LA MARINE ET LE SIÈGE DE LOUISBOURG
6 Janvier 2017 , Rédigé par André Boyer
Une fois que les Anglais eurent débarqué sur l’Ile Royale le 8 juin et que les troupes françaises se furent repliées dans Louisbourg, les mille deux cent hommes de Wolf prirent possession le 12 juin des retranchements français extérieurs et du phare qui dominait l’entrée du port.
Le 19 juin, les batteries anglaises fortes de 70 canons et mortiers commencèrent à ouvrir le feu sur la forteresse détruisant des murs et des constructions. Les canons français répliquent vigoureusement. Le 26 juin, les Anglais prennent Green Hill, une position qui domine la forteresse, malgré le bombardement des pionniers anglais par les canons de Louisbourg et par les navires français de Beaussier de l'Isle.
Pour que les lecteurs se rendent compte de la puissance et de la combativité de la Marine Française au milieu du XVIIIe siècle et qu’ils écartent de leur esprit, l’idée, instillée par Voltaire, que la France a livré facilement la Nouvelle-France aux Anglais, une brève biographie de Beaussier de l’Isle me paraît nécessaire.
Louis-Joseph de Beaussier de l'Isle (1701-1765), est un officier de marine qui appartient à l'une des plus anciennes familles de Toulon. Entré dans la Marine Royale en 1724, il commande, lors de la Guerre de Sept Ans, une escadre de six bâtiments, deux navires de guerre, L'Aquilon de 40 canons et La Fidèle de 24 canons et quatre bâtiments de transports qui acheminent à Québec le marquis de Montcalm, ses officiers, ses 1 500 hommes de troupes et des sommes considérables en numéraire pour éviter que les troupes n'aient pas à souffrir de la dépréciation du papier monnaie au Canada. Il quitte Brest le 14 mars 1756, met hors de combat à hauteur de Rochefort, un vaisseau anglais de 56 canons et jette l'ancre en rade de Québec au mois de mai. Il réussit ensuite, malgré l’escadre anglaise qui tente de lui barrer le passage, à entrer à Louisbourg le 26 juillet où il dépose les sommes d'argent qu'on lui avait confiées et en repart le lendemain. Son vaisseau, Le Héros, est attaqué par deux vaisseaux anglais, le HMS Grafton et le HMS Nottingham, accompagnés de deux frégates. Il leur tient si bien tête qu’au bout de six heures de combat, les assaillants se retirent très endommagés. Il est alors contraint de revenir à Louisbourg pour réparer et soigner les blessés, car il compte 48 hommes tués et 48 blessés, et lui-même est blessé à la jambe. Le 13 août, il remet à la voile pour aborder à Port-Louis le 6 septembre, avec huit prises en mer et 400 prisonniers et regagne Brest fin septembre en trompant à nouveau la vigilance des Anglais.
D’abord empêché par la maladie, il est chargé en mars 1758, à la tête de l’escadre qu’il commande, de voler au secours de Louisbourg. Des vents contraires retardent jusqu'au 10 Avril son départ de Brest avec quatre vaisseaux accompagnés d'une frégate et d’un bataillon de troupes suisses. Après une traversée de quatorze jours seulement, il atteignit sa destination en échappant à la flotte anglaise. Bloqué dans le port par cette dernière, il proposa de tenter une sortie le 8 juin, mais le Conseil de Louisbourg, qui avait désespérément besoin des canons de ses navires, lui refusa son assentiment.
Il participe ensuite à la défense de la place au cours de laquelle il perd ses cinq vaisseaux. Fait prisonnier avec toute la garnison le 27 juillet 1758, il est remis en liberté en 1762 et reçoit le commandement du port de Brest avant de recevoir mission en avril 1763 de reprendre possession de la Martinique, de la Guadeloupe et de Sainte-Lucie rendues à la France par le traité de paix de Paris. Le 1er octobre 1764, le duc de Choiseul le promeut au grade de chef d'escadre en reconnaissance de ses services, mais il décède peu après, le 4 juin 1765.
Voilà pour l’histoire de Beaussier, qui fut l’un des défenseurs de Louisbourg. Car les marins se battirent comme des beaux diables et Beaussier n’est pas un exemple isolé. Le 9 juin, Jean Vauquelin (1728-1772) réussit à entrer dans le port de Louisbourg avec la frégate Aréthuse de 30 canons. Il réussit en juillet à forcer une seconde fois le blocus anglais. L‘année suivante, Jean Vauquelin à bord de la frégate Atalante, dont il avait reçu le commandement, participe aux opérations navales en marge du siège de Québec, puis à la victoire de Sainte-Foy avant d’aider le chevalier de Lévis à tenter de reprendre Québec. Mais il est poursuivi par une division anglaise, doit s’échouer et incendier sa frégate lors de la bataille de Neuville. Fait prisonnier par les Anglais le 16 mai à Pointe-aux-Trembles, il est libéré et rentre en France où il reprend du service jusqu’à Madagascar.
Tels étaient les marins qui se battaient à Louisbourg.