DIEU
Je suis le Christ et cela fait deux mille ans que j'ai été chargé par Dieu de gérer notre champ d'expérience, la Terre, où se développait la vie, qui était déjà, à l'époque, largement dominée par l'homme.
Quand je suis intervenu en Palestine occupée*, ils avaient bien développé leur agriculture, ils avaient inventé la roue, le feu et sans cesse de nouveaux objets pour mieux vivre et produire plus et ils multipliaient les échanges à travers la Méditerranée ainsi que vers les Perses et l'Orient. Mais, à cette époque, il ne se passait rien d'assez grave pour nécessiter une intervention divine urgente.
Aussi, lors de mon arrivée sur Terre, j’ai cru que j’avais le temps de leur inculquer l’essentiel pour qu’ils puissent coopérer tous ensemble en leur donnant l'amour.
"Aimez-vous les uns les autres !" ai-je proclamé.
Cela a marché un temps et partiellement, tant que les hommes manquaient de moyens pour s'exploiter à fond les uns les autres, mais quand, avec leur manie d'inventer, ils les ont eu, ils ont oublié les principes que j'avais essayé de leur inculquer et ils ont liquidé des pans entiers de leur population, comme en Amérique et pendant les grandes guerres.
Lors de ma présence sur Terre, je sentais déjà que leur frénésie d'invention risquait de les conduire à la catastrophe. Aujourd'hui, nous n'en sommes plus très loin, il ne reste plus que quelques centaines d'années tout au plus pour que l’espèce humaine disparaisse après avoir tout saccagé.
Dieu me dit de ne rien tenter de plus, que cela ne servira à rien, que ce n'est pas grave parce que d'autres espèces vont se développer à la place de l’humanité. Il a sans doute raison, mais j'ai passé, dans la douleur d'ailleurs, trente-trois ans parmi eux et j'en ai gardé un attachement sentimental. Alors je cherche une solution qui suppose de trouver un mécanisme simple pour corriger la trajectoire actuelle. Ce sont des êtres frustes, il leur faut une motivation sommaire à ces huit milliards d'individus et, actuellement, je ne vois pas comment en faire un seul cerveau.
En ce moment même, chacun de ces petits cerveaux individuels travaille plus que jamais à son compte au détriment des autres, en inventant sans arrêt des objets qui leur permettraient d’avoir plus de pouvoir sur les autres. Pas pour le bien des autres, non, pour le leur, comme si c’était une solution pérenne.
Ces petits cerveaux se noient dans le court terme. Je les vois, à l’instant même se faire bêtement peur avec l'intelligence artificielle, comme si elle allait prendre leur place. Ce qui est sûr, c’est que certains vont s'en servir contre les autres. Bientôt, ils vont se lancer dans la modification de leurs propres cellules et ils vont bricoler de nouveaux hommes. Cela ne m'inquiète pas en soi, c'est l'usage qu'ils en font, les uns contre les autres, et aussi contre les autres êtres vivants et contre la Terre elle-même.
Dans cette dynamique de chacun contre tous, les Écossais, perdus dans le Nord de leur ile sombre, et bien suivis par les Anglais et les Américains, ont poussé la logique du "chacun pour soi" à fond. Quand j'ai entendu cet hypocrite d'Adam Smith, soi-disant un moraliste, énoncer comme une vérité première que le boulanger ne faisait pas du pain pour faire plaisir à son prochain mais pour faire du profit, j'ai compris que les hommes allaient s'autodétruire. Le profit est devenu leur dieu intime. Quoi qu’ils en disent, ils en oublient de regarder vers le ciel.
Car aujourd'hui, on peut faire du profit avec tout et surtout avec rien. Ils ont détruit leur alimentation pour faire du profit et évidemment leur santé avec. Ils se sont intoxiqués avec l’alcool et le tabac puis avec toutes sortes de drogues pour oublier leurs propres faiblesses, au profit des trafiquants de tout poil. Ils se sont laissé enfermer dans des villes insalubres pour avoir des miettes de profit. Ils ont fini par se laisser enfermer aussi dans des hospices chargés de gérer leur mort prochaine, en acceptant que les propriétaires de ces établissements tirent profit de leur agonie. Ils se sont laissé embrigader dans des guerres au nom de n’importe quoi, pour que les "lobbies" qui fabriquent du matériel de guerre fassent des profits.
Quand je regarde la situation avec deux mille ans de recul, Je ne vois que des êtres qui se regardent en chiens de faïence, qui essaient d'exploiter d'autres hommes et tout ce qui traine sur Terre pour faire du profit, sans s'occuper de tout ce qu'ils détruisent au passage.
Oui, Dieu, mon père, me répète toujours de les laisser faire. D’accord, c’est la sagesse même, mais alors, pourquoi m’a-t-il envoyé sur Terre ? Je vois bien que mes concurrents en religion n’ont guère plus de succès, tant ils n’obtiennent qu’une obéissance hypocrite qui conduit au même résultat : chacun pour soi, au prix de leur destruction collective. Sinon, je les aurais soutenus sans barguiner, mes concurrents, s’ils avaient réussi à calmer leur fureur destructrice.
Car les êtres humains, je les aime moi.
Mais je souhaiterais ne pas être tout seul pour les aimer...
Tout de même, il se passe en ce moment un évènement fondamental pour ces êtres humains : ils sont tout simplement en train de disparaitre. À force d’inventer et de rechercher leur propre plaisir, ils ont enlevé aux femmes l’envie de faire des enfants. Et partout dans le monde, ces enfants naissent toujours moins nombreux d’année en année, et ils pensent résoudre le problème en déversant un peu d’argent sur les familles ! Ils n’ont rien compris, il s’agit d’amour, de don de soi, pas de fric…
Quand j’en parle à mon père, il me recommande encore et toujours de laisser faire pour le moment. Dernièrement, il a tout de même ajouté: « N’insiste pas s’ils ne veulent plus de toi. Puisque tu les aimes tant, prends patience. Quand ils ne seront plus que deux cents millions, tu reviendras une seconde fois leur expliquer qu’ils doivent s’aimer les uns les autres s’ils ne veulent pas disparaitre, et cette fois ci, tu verras, ils t’écouteront, ils ne te crucifieront pas, tu pourras même rester pour les diriger de prés. Si tu veux ».
Je crois qu’il a raison. D’autant plus qu’il n’y a plus longtemps à attendre, pas plus de deux cents ans et je reviens…
* Par les Romains.
(Adapté des écrits de Saint Siège.)
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