What can we do about France (suite)?
12 Avril 2012 Publié dans #ACTUALITÉ
À la fin de mon blog précedent je concluais en observant que le problème de fond ne se situait pas dans la simple acceptation d’ajustements budgétaires, mais dans la mobilisation du pays pour s’adapter au monde tel qu’il sera dans une ou deux générations.
Or, sous la pression démographique et la croissance économique des trois autres continents, l’Europe en général et la France en particulier sont en train de changer de rôle dans le monde. Ils étaient au centre de la politique mondiale, ils n’y sont plus. Les débats sont ailleurs, entre les USA et la Chine, au Moyen Orient entre les puissances pétrolières, en Afrique avec le réveil du continent. Dans le reste du monde, tout le monde se fiche de ce qui se passe en Europe ou de ce que pense l’Europe des débats qui agitent le monde.
Non seulement l’Europe et la France n’ont déjà plus aucune importance politique, mais elles sont en train de perdre leur rôle de centre d’innovations techniques et de fournisseurs industriels. L’informatique, la télématique, Internet, les réseaux sociaux, tout ce qui a changé la communication entre les êtres humains leur a échappé. Elles n’en sont que les consommatrices, pas les conceptrices, sauf sur quelques créneaux limités, quelques chips, quelques jeux. Les machines-outils, l’automobile, la chimie, l’industrie nucléaire et aéronautique lui restent, à condition d’installer les usines en Asie, bientôt en Amérique du Sud et en Afrique et de transférer la technologie.
En revanche, l’Europe comme la France demandent au reste du monde de leur fournir les capitaux qui leur manquent pour combler le déficit des États et renflouer les entreprises qu’elles vendent, bradent ou liquident. Il paraît désormais tout naturel que la Chine achète des emprunts grecs et que des entrepreneurs indiens possèdent notre industrie sidérurgique. L’Europe comme la France demandent au reste du monde de lui fournir ses ressources énergétiques en pétrole, en gaz et en uranium, devenant de plus en plus dépendantes du Moyen-Orient, de la Russie et de l’Afrique. Il en est de même pour leurs matières premières, à l’exception notable des produits alimentaires.
C’est ce que les experts de tout poil appellent par commodité la mondialisation, c’est-à-dire l’interdépendance entre les économies du monde. Ne voulant pas attirer l’attention sur les perdants et les gagnants de la mondialisation, ils se gardent d’affiner leur analyse en comparant les dépendances relatives des différentes économies, qui restent, malgré la mondialisation, toujours nationales.
Ainsi se réfère t-on bien à la Chine, et non à l’Asie dans son ensemble, pour évaluer sa dépendance énergétique et c’est bien de la production à bas prix chinoise dont on ne peut se passer aujourd’hui sans voir s’effondrer le niveau de vie du reste du monde.
Ainsi les USA prennent-ils grand soin à dépendre le moins possible du reste du monde, quitte à utiliser la force militaire pour maintenir en leur faveur les rapports de force avec leurs « partenaires ».
Ainsi le Japon, dépendant de tous, a t-il su forger une indépendance culturelle et un niveau technologique de pointe qui lui permettent de résister aux pressions d’où qu’elles viennent, en particulier d’Asie.
Ainsi la Russie, puissance aux pieds d’argile, cherche t-elle son autonomie dans ses ressources énergétiques.
Ainsi l’Amérique Latine assure t-elle son développement dans une forte autonomie continentale.
Ainsi l’Afrique, forte de sa démographie, de ses ressources énergétiques et de sa pauvreté, n’est nullement en position de quémandeur.
Mais l’Europe et la France, si demandeurs par ailleurs, qu’ont-ils à offrir d’indispensable au monde ? des produits industriels dans des créneaux technologiques de plus en plus restreints, l’industrie du luxe et de la mode tant que la vieille Europe symbolisera le chic pour les autres continents, un site touristique de premier plan et le premier réceptacle d’immigration des trois autres continents. En somme, ce qu’attend le monde de la part de l’Europe, ce ne sont ni des matières premières, ni des produits industriels, ce ne sont que quelques produits alimentaires, du vin, des produits de luxe et d’être le régulateur démographique du reste du monde.
L’Europe et la France seraient rayées de la carte comme l’ont été les cent millions d’indiens d’Amérique que la marche du reste du monde n’en serait guère troublée, sauf quelque nostalgie pour un art de vivre oublié.
Il faut donc prendre acte que l’Europe comme la France sont en train de perdre toute maîtrise sur leur destin, une maîtrise dont ils disposaient presque totalement un siècle auparavant.