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Le blog d'André Boyer

Sed quia custodiet ipsos Custodes?

6 Janvier 2013 Publié dans #HISTOIRE

Le 30 décembre dernier, je publiai mon dernier blog de l’année 2012, «  Prélude au drame de la Convention », qui relatait comment la Convention mettait en place le régime de la Terreur en s’appuyant sur une faible minorité de la population.

 

louis16_execution.jpgCette faible minorité devrait nous inspirer réflexion, en nous montrant qu’il n’est nul besoin d’être majoritaire pour gouverner le pays : il suffit pour cela de s’emparer des manettes de l’État centralisé.

C’est encore le cas aujourd’hui et ceux qui croient qu’une révolte de la population peut contraindre un gouvernement à revenir sur ses décisions les plus iniques ou les plus stupides se trompent de pays. Nous n’habitons pas dans les pays scandinaves mais en France, ou le Pouvoir est tout puissant et le citoyen impuissant.  Regardez ce qui s’y est passé en 1793 :

Le procès de Louis XVI commence. Tandis qu’en province des manifestations ont lieu en faveur du roi, les Girondins ont peur à Paris d’être accusés d'antirépublicanisme s’ils ne votent pas sa condamnation, une condamnation que la Montagne souhaite afin de brûler les vaisseaux des Conventionnels. Cette situation politique entraînera logiquement la condamnation à mort de Louis XVI.

Le 15 janvier 1793, c’est unanimement, c’est dire combien la pression des tribunes était forte, que les députés déclarent Louis Capet coupable de conspiration contre la sûreté générale de l'État. Seulement trente-trois députés considèrent qu’ils n’ont pas à le juger, tout en n’osant pas le déclarer non coupable : les procès staliniens datent très exactement de la Convention.

Le 15 janvier, les Girondins résistent encore faiblement en demandant qu’il soit condamné par les assemblées primaires de toute la France. L’hostilité des tribunes, en d’autres termes non le peuple de France mais les délégués télécommandés par la Commune de Paris et la Montagne, fait rejeter cette proposition par 423 voix contre 283. 


Du 16 janvier au 17 janvier, les 721 députés présents défilent pour se prononcer à haute voix sur la sentence. Malgré la pression des tribunes, le vote de la Convention ne donne que 361 voix pour la mort sans condition, soit une seule voix de majorité, 26 voix pour la mort avec sursis, 43 voix pour la mort avec sursis sous conditions et 291 voix pour un châtiment autre que la mort.


Les Girondins demandent alors le sursis, mais la partie est déjà finie et ce sursis est refusé le 20 janvier 1793, par 380 voix contre 310 voix.

Louis XVI est exécuté par le moyen de la guillotine, le 21 janvier à 10 heures 10, place de la Concorde, alors appelée place de la Révolution.

La marquise de la Tour du Pin, qui logeait à Passy, hors les murs de Paris, conte avec simplicité dans ses remarquables mémoires (page 180) cette matinée particulière : « Le matin du 21 janvier, les portes de Paris furent fermées, avec ordre de ne pas répondre à ceux qui en demanderaient la raison à travers les grilles. Nous ne la devinâmes que trop, et appuyés  mon mari et moi, sur la fenêtre de notre maison qui regardait Paris, nous écoutions si le bruit de la mousqueterie ne nous apporterait pas l’espoir qu’un si grand crime ne se commettrait pas sans opposition. Frappés de stupeur, nous osions à peine nous adresser la parole l’un à l’autre [] Hélas le plus grand silence continua à régner dans la ville régicide. À 10 heures et demie, on ouvrit les portes, et tout reprit sont cours comme à l’ordinaire. Une grande nation venait de souiller ses annales d’un crime que les siècles lui reprocheront et pas une petite habitude n’était dérangée…»

 

Les plus grands crimes se commettent en silence, dans l’indifférence générale, mais leur écho résonne à l’infini dans le cours du temps.

 

NB: Sed quia custodiet ipsos Custodes ? = Mais qui gardera les gardiens ? (Juvénal, Satires, 101-127) 


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