LES ULTRAS FACE AU POUVOIR CENTRALISÉ
14 Octobre 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE
Le résultat politique des Cent Jours fut de favoriser l’arrivée des ultras à la Chambre.
Fouché et Talleyrand furent balayés par une Chambre presque totalement royaliste, élue selon un régime censitaire qui n’accordait le droit de vote qu’à environ un électeur sur cent citoyens. Le 14 août 1814, les ultras obtiennent 350 députés sur les 402 siéges de ce qui constitue la « Chambre introuvable » selon la propre expression de Louis XVIII.
Le nombre d’électeurs avait fortement régressé par rapport aux divers électorats de la période 1791-1814 : cent mille français payant au moins 300 francs de contribution avaient le droit de vote, et quinze mille d’entre eux étaient éligibles parce qu’ils payaient au moins 1000 francs de contribution. Compte tenu de l’usage qui avait été fait jusque-là du suffrage universel, personne ne se scandalisait du système à l’époque.
Il y eut 48000 votants sur les 72000 électeurs de l’époque, ce qui est une proportion remarquablement élevée par rapport à celles qui avaient cours durant la période révolutionnaire. On condamne aujourd’hui l’excès de royalisme de ces députés, leur cléricalisme, leur zèle en faveur de l'aristocratie et du clergé, mais il faut reconnaître qu’ils avaient eu de quoi être traumatisés par les événements du quart de siècle précèdent.
Ils prononcèrent le bannissement des Conventionnels qui avaient voté la mort de Louis XVI, mais d’autres qu’eux n’auraient pas hésité à les guillotiner. Cette Chambre ne dura guère plus d’un an, jusqu’à ce qu’elle soit dissoute par Louis XVIII qui la trouvait trop réactionnaire.
Pour la diriger, Louis XVIII fit nominalement appel au constructeur d’Odessa, le duc de Richelieu qui avait la confiance des alliés, mais c’est Élie Decazes qui se chargea de la politique intérieure.
Les ultras de l’Assemblée rêvaient d’un État décentralisé qui s’appuierait sur une aristocratie indépendante. Ils engagèrent aussitôt une guérilla parlementaire contre le gouvernement qui se heurta de front à l’État qui, monarchiste ou républicain, se refuse toujours à abandonner une partie de ses pouvoirs à quelque groupe que ce soit.
Lors du débat sur l’amnistie, présentée par le roi en janvier 1816, l’assemblée imposa le bannissement de 38 régicides ayant occupé des fonctions publiques. C’est à cette occasion que monsieur de Béthisy prononça l’apostrophe « Vive le roi quand même ! ».
Finalement, le 5 septembre 1816, Louis XVIII se résolut à dissoudre la « Chambre introuvable », cédant aux conseils de Decazes et aux pressions des alliés. Malgré le soutien de Chateaubriand qui plaida pour le parlementarisme dans la brochure intitulée « De la monarchie selon la Carte » que fit saisir le gouvernement le 18 septembre 1816, les ultras furent battus le 4 octobre 1816 avec l’aide des préfets par les élus favorables au gouvernement. 92 ultras seulement furent élus contre 146 en faveur du Ministère. Ce sont encore les députés ultra, bien libéraux par certains aspects, qui demandèrent la levée de la censure le 2 décembre 1816.
Le Président du Conseil des Ministres, Elie Decazes, prit la tête du quatrième ministère de Louis XVIII en s’efforçant de suivre une politique de compromis autour d’un pouvoir fort qui visait à réconcilier la France républicaine et la France monarchiste.