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Le blog d'André Boyer

QUI VEUT TUER LE BÉBÉ IFTG?

27 Juin 2022 , Rédigé par André Boyer Publié dans #INTERLUDE

QUI VEUT TUER LE BÉBÉ IFTG?

J’ai écrit, en conclusion de mon dernier billet sur le sujet, que notre premier obstacle pour faire naitre le bébé IFTG, fut l’Ambassade de France.

 

En effet, naïf est celui qui croit que le plus difficile, dans la réalisation d’un projet, est d’avoir une bonne idée. Il va rapidement découvrir que sa « bonne idée » n’est pas la bienvenue, tout simplement parce qu’elle dérange les plans de ceux qui n’ont pas été associés à la création du projet.

Car tout projet, selon la profonde pensée de Joseph Schumpeter, s'inscrit dans un processus de "destruction créatrice" qui consiste à remplacer une action et une structure par une autre, plus efficace, mieux adaptée à une nouvelle situation. Le jeu, pour faire avancer le projet, consiste alors à engranger progressivement des alliés qui neutralisent les ennemis.

Dans une période de changement profond des rapports entre la Tchécoslovaquie et la France en 1990, notre projet se proposait d'offrir une formation française à la gestion aux cadres tchécoslovaques, dans le cadre de l'économie de marché. Au début du moins, il était nécessaire de prendre en charge les coûts de la formation par la partie française car les étudiants et les entreprises n’avaient pas les moyens de les payer.

Cependant, tout crédit affecté à l'IFTG avait un impact négatif sur les autres projets de l'Ambassade de France à Prague, qui n'en manquait évidemment pas dans cette période de changement. Il fallait donc s'imposer, à Paris et à Prague, face à d’autres acteurs et au début, nous manquions d’alliés. 

À Paris, la FNEGE avait des relations profondes et suivies avec le Ministère des Affaires Étrangères (MAE), qui auraient dû lui assurer une subvention régulière pour le programme de formation de l’IFTG. Mais le MAE était à cette époque concurrencé par la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD), créée et dirigée par Jacques Attali et qui détenait le leadership sur l’attribution des crédits aux Pays de l’Est.

Notre programme était-il prioritaire pour le MAE ? Officiellement oui, mais officieusement nous étions concurrencé par le Parti Socialiste qui avait besoin de fonds. Une future Ministre et un futur dirigeant du CNPF, que je ne nommerai pas, dirigeaient une filiale du PS chargée d’aider les hauts fonctionnaires des Pays de l’Est à faire évoluer leurs pratiques en y intégrant une logique libérale. Le problème pour nous était qu’ils voulaient en tirer de gros bénéfices pour le Parti Socialiste (PS) sous forme de nombreux séminaires surfacturés et ils cherchaient pour se faire à accaparer les fonds disponibles pour la coopération avec les pays de l’Est. 

Cette situation provoqua des échanges violents au MAE entre les deux dirigeants du PS d’une part, la FNEGE et moi-même d’autre part, lors d’une réunion au MAE ; eux nous reprochaient d’organiser un programme inadapté et nous, nous les accusions de corruption. Comme ils étaient très influents, ils obtinrent que soit effectué un audit à charge contre le programme IFTG, qui conduisit, afin de le couler, à le rattacher à l’IAE de Toulouse, qui en ignorait tout.

Pendant ce temps, Hana Machková gérait avec la plus grande habileté la crise de l’IFTG à Prague. Elle devint très proche des diplomates en poste, partageant leurs préoccupations et ne prenant officiellement pas partie dans le conflit qui opposait la FNEGE et moi-même avec les fonctionnaires proches du PS au MAE. Elle laissa passer l’orage, se jouant de tous les acteurs.

Finalement, son habileté jointe à sa détermination et à la nôtre eurent raison des magouilles politico-financières qui environnaient à l’époque les opérations du MAE dans les pays de l’Est. L’IFTG reçut des fonds suffisants pour financer les déplacements et les cours des professeurs français ; sa gestion fut clairement confiée à la FNEGE et son diplôme délivré en coopération avec l’IAE de Nice puis avec l’IAE de Lyon.

Quelques années plus tard, les fonds versés par le MAE se mirent à diminuer mais l’IFTG avait appris à s’adapter et rien ne vint ternir son succès qui fut rapidement reconnu. Hana Machkovà reçut la médaille du Mérite puis la Légion d’Honneur. Elle devint certainement l’une des Tchèques les plus connues et les plus respectées à l’Ambassade de France.

Mieux encore, l’équipe du petit l’IFTG se révéla si efficace et si unie qu’elle se hissa, presque tout entière, à la tête de l’université qui l’hébergeait, Vysoká škola ekonomická v Praze, (VŠE) qui était presque mille fois plus grande, en termes d’effectifs étudiants, que l’IFTG. Hana Machkovà devint Recteur de VŠE, fut réélue et est actuellement encore Vice-Recteur chargé des échanges internationaux.

 

Ce succès d’Hana Machkovà est le symbole mérité de celui de l’IFTG qu’elle a totalement incarné, un IFTG qui est aujourd’hui reconnu par le MAE comme étant la plus grande réussite des programmes de formation qu’il a soutenu en Europe de l’Est…

 

À SUIVRE

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