GOOD KILL
3 Mai 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #CULTURE
Hier soir, nous sommes allés voir le film Good Kill.
Je ne vais pas en profiter pour faire de ce blog une critique cinématographique dans la mesure où la valeur artistique, assez moyenne à mon avis, de ce film ne m’intéresse pas.
Certes, le réalisateur Andrew Nicoll est bien connu. Il a déjà réalisé Bienvenue à Gattaca en 1997, Lord of War en 2005. Les acteurs sont de qualité, que ce soient Ethan Hawke, Bruce Greenwood, Zoë Kravitz ou January Jones, mais la dramaturgie du film est simple : un aviateur qui se retrouve derrière une console pour tuer à distance des « ennemis » qui lui sont désignés par la CIA. Alors, cela engendre chez lui un état dépressif, tout d’abord parce qu’il ne vole plus et qu’il réalise, assez lentement à mon avis, qu’il est tout simplement en train de commettre des assassinats sur commande. Du coup, il boit et son ménage va mal.
On le comprend mais à sa place j’aurai simplement refusé de faire ce boulot, ce qui évidemment aurait réduit la durée du film !
L’intérêt du film est tout d’abord visuel. Le spectateur est éberlué par la qualité des images dont disposent les opérateurs militaires, installés dans des containers climatisés au milieu d’une base aérienne proche de Las Vegas, images grâce auxquelles ils peuvent suivre tous les faits et gestes, voire les expressions, des personnes qu’ils observent et qu’ils vont le plus souvent assassiner en quelques secondes, dix secondes s’écoulant exactement entre la décision de tuer et la mort.
Une fois cette prise de conscience opérée, c’est l’indignation qui m’a suffoqué. Voilà des gens, avec leurs états d’âme c’est entendu, qui assassinent leurs prochains qu’ils voient, circonstance aggravante, mourir sous leurs yeux, simplement parce qu’un bureaucrate quelconque de la CIA installé à Langley, Virginie (très beau la Virginie, très vert, très calme) a décidé que ces gens étaient des ennemis des USA, qu’ils représentaient un danger « immédiat » pour la « sécurité » du « peuple » américain !
Je mets tous ces mots entre guillemets parce qu’ils se discutent tous et que la question est là, dans le prétexte et l’arbitraire que ces mots charrient.
Alors, on peut s’intéresser aux états d’âme de l’assassin, mais c’est regarder le doigt qui montre la lune. C’est l’assassinat qu’il faut scruter. De quel droit, ces gens décident de tuer d’autres gens ? Dans le film, l’adjointe du commandant a une remarque de bon sens, avant de démissionner : « ce que vous faites, c’est sans fin ». Vous tuez des gens dont les proches vont chercher à se venger et que vous allez tuer aussi, provoquant de nouvelles vengeances. Où allez vous, les assassins ? Droit dans la haine, l’absurde, la mort.
Bravo le système américain. Et il va être dur à détruire, car lorsque le commandant sabote un ordre monstrueux (tirer sur les gens qui viennent dégager les corps), son supérieur le menace d’une enquête impitoyable de la CIA. On comprend bien que ces salauds qui sont directement impliqués dans ces assassinats feront tout pour ne pas être mis en accusation. Voyez leur acharnement contre Edward Snowden qui a révélé les pratiques d’espionnage massif et tous azimuts de l’administration américaine.
Que pouvons nous faire en France ? Sortir de l’Otan évidemment, mais pas facilement, après que Sarkozy nous y ait stupidement réintégré en 2009. Car les assassins dissimulés feront leur possible pour nous en empêcher et pour neutraliser ceux qui s’y risqueront, comme ils le feront pour tous ceux qui dénoncent leurs crimes.
Heureusement pour lui, Andrew Nicoll est célèbre, il a l’excuse de la création artistique et il est américain. Sinon, avoir commis ce film serait une raison bien suffisante pour que la CIA lui envoie un missile depuis un drone…