L'IRRUPTION DU NEW SPACE
10 Décembre 2022 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE
La compétition entre l’URSS et les États-Unis fait que l’on regarde la conquête de l’espace en termes stratégiques plutôt qu'économiques, alors que l'aspect économique prend de plus en plus d'importance dans l'activité spatiale.
Dans le passé, plusieurs pays ont tenté de développer de nouvelles fusées, de nouvelles sondes, de nouveaux satellites pour imprimer leur marque dans l'histoire, pour renforcer leur prestige et pour en tirer des avantages stratégiques.
L'Europe mais aussi des pays comme la Chine ou l’Inde ont développé leur programme spatial. En 2003, la Chine a lancé son premier vol habité avec la capsule Shenzhou 5 et avec son programme Chang’e, Pékin espère devenir le premier pays asiatique à envoyer un homme sur la Lune. Le programme spatial de l’Inde a débuté dans les années 1960 avec un premier satellite construit à l’aide de la technologie soviétique. Le programme s'est poursuivi avec le lancement de la sonde Mangalyaan en orbite autour de Mars.
La conquête de l’espace pose évidemment une question économique. L’ordre de grandeur des dépenses spatiales est fort différent selon les pays. Les États-Unis dépensent plus de quarante milliards de dollars chaque année pour leurs programmes spatiaux, l’Europe sept milliards et la Russie comme la Chine environ cinq milliards. Ces dépenses n’ont pas que des objectifs stratégiques mais aussi économiques. C’est ainsi que la Chine développe depuis les années 1980 des lanceurs capables de placer des satellites en orbite géostationnaire, avec pour objectif de générer des revenus pour financer le programme spatial, tandis que les États-Unis utilisent l’invention du GPS pour financer le leur.
Car de nouveaux secteurs stratégiques et économiques se sont développés qui dépendent désormais de l’espace, comme les télécommunications, la cartographie et l’aide à la navigation, mais aussi l’observation météorologique et la surveillance des catastrophes naturelles. Chaque jour apparaissent de nouveaux usages des données issues des satellites d’observation de la terre : scruter l’état des sécheresses ou le rendement des récoltes, surveiller la vitesse de déforestation ou d’érosion des plages, vérifier le taux de remplissage de parkings ou observer l’état de plateformes offshore.
Par rapport aux acteurs publics, les acteurs privés jouent un rôle croissant dans la guerre économique qui s’est engagée dans l’espace. Ainsi la constellation de satellites que SpaceX met actuellement en orbite a pour objectif de fournir une couverture Internet mondiale, y compris dans les endroits les plus isolés, permettant de faire fonctionner les lignes téléphoniques, mais aussi les véhicules autonomes. Dans cette guerre économique, les États-Unis ont inventé le concept de New Space, défini comme l’écosystème formé autour des sociétés privées et publiques américaines qui conçoivent et utilisent leurs propres lanceurs, et peuvent opérer des flottes de satellites, par opposition à l’Old Space dominé par les organisations publiques. Pour eux, la transformation de l'Old Space en New Space résulte de l’ouverture de l’espace à des acteurs privés qui ouvrent de nouveaux champs d’application avec des objectifs financiers.
Le New Space s'est traduit depuis une dizaine d'années par la multiplication de nouveaux acteurs spatiaux souvent issus du monde numérique, des innovations technologiques majeures telles que la réutilisation des équipements, la miniaturisation des composants, l'utilisation de nouveaux carburants comme le méthanol et la motorisation électrique, l'utilisation de l'impression 3D comme système de production et finalement la baisse du coût de l’espace
On peut donc écrire que le New Space, c'est l’ubérisation d'une industrie spatiale qui génère des nano satellites au prix de quelques dizaines de milliers d’euros par unité contre plusieurs dizaines de millions d'euros pour les satellites de télécommunication classiques.
À SUIVRE