

lagom_sverige.jpgEn effet, il semblerait que la pire des choses pour un Suédois soit de se faire remarquer, en bien comme en mal, parce que sortir du rang signifie remettre l’harmonie de la société en question. Il faut être lagom.

Lagom est impossible à traduire exactement, comme beaucoup de termes qui touchent à la culture d’une société. En gros, cela signifie « juste ce qu’il faut » ou « ni plus, ni moins » ou « pile poil ». Par exemple si l’on vous demande comment est votre café et que vous répondez lagom, cela signifie qu’il est à votre goût, ni trop froid, ni trop chaud. 

Lagom est aussi un principe de vie, qui signifie un état médian, un équilibre auquel vous pouvez aspirer, en d’autres termes une vie posée, sans hauts, ni bas, sans vagues, avec tout ce que ce qui en découle en termes de normes et de pression sociale.

Vu de notre brouillon village gaulois, la Suède semble paradisiaque avec son consensus, son esprit collectif, son égalité réelle. Mais l’autre face de ce paradis, c’est l’uniformisation.

Vue dans son ensemble, la société suédoise semble n’être formée que d’une immense classe moyenne. En Suède les personnes bling bling avec une Rolex au poignet pour leur cinquantième anniversaire sont introuvables comme rares sont les sans-abri. 

De fait, il est mal vu de chercher à se démarquer. L’esprit de compétition et même d’émulation est exclu du système éducatif. Les enfants ne sont jamais comparés les uns aux autres et ne sont pas notés avant l’âge de 14 ans. Faire du zèle au travail ou des heures supplémentaires est plutôt conflictuel, car c’est interprété comme une volonté de se démarquer.  

En Suède, personne ne vous laissera jamais la moindre raison de croire que vous êtes inférieur aux autres, mais pas davantage que vous êtes supérieur aux autres.

 

La vantardise est fortement découragée,  et pas seulement à propos de l’argent : votre enfant est surdoué ? vous avez le sentiment d’avoir accompli quelque chose dont vous êtes fier ? restez calme et discret. Les émotions fortes, y compris positives, sont minimisées, car elles pourraient déranger les autres et il n’est donc pas convenable d’en parler. Un Suédois évite de bouleverser les autres avec ses propres émotions, et c’est pourquoi les rues suédoises sont parfaitement calmes. Pas d’éclats de voix, ni de rire.

Respecter le lagom est un sport national qui se traduit par un code de conduite: accepter de faire la queue, ralentir en abordant les passages piétons, être ponctuel, recycler les déchets, troquer la cigarette contre le snus, un tabac que l’on place sous la lèvre pour en absorber la nicotine et qui est plus discret que la cigarette. 

Même lorsqu’ils s’amusent, les Suédoises et les Suédois continuent à suivre le règlement-lagom-pour-enfreindre-les-règles qui se traduisent par les comportements suivants : 

- la cuite est permise, une fois par semaine, le vendredi ou le samedi soir. Pas en semaine. Jamais. À l’aller, ne vous avisez pas d'adresser la parole à votre voisin de bus mais au retour vous pouvez chanter avec lui en vous pendant aux barres horizontales du bus. Inutile de préciser que si vous le recroisez le lundi matin suivant, c’est comme si vous ne l’aviez  jamais vu.

- En tant que bon parent, cuisinez équilibré toute la semaine et attendez le vendredi soir pour vous empiffrer de junk food et de Coca en famille devant la télé,  le fameux fredagsmys. Pas question d’inverser et de dévorer une pizza le mardi et du brocoli le vendredi, c’est hérétique ! De même, vos enfants reçoivent leur dose de bonbons le samedi et le samedi uniquement, les lördagsgodis

- Prenez vos vacances en même temps que tout le monde, dans le même type de maison de vacances que tout le monde, la fameuse stuga, ce petit chalet en bois rouge. La stuga ne doit pas être plus grande que celle des autres et il est bon que vous passiez vos journées à pratiquer la cueillette en forêt ou la baignade dans les lacs. Comme tout le monde.

 

La vie suédoise n’est pas déprimante pour autant, même si on peut trouver qu’elle manque de fantaisie. Par contre, elle est paisible et d’ailleurs les Suédois n’ont pas du tout l’air de trouver le lagom pesant. 

Simplement, les différences culturelles, cela existe…


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L
<br /> Cher André,<br /> <br /> <br /> Absence de pensée ? Au contraire les nazis pensèrent leurs crimes. Hannah Arendt entretint<br /> sans discontinuité (1925-1975) une relation amoureuse puis épistolaire avec Martin Heidegger qui fut son maître et membre de 1933 à 1945 du NSDAP (parti nazi). Elle se fit journaliste pour le<br /> procès Eichmann et publia Eichmann à Jérusalem. Rapport sur la banalité du mal,<br /> traduction française A. Guérin, Gallimard, 1966– Folio,<br /> 1991. L'une des questions posée par Hannah Arendt est : " Comment la<br /> culture allemande (ou européenne car cela fit aussi l'objet de discussion Heidegger/Arendt/Thomas Mann) a-t-elle pu engendrer une telle barbarie ? " et " la culture protège-t-elle contre la<br /> barbarie ? " et la réponse est "Non, moi Hannah Arendt je me suis faite journaliste pour suivre le procès Eichmann…/… pour trouver confirmation qu’il n’en est rien. "<br /> <br /> <br /> Je dirais aussi absence de courage de la part des démocraties pour refuser par les armes la montée au pouvoir d'Hitler. Absence de courage de la<br /> part de la majorité des Allemands qui acceptèrent jusqu'au bout la terreur nazie.<br /> <br /> <br /> Comme toujours les causes sont multifactorielles. Ce qui m'inquiéterait le plus serait l'absence de mémoire, dont celle de ceux qui eurent le<br /> courage de combattre la bête immonde.    <br />
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