LA PROBLÉMATIQUE DE LA BIOÉTHIQUE
22 Novembre 2018 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE
Depuis un demi-siècle, le développement de la bioéthique est marqué par la prise de conscience qu’une évaluation éthique des progrès techno-scientifiques s’impose.
De nombreuses approches alimentent la réflexion bioéthique : l’éthique kantienne, l’éthique des droits de l’homme, l’éthique utilitariste, l’éthique narrative, l’éthique du soin ou même la casuistique.
Les questions traitées par la bioéthique peuvent être purement philosophiques, telle que la question de la dignité humaine ou des limites de la liberté individuelle. Mais elles peuvent aussi concerner des questions techniques, telle que la régulation de nouveaux procédés de thérapie génique.
Des recherches en plein essor dans le domaine du numérique affectent en effet en profondeur la place et le rôle de la médecine, sollicitée par des intérêts économiques et politiques et par des demandes d’amélioration des performances individuelles, sans justification thérapeutique.
Mais ce n’est cependant pas une question nouvelle. Le terme allemand de Bio-Ethik apparaît pour la première fois dans un article de Fritz Jahr en 1927, dans l’article Bio-Ethik: Eine Umschau über die ethischen Beziehungen des Menschen zu Tier und Pflanze ». Pasteur protestant et philosophe, Jahr proposait d’étendre l’impératif catégorique de Kant touchant le respect de la personne humaine à l’ensemble des formes de vie : il en résultait un impératif bioéthique fondé sur la solidarité des humains avec le monde vivant. Son approche le conduisait déjà à définir la bioéthique comme une discipline morale rendue nécessaire par le développement des sciences et des techniques.
Cette conception annonçait la proposition de Van Rensselaer Potter dans son ouvrage Bioethics. Bridge to the Future (1971). Ce dernier proposait plusieurs définitions pour la bioéthique: nouvelle discipline éthique interdisciplinaire, science du bon usage des sciences ou tout simplement sagesse. Sa problématique était centrée autour de la survie et de l’amélioration de la qualité de vie de l’espèce humaine sur le long terme, menacées par un usage irresponsable des sciences et des techniques, notamment en raison d’une vision compartimentée et à court terme de la science.
À ce titre, Potter soulignait le clivage entre les deux cultures, scientifico-technique et philosophico-littéraire, par une séparation stricte entre les faits et les valeurs. L’erreur qu’il dénonçait consiste à séparer l’action guidée par des valeurs et des normes et la connaissance des lois et des faits scientifiquement établis qui éclaire les conditions et les conséquences de l’action. Or ce savoir scientifique, tel que la biomédecine, est excessivement spécialisé et la connaissance devient dangereuse dès lors qu’elle est entre les mains de spécialistes étroits, même s’ils sont animés de bonnes intentions.
Or les questions controversées associées à la procréation ou à la fin de vie sont à considérer en prenant en compte les problèmes plus généraux de la démographie, de l’environnement, des ressources économiques, technologiques, biologiques et ne peuvent être exclusivement focalisés sur les seuls individus en jeu.
À SUIVRE