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Le blog d'André Boyer

RÉCUPÉRER LOUISBOURG

18 Avril 2017 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE

RÉCUPÉRER LOUISBOURG

 

La formule fameuse de Voltaire au sujet du Canada, qui ne représentait que «quelques arpents de neige» exprime plus de dépit que de mépris pour la Colonie, car elle est contradictoire avec son opinion sur la prise de Louisbourg en 1745 par les Britanniques.

 

Voici ce que Voltaire écrivait à ce sujet:

« Je veux parler du siège de Louisbourg ; ce ne fut point une opération du cabinet des ministres de Londres, ce fut le fruit de la hardiesse des marchands de la nouvelle Angleterre. Cette colonie, l'une des plus florissantes de la nation anglaise, est éloignée d'environ quatre-vingts lieues de l'île de Louisbourg ou du Cap-Breton, île alors importante pour les Français, située vers l'embouchure du fleuve St Laurent, la clef de leurs possessions dans le nord de l'Amérique. Ce territoire avait été confirmé à la France par la paix d'Utrecht. La pêche de la morue qui se fait dans ces parages était l'objet d'un commerce utile, qui employait par an plus de cinq cents petits vaisseaux de Bayonne, de St Jean-de-Luz, du Havre-de-Grace & d'autres villes; on en rapportait au moins trois mille tonneaux d'huile, nécessaires pour les manufactures de toute espèce. C'était une école de matelots ; et ce commerce, joint à celui de la morue faisait travailler dix mille hommes et circuler dix millions de livres. »

L’évitable guerre de Succession d'Autriche conduisit finalement au statu quo ante bellum formalisé par le traité d'Aix-la-Chapelle de 1748 qui rendit à la France l'île Royale et l'île Saint-Jean.

Ce traité mécontenta fortement les colons de la Nouvelle-Angleterre qui avaient conquis Louisbourg et qui allaient répétant que la restitution de Louisbourg n'était qu'un prêt temporaire octroyé aux Français. C’est ce dont témoigne en décembre 1754, Pierre-Jérôme Lartigue, garde-magasin du roi, qui écrit à Michel Le Courtois de Surlaville, commandant des troupes à Louisbourg: «Je puis vous assurer que je leur ay souvent entendu dire qu'en nous rendant Louisbourg, ils ne nous avoient fait qu'un prest.»

L’Amérique du Nord restait donc potentiellement une zone de conflit entre les Anglais et les Français, ces derniers étant conscients que le nombre de colons était insuffisant pour assurer une défense efficace de la Nouvelle-France.

Tandis que les Français savaient dorénavant qu'ils pouvaient voir toute la Nouvelle-France leur échapper en perdant Louisbourg, les Britanniques s'étaient mis à craindre pour leurs colonies. Leur plan consistait à confiner le Canada au nord des Grands Lacs et du Saint-Laurent afin de permettre l'expansion de la Nouvelle-Angleterre, ce qui permettrait en outre de séparer le Canada de la Louisiane et de Louisbourg.

Le 9 juillet 1749, le général Edward Cornwallis fonda Halifax sur l’emplacement de Chibouctou, en langue micmac. La ville était destinée à concurrencer Louisbourg en Nouvelle-Écosse. Côté français, le nouveau gouverneur français de Louisbourg, Charles des Herbiers de La Ralière recevait quinze jours plus tard, le 23 juillet 1749, les clefs de la ville des mains du gouverneur britannique Peregrine Hopson.

La forteresse était en très mauvais état, il fallait la reconstruire et la renforcer. Il fallait aussi rétablir la pêche à la morue alors qu’il ne restait plus que sept cent habitants sur l'île Royale, des Acadiens pour la plupart.

Les Micmacs, eux, n’étaient pas contents de la fondation d’Halifax. Ils écrivirent, en version micmac et française, au gouverneur Edward Cornwallis: « Seigneur, l’endroit où tu es, où tu fais des habitations, où tu bâtis un fort, où tu veux maintenant t’introniser, cette terre dont tu veux présentement te rendre maître absolu, cette terre m’appartient ; j’en suis certes sorti comme l’herbe, c’est le propre lieu de ma naissance et de ma résidence, c’est ma terre à moi, sauvage; oui, je le jure, c'est Dieu qui me l'adonnée pour être mon pais à perpétuité [...] un ver de terre sçait regimber quand on l'attaque. Moy, sauvage, il ne se peut que je ne croye valoir au moins un tant soit peu plus qu'un ver de terre, à plus forte raison sçaurai-je me défendre si on m'attaque. Ta résidence au Port-Royal ne me fait pas ombrage. Car tu vois que depuis long temps je t'y laisse tranquille, mais présentement tu me forces d'ouvrir la bouche par le vol considérable que tu me fais. »

 

Cette missive adressée par des « sauvages » laissa les fonctionnaires britanniques de la Nouvelle-Écosse totalement indifférents. L’avenir leur montra qu’ils avaient eu tort.

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