UKRAINE, THE 51 st US STATE
On commence à peine à prendre conscience de l’ampleur de l’engagement américain en Ukraine, selon une stratégie antirusse mise en œuvre dés 2014 et dont toute l’Europe, à commencer par les peuples ukrainien et russe, fait les frais.
On le voit chaque jour, les États-Unis sont derrière chaque opération militaire, défensive ou offensive, officielle ou clandestine, ukrainienne. Aux premiers jours de l’attaque russe, c’est le renseignement américain qui a empêché le succès de l’audacieuse opération héliportée russe menée avec plus de 200 appareils sur l’aéroport de Gostomel, au nord-ouest de la capitale ukrainienne. De même, mi-avril, le croiseur Moskva a été touché par des missiles Neptune tirés depuis la côte grâce à l’avion US de patrouille P-3 Orion. Ce sont également eux qui ont organisé le ciblage des généraux russes sur le front ou qui viennent d'organiser le bombardement d'une prison qui détenait des soldats ukrainiens prisonniers, afin de les dissuader de se rendre aux troupes russes.
Tout un réseau de commandos et d’espions installés en Europe coordonne l’appui militaire à l’Ukraine (New York Times du 25/06/22). Ils s’y sont préparés depuis 2014, puisqu'ils ont formé 27000 instructeurs en huit ans à Yaroviv, près de Lviv, une base ciblée par les Russes le 13 mars dernier.
Malgré cette antériorité dans l'engagement auprès de l'Ukraine, les États-Unis n’ont assumé officiellement leur stratégie antirusse que depuis la fin avril, lorsque le ministre de la défense étasunien déclarait textuellement à Kiev : « Nous voulons voir la Russie affaiblie à un degré tel qu’elle ne puisse plus faire le même genre de chose que l’invasion de l’Ukraine ».
C’est donc une guerre d’attrition que se proposent de livrer les États-Unis à la Russie sur le territoire de l’Ukraine. Pour ce faire, ils organisent à destination de l’Allemagne et de la Pologne un gigantesque pont aérien. Par centaines (bonjour la pollution!), les gros porteurs traversent l’Atlantique pour livrer munitions, missiles, drones, blindés, mortiers ou radars. Les crédits débloqués sont énormes, soixante milliards d’euros, soit une fois et demie le budget annuel de l’armée française, qui est tout de même le cinquième ou sixième budget militaire du monde, proche de celui de la Russie.
En même temps, les États-Unis prennent discrètement le contrôle militaire de l’Ukraine. pour y mener une guerre par procuration. C’est Zelenski, qui fait les déclarations dénonçant immanquablement comme des crimes de guerre toutes les actions réelles ou imaginaires des troupes russes, lorsqu'il ne pose pas pour Vogue avec sa femme. Ce sont des soldats ukrainiens qui meurent sur le front, mais ce sont les États-Unis qui commandent, qui organisent les combats et qui fournissent le matériel. Cela durera tant qu'ils trouveront des soldats ukrainiens pour combattre et ils en trouveront de moins en moins, ensuite il faudra utiliser des mercenaires ou des soldats US.
Tout a commencé sous Obama en 2014. La diplomate Victoria Nuland est alors responsable de l'Ukraine pour le département d’État. L’objectif est alors de remplacer le président Victor Ianoukovytch par un dirigeant prêt à rompre le cordon ombilical avec Moscou. Lorsque le coup d'État réussit grâce aux émeutes de Maïden et que le Donbass se soulève en réponse, les États-Unis et la Grande Bretagne envoient un grand nombre de conseillers militaires sur le front, tandis que Victoria Nuland négocie des garanties de prêt à l'Ukraine et la livraison d'une aide militaire. C''est alors que l'enregistrement d’un appel téléphonique du 28 janvier 2014 entre elle et Geoffrey Pyatt, ambassadeur des États-Unis en Ukraine fait scandale car elle y parle de la formation du prochain gouvernement ukrainien comme s’il relevait de l’autorité des États-Unis. En outre le langage employé « And you know…Fuck the EU » choque les responsables de l’UE qui ont bien dû s'en accommoder depuis, puisqu'elle est devenue, le 3 mai 2021, sous-secrétaire d’État pour les affaires politiques dans l’administration du président Joe Biden, elle qui a toujours été une partisane convaincue des livraisons d’armes à l’Ukraine.
Depuis le déclenchement de la guerre ouverte par la Russie, l’US Army épaulée par ses partenaires britanniques, canadiens et baltes et par ses sous-traitants « civils » s’est employée à externaliser la guerre. Elle a restructuré l’armée ukrainienne et elle a cherché à faire de chaque habitant un « résistant-combattant ».
Dans le Donbass, les États-Unis et la Grande-Bretagne ont construit une sorte de ligne Maginot bardées de capteurs électroniques, qui a opposé une redoutable défense décentralisée aux forces russes, appuyée sur les multiples flux d’informations dont ils disposaient grâce aux réseaux numériques US.
Les États-Unis ont réalisé en effet un maillage numérique de l'Ukraine grâce à la mise à disposition par Elon Musk de la constellation satellitaire Starlink qui a transformé les smartphones civils ukrainiens en terminaux militaires en détournant leurs applications. Ainsi l’application Diia utilisée à l’origine pour numériser les documents officiels des Ukrainiens est utilisée depuis le début de la guerre pour géo localiser les postes de commandement russes en temps réel. Pour protéger leur toile numérique géante des cyberattaques russes, les États-Unis se reposent en outre sur leurs sociétés privées de cyber sécurité, à l'instar d'une filiale de Google à laquelle l'Ukraine a sous-traité la guerre numérique.
S'il parait évident que ce sont bien les États-Unis qui conduisent la guerre en Ukraine, il reste à convaincre l'opinion publique mondiale que c'est une guerre juste et gagnable, puis à convaincre l'opinion européenne que l'Europe doit en payer la facture, alors que l'on voit déjà que les États-Unis ont renoncé à en faire supporter le poids à l'Afrique lorsqu'ils ont accepté de mauvais gré les livraisons par bateau des céréales ukrainiennes et russes et que l'UE a accepté que la Hongrie continue de se fournir en gaz russe.
En effet, il reste à savoir si la stratégie indirecte de Washington résistera à l'épreuve du temps. Au Donbass, sous le pilonnage de l'artillerie russe, les troupes ukrainiennes perdent des centaines d'hommes chaque jour, reculent, capitulent, désertent ou trahissent, comme ce général ukrainien qui, avant de passer à l'est, a livré deux de nos quinze Caesar aux Russes, un camouflet que n'ont pas encore osé révéler les médias français.
Mais si le front ukrainien finissait par craquer sous la pression de l'armée russe et de son artillerie, les États-Unis se risqueront-ils, pour laver l'affront, à engager directement les forces de l’Otan ?
Pourtant, qui croit que la Russie acceptera de se laisser vaincre ? Un match nul semblant la seule solution acceptable pour les deux parties, il reste donc à ce qu'elles acceptent d'en convenir le plus tôt possible pour le bien de l'Ukraine.
NB: une grande partie de la documentation utilisée dans ce billet provient des articles du spécialiste de la défense, Meriadec Raffray.