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Le blog d'André Boyer

LES MEDIAS DEMASQUÉS

11 Décembre 2016 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

Une des principales leçons de l’élection de Donald Trump, en attendant de pouvoir cerner sa politique, réside dans l’étonnant échec des médias.

 

Étonnant, car on pouvait s’attendre à l’élection triomphale d’Hillary Clinton, avec 98% des médias engagés en sa faveur. Il était cohérent en effet de créditer les médias d’une bonne connaissance des enjeux de l’élection, des programmes des deux candidats et de l’état de l’opinion publique américaine. Mais finalement, ce sont justement ces 98% qui sont révélateurs du rôle des médias dans l’élection américaine.

Normalement, les médias auraient dû approximativement partager leurs appuis entre les deux candidats, car on ne peut pas croire qu’ils étaient assez sourds et aveugles pour ne pas avoir compris que l’élection de Trump était possible. Mais ils ont jugé que l’accession au pouvoir du candidat républicain était dangereuse, soit pour les Etats-Unis, soit pour sa classe dirigeante, soit pour eux-mêmes et ils ont décidé en conséquence de s’y opposer au risque d’être désavoués par les électeurs. Il est remarquable en outre d’observer  que la quasi totalité des médias du monde aient  emboité le pas aux médias américains : tous anti Trump !

Le résultat spectaculaire de cette prise de position unanime des médias contre Trump a été leur désaveu par cinquante pour cent des électeurs américains, non seulement en raison de la rencontre entre l’opinion publique et la capacité de persuasion du candidat Trump, mais aussi du fait de leur propre engagement. Car l’opinion publique a perçu cet engagement des médias comme une sorte de déclaration de guerre contre elle : on lui déniait le droit de penser par elle-même (« les déplorables »).

Après cette démonstration éclatante, les médias apparaissent clairement comme les représentants de la classe dirigeante, comme l’a démontré le vote des électeurs du District of Columbia (Washington D.C.) qui se sont prononcés à 92,8% pour Hillary Clinton, ce qui signifie que les électeurs proches du pouvoir et les médias étaient en concordance parfaite.

C’est une situation nouvelle.

Si de tout temps, nombre de médias se sont fait les avocats du pouvoir en place, il a toujours subsisté une certaine diversité d’opinion et c’est pour cela qu’on les appelle « médias », des institutions ou des moyens impersonnels permettant une diffusion large et collective d’informations ou d’opinions, des opinions forcément contradictoires. Or, avec le temps, les médias ont été rassemblés au sein de groupes contrôlés par quelques financiers. Les journalistes de leur côté, de peur de perdre leur emploi, sont devenus de plus en plus dociles et ont dû remplacer, de gré ou de force, le souci de l’information par la volonté de commenter les évènements dans un sens favorable au pouvoir.

Pour prendre le cas de la France, les médias sont si étroitement sous contrôle qu’aucun journaliste français n’ose afficher de préférence partisane en dehors du « politically correct » qui correspond en gros à celui de SciencesPo Paris. On l’observe avec limpidité lorsque les journalistes se croient obligés d’interviewer avec une hostilité sous-jacente les représentants du FN, afin d’être disculpés de tout soupçon de complaisance pour des thèses qu’ils qualifient eux-mêmes de « nauséabondes ».

Aussi l’étonnement des médias face à l’opinion publique étonne. J’entendais tout récemment une sorte d’ombudsman interroger la rédaction de France Info au sujet du siège d’un quartier d’Alep. L’ombudsman s’étonnait lui-même que les auditeurs contestent la version de la guerre présentée par France Info qui consiste à attribuer toute la faute de la guerre et des massacres à Assad et à ses alliés russes et à présenter les rebelles comme des gentils. Le responsable de la rédaction a en gros répondu qu’il connaissait son métier et  que la version qu’il présentait était la bonne. En somme, « Circulez, il n’y a rien à voir »

Ce journaliste convaincu que ses raisons sont les bonnes et que les auditeurs se trompent confirme en retour ces derniers dans leur opinion envers les médias, considérés comme autistes et enrégimentés. L’arrogance médiatique a pour effet de créer une rupture entre les médias et l’opinion. S’il est impossible pour l’opinion d’être entendue des médias, il est en retour tout aussi impossible pour les médias d’influencer l’opinion, sinon négativement. Si bien que l’on constate de plus en plus souvent que les électeurs votent contre le camp des médias, ce qui pourrait bien expliquer, au moins en partie, les résultats des votes sur la constitution européenne en 2005 jusqu’à l’élection de Trump en passant récemment  par le referendum sur le Brexit.

C’est qu’en s’emparant des médias, les financiers, forcément proches du pouvoir, ont fait disparaître la pluralité des opinions, accélérant en conséquence la disparition programmée de l’autorité des médias (voir mon blog sur La fin des politiques). Cette autorité est morte, elle ne reviendra plus, l’opinion se forgeant désormais au travers de divers échanges sur Internet, que le pouvoir politique s’efforcera en vain de contrôler.

Les journalistes ne sont plus que des agents publicitaires du pouvoir et ils doivent en respecter les règles à commencer par celle qui consiste à ne pas provoquer l’hostilité des électeurs, à ne pas lui faire la leçon et à ne pas le mépriser ouvertement. Tant que les médias n’auront pas compris qu’ils sont ni plus ni moins crédibles qu’une annonce publicitaire, ils se fourvoieront dans un rôle qui ne leur sera plus jamais reconnu, celui d’intermédiaire entre le pouvoir et les citoyens.

 

Car derrière ce fiasco des médias, se profile l’avènement d’un nouveau type de pouvoir dont on commence à discerner les contours, plus direct, plus transversal, plus instable

 

 

 

 

 

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