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Le blog d'André Boyer

Des histoires sur notre histoire

7 Juin 2012 Publié dans #PHILOSOPHIE

Il y a quelque temps que je m’intéresse à la notion de vérité. En tant qu’universitaire, c’est assez naturel, et même en tant qu’être humain. D’ailleurs, j’imagine que je ne dois pas être le seul, car cela sert de s’intéresser à la vérité puisque le mensonge, l’approximation et l’ignorance sont le lot quotidien de chacun d’entre nous.

cerveau-gauche-cerveau-droit-icone.jpgSi bien que nous luttons en permanence pour comprendre, pour dire ou pour décoder la vérité, à moins qu’au contraire nous nous efforcions de la cacher ou de l’ignorer lorsqu’elle est désagréable, ce qui est généralement le cas.

Mais ce que j’ai fini par découvrir, assez tard je l'avoue, c’est que cette vérité fuyante est aussi multiple. Chacun a sa vérité, ce qui la rend délicate à reconnaître. La vérité est subjective, provisoire, locale. Autant dire que c’est une notion difficile à cerner, encore plus à manier. Même du point de vue collectif, il semble que circulent des vérités à peu prés reconnues par tout le monde, comme le « fait » que la Terre tourne autour du Soleil, mais en général cela ne dure pas toujours. C’est que la notion de vérité change avec la manière dont l'homme voit le monde. C’est pour cela que nous réinterprétons sans cesse l’expérience de nos prédécesseurs, que nous appelons l’histoire.

Ainsi on nous raconte que notre histoire a commencé six millions d’années avant que vous ne lisiez ce texte, lorsqu’une petite femme que l'on a appelée Lucy, se décida enfin à descendre des arbres sur lesquels elle avait l’habitude de vivre. Cela se passait sur la Terre, une planète moyenne d’une étoile assez ancienne que nous appelons le Soleil, située dans une galaxie quelconque que nous avons baptisée Voie Lactée, et rien de tel n'est advenu nulle part ailleurs, jusqu’à nouvel ordre.

Cette femme se trouvait en Afrique orientale, c’est du moins ce que l’on pense aujourd’hui. Une fois installée par terre, mais sans doute quelque temps après, elle décida en outre, elle ou ses descendants, de se planter sur ses pattes de derrière.

L’histoire commence, il y a donc un début. Elle commence quand Lucy descend de l’arbre, pas avant, par conséquent l’être humain n’existe qu’une fois qu’il quitte l’arbre pour le sol. C’est l’idée de progrès qui apparaît avec cette décision révolutionnaire de quitter l’arbre et de marcher sur deux pattes. Le progrès se trouve du coup placé au cœur de l’histoire de l’homme. Aujourd’hui, mais sans doute pas demain, on nous présente ces deux décisions comme étant le fondement de la marche de l’homme vers le progrès, qui consiste à renoncer à des comportements instinctifs pour les remplacer par des décisions raisonnées. Ce renoncement oblige l'homme à inventer de nouveaux comportements qui seront copiés et améliorés de génération en génération selon un processus permanent d’accumulation culturelle.

On nous raconte qu’au début l’homme est assez lent à changer d’idées puis de comportements avant de les traduire en attitudes. Il lui faut trois millions d’années pour se décider à tailler un galet, puis deux millions d’années de plus pour réagir au froid, puis encore neuf cent mille ans pour prendre conscience qu’il est mortel. Renonçant à l’instinct, l’homme se serait mis en quête de comprendre le monde pour le contrôler.

Même si la question peut paraître absurde à la quasi-totalité des êtres humains d’aujourd’hui, nous avons au moins le droit de la poser :

Et si cela avait été une très mauvaise idée, une erreur en somme, de renoncer à l’instinct pour chercher à comprendre le monde avec la partie gauche de notre cerveau?

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