LA VALEUR DE LOUISBOURG
3 Mars 2017 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE
La construction monumentale de Louisbourg n’échappa pas aux détournements de fonds de la part des administrateurs.
On employa parfois des matériaux de mauvaise qualité pour la construction. De plus, il fallut importer une bonne partie depuis la France des matériaux tels que le grès, l’ardoise ou le verre. La prévarication et l’éloignement rendirent dispendieux le coût de la construction de la forteresse, qui s’éleva au total à plus de 30 millions de livres. Louis XV s’en plaignait régulièrement : « Est-ce que les rues y sont pavées d'or? Va-t-on voir bientôt poindre ses tours à l'horizon de Paris?»
La forteresse de Louisbourg fut surnommée la Gibraltar de l'Amérique du Nord, parce qu'elle était la plus importante place forte française du Continent nord-américain, avec à la fin prés de quatre cent canons. Cependant les défenses de la ville étaient conçues pour résister à des tirs d'artillerie provenant de vaisseaux de guerre. La partie arrière de la forteresse était vulnérable par voie de terre, encore qu’il y avait une cinquantaine de canons à Port-Toulouse au sud et à Port-Dauphin au nord.
Dés 1725, la nouvelle ville de Louisbourg était devenue l'un des principaux ports de pêche de la Nouvelle-France, si bien qu’un millier d'emplois étaient reliés à la pêche. De nombreux marchands importaient le sel, le vin et les produits manufacturés de France ainsi que le sucre, la mélasse, le rhum, le café et le tabac des Antilles. Louisbourg était alors plus achalandé que Québec. Des navires arrivaient de France, du Canada, de l'Acadie et des Antilles, et des caboteurs de la Nouvelle-Angleterre, mouillaient continuellement dans son port qui accueillait annuellement quelque cent cinquante navires.
En outre, le port de Louisbourg servait de base d'entraînement pour la marine française. Il était également une importante base de ravitaillement et de réparation pour les flibustiers français qui attaquaient les vaisseaux des marchands anglais dans l'Atlantique Nord, car il avait l'immense avantage d'être libre de glace toute l'année et d’être bien protégé.
En somme, Louisbourg était à la fois une forteresse, un poste de pêche à la morue et un vaste comptoir, où la France, le Canada, les Antilles et la Nouvelle-Angleterre échangeaient des marchandises. La France en a en a tiré de grands avantages. Si elle a dépensé 30 millions de livres pour construire Louisbourg, la pêche à la morue à elle seule a rapporté chaque année trois ou quatre fois plus, sans compter le revenu procuré par le passage des navires marchands.
La petite colonie qui gravitait autour de Louisbourg était à ce point rentable que le Canada, par comparaison, paraissaient une dépense inutile, car le marché de la fourrure restait limité
C’est pourquoi le ministère de la Marine accordait énormément d'importance à l'île Royale et au port de Louisbourg. En février 1715, le ministre de la Marine, le comte de Pontchartrain déclarait : « Si la France perdait cette Isle, cela serait irréparable et il faudrait par une suite nécessaire abandonner le reste de l'Amérique septentrionale.»
D’un côté, le Canada et la Louisiane empêchaient l'expansion des colonies britanniques en Amérique du Nord, mais le maintien de ces deux colonies françaises dépendait beaucoup de celui de Louisbourg.