Le nihiliste à la recherche d'un but
16 Avril 2013 Publié dans #PHILOSOPHIE
L’intuition fondamentale de Nietzsche consiste à considérer que le nihilisme ne résulte pas de la chute des valeurs mais du besoin de croire.
En effet, nous avons besoin de croire en un idéal, une idole, une divinité, qui, lorsqu’ils s’effondrent, nous entraînent avec eux dans leur chute, que ce soit une utopie politique, le départ de celle ou de celui que nous aimions ou notre plan de carrière qui tombe à l’eau.
Le XXeme siècle a vu le socialisme, cette religion de substitution, se dissoudre dans une brume sanglante. L’archipel du Goulag, la révolution culturelle chinoise, le génocide du peuple khmer, la chute du mur de Berlin ont été vécus comme des traumatismes majeurs par les croyants du socialisme qui ont dû précipitamment se convertir à d’autres idoles, la publicité ou excellent les anciens trotskistes, la célébration du profit ou l’idole sacrée de l’Europe autour des anciens de Mai 68 reconvertis comme Daniel Cohn Bendit.
Or Nietzsche nous fait savoir qu’il est inutile de chercher des idoles de substitution et vain aussi de revenir en arrière à la quête du vrai socialisme, du vrai amour ou de l’entreprise qui croira vraiment en nous.
Le problème est ailleurs: l’homme se sent coupé en deux, avec une partie de lui-même qui croit au Bien et l’autre qui croit au Vrai. Il voudrait adhérer aux mensonges qui lui permettent de vivre mais il sait qu’il n’en a plus le droit. Alors, puisqu’il ne croit plus en rien, sans hiérarchie de préférences, le nihiliste ne sait ni s’engager ni renoncer.
Le scepticisme devient sa nouvelle croyance, puisqu’il ne peut vivre sans espérance. Ce scepticisme lui offre un confort intellectuel, un tranquillisant qui lui évite l’action. Il faut aussi que les autres soient comme lui, sceptiques et résignés. Il ne peut pas accepter que son voisin, son collègue soit supérieur à lui, ce qui lui renverrait une image négative : il ne veut ni admirer, ni mépriser. Il faut que rien ne le dépasse, ni Dieu, ni maître, rien vers quoi grandir.
Puis, puisqu’il a perdu tous ses idéaux, il lui reste une dernière aspiration, le bonheur.
Le bonheur, nous dit Nietzsche, est l’idéal nihiliste par excellence, car on ne désire être heureux qu’en dernier recours, lorsque l’on n’a plus le courage ni de désirer, ni de vouloir.