Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog d'André Boyer

LE VENT L'EMPORTERA

11 Septembre 2022 , Rédigé par André Boyer Publié dans #ACTUALITÉ

LE VENT L'EMPORTERA

Les puissants nous impressionnent, parce qu'ils sont puissants et qu'il doit bien y avoir une raison pour qu'ils le soient.

 

Aussi, lorsqu'ils prennent une décision, à la tête d'un pays aussi important que l'Allemagne, l'une des toutes premières puissances du monde, on ne peut s'empêcher de croire qu'ils ont des raisons de la prendre, raison profonde, raison à long terme, dont les conséquences ont dû être longuement réfléchies et dont les fondements nous échappent, pauvres mortels. Il nous est presque impossible de croire qu'ils agissent pour des raisons contingentes et à court terme, tant les conséquences de leurs décisions pour les humains dont ils ont la charge sont lourdes.

Si nous sommes bien d'accord avec ce préambule, pouvez vous m'expliquer, rationnellement s'entend, pourquoi Madame Angela Merkel a décidé, en 2011, suivie par tout son gouvernement, son parlement, ses médias et son opinion publique, de mettre fin à la production d'énergie nucléaire en Allemagne?

Le 30 mai 2011, le ministre de l’Environnement, Norbert Röttgen a indiqué fièrement que l'Allemagne sera la première puissance industrielle à renoncer à l'atome en 2022, en fermant progressivement ses 17 réacteurs nucléaires. Elle a bien précisé qu'il s'agissait d'une décision irréversible prise par la coalition gouvernementale de la chancelière Angela Merkel, une décision qui allait à l'encontre, et même à l'inverse de la décision précédente prise six mois auparavant par la même chancelière de prolonger de 12 ans la durée d'exploitation des réacteurs du pays.

Nous connaissons les fondements de cette décision : le 11 mars 2011, la catastrophe de Fukushima au Japon est survenue, conséquence d'un séisme qui a beaucoup ému l'opinion mondiale en général et l'opinion allemande en particulier.

Pourtant, personne au Japon n'a directement subi les conséquences des radiations nucléaires provoquées par l'accident, ni parmi le personnel, ni parmi la population locale vivant dans un rayon de 200 kilomètres de la centrale. Depuis, le Japon a même décidé de relancer sept nouveaux réacteurs nucléaires en plus des dix autres déjà remis en service.

Pourtant, en Allemagne, un accident semblable à celui de Fukushima aurait eu fort peu de risque de se produire, car les risques sismologiques y sont très faibles.

Pourtant, ses centrales nucléaires lui permettaient de satisfaire 22% de ses besoins en électricité.

Mais Angela Merkel avait déclaré à la presse le 30 mai 2011 : « Notre système énergétique doit être changé de façon fondamentale et peut l'être. Nous voulons pour l'avenir une énergie plus sûre, et en même temps fiable et économique ». Elle se souvenait que, lorsqu'elle avait décidé à la fin 2010 de prolonger la durée de vie des plus anciennes centrales du pays, elle avait provoqué une flambée du sentiment anti-nucléaire en Allemagne, qui s'était traduit par des manifestations massives. Et, le 27 mars 2011, son parti avait subi une cuisante défaite contre les Verts lors d'un scrutin régional dans le Bade-Wurtemberg, fief électoral des conservateurs. Elle en avait conclu qu'il valait mieux, électoralement parlant, avoir tort avec les Verts plutôt qu'avoir raison contre eux.

Vingt ans plus tard, le 31 décembre 2021, juste avant le déclenchement de l'opération russe en Ukraine, la moitié de la capacité nucléaire allemande restante, trois réacteurs nucléaires sur six encore en activité, a été mise hors circuit, soit l'équivalent d'un millier d'éoliennes, malgré la crise énergétique qui sévissait déjà en Europe. Les Allemands persistaient toujours dans leur décision. Ils prévoyaient de fermer, fin 2022, les trois dernières centrales du pays et déjà, fin 2021, ils provoquaient, en raison de cette fermeture, une forte hausse du prix du gaz en Europe et donc de celui de l'électricité, du fait du système pervers qui relie l'un à l'autre sur le marché européen.

Cette décision, fin 2021, entrainait aussi un accroissement des émissions de CO2 d'environ 40 millions de tonnes par an, aux antipodes des objectifs écologiques affichés.

L'Allemagne persistait dans son combat énergétique contre la France, cherchant à l'empêcher d'investir dans le nucléaire. Puis, du fait de la guerre en Ukraine, l'Union Européenne, suivie par son Parlement a classé en juillet 2022 le nucléaire et le gaz (sic)  parmi les énergies « vertes ». Le soutien au gaz est destiné à faire contrepoids au nucléaire pour que l'Allemagne ne perde pas la face et puisse reprendre plus tard son combat obstiné contre le nucléaire.

Mais les conséquences du renoncement au nucléaire tournent désormais à l'absurde, à moins que Madame Merkel pensait au charbon en mentionnant "une énergie plus sûre, et en même temps fiable et économique" : en attendant que l'énergie du  vent vienne à la rescousse, le gouvernement allemand s'ingénie à polluer le plus possible l'atmosphère européenne en mettant en service 27 centrales à charbon supplémentaires jusqu'en mars 2024, alors que la production fabriquée à partir de charbon en Allemagne a bondi de 40 % depuis janvier 2022, date à laquelle la part du charbon dans l’électricité allemande était déjà estimée à 27,4 %.

Remplacer l'énergie nucléaire par le charbon, que voilà une belle perspective, pleine de poussières et de gaz à effet de serre !

Merci encore de vos décisions, Madame Merkel, vous qui êtes presque unanimement reconnue comme une remarquable dirigeante. Mais, même si la fusion nucléaire devait remplacer plus tard les réacteurs à fission nucléaire, forcément, je dois me tromper, compte tenu de votre importance et de ma petitesse.

Car vous avez raison, Madame Merkel, à terme, il faudra tout simplement utiliser de moins en moins d'énergie, qu'elle provienne du charbon, du gaz, du pétrole, des réactions nucléaires ou même du vent, si l'on ne veut pas que l'humanité disparaisse et l'Allemagne avec, englouties par le réchauffement qu'engendre l'utilisation de toute énergie. Ce jour-là, et seulement ce jour-là, votre décision électoraliste se révèlera une décision prémonitoire.

 

Mais à quel terme, Madame Merkel ?

Lire la suite
<< < 1 2 3 4 5 6 > >>