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Le blog d'André Boyer

La Révolution, héritière du pouvoir centralisé et mère des coups d'États

7 Juillet 2011 Publié dans #HISTOIRE

Le 20 juin dernier, nous avons vu la Royauté s’effondrer avec Louis XVI. J’ai observé alors que l’Etat centralisé, qui était l’apport fondamental de la monarchie française depuis Philippe le Bel, ne disparaissait pas pour autant avec l’avènement de la République, bien au contraire.

images-copie-26.jpegLorsque Alexis de Tocqueville déplore, dans « l’Ancien Régime et la Révolution ». que la Révolution n’ait pas su rompre avec la centralisation que lui léguait la monarchie, il se trompe, elle n’a jamais eu cette intention. C’est que le mot d’ordre de la Révolution était à la lutte contre l’absolutisme, non à la déconcentration des pouvoirs. Au reste depuis 1789, aucun pouvoir politique important n’a été concédé aux pouvoirs locaux, ni la police, ni l’éducation, ni la santé, ni la politique sociale, ni même la culture. Au sommet, on a toujours voulu contrôler les esprits, les corps et les revenus des citoyens. Les préfets de l’an VIII sont toujours là, et la décentralisation reste une façade.

La Révolution est en effet la source d’une légitimité renouvelée du pouvoir central. Plus personne ne croyait, en 1789, à l’origine divine du pouvoir du roi de France. Il fallait en trouver une autre, que l’on garde ou non le roi en devanture. Ce fut une nouvelle abstraction, forgée par les têtes pensantes du tiers-état pour justifier leur future mainmise sur le pouvoir royal : la Nation: dans son article 3, la Déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen proclame, dès le 26 août 1789 : « Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément ».

C’est ainsi que le pouvoir central royal, à bout de souffle, a passé le flambeau à la République, porteuse d’une idéologie plus moderne, avec pour mission de garder intact le vrai trésor, la concentration du pouvoir.

Il était convenu qu’une fois la « Nation » définie, donc dotée de volonté, cette dernière déléguerait sans barguigner sa souveraineté à peine acquise à ses représentants, qui l’exerceraient en son nom. La Constitution de 1791 fait de la Nation la source de sa légitimité dans l’article 2 de son Titre III : «  La nation, de qui seule émanent tous les pouvoirs, ne peut les exercer que par délégation. La Constitution française est représentative : les représentants sont le corps législatif et le roi. » 

Il en est toujours de même pour la Constitution de 1958, qui écrit, dans son Titre I, Article III : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum». À partir de cette construction intellectuelle, l’affaire était donc dans le sac.

La Révolution est aussi la mère de tous les coups d’État.

La première Constitution française affirme, dans les mêmes termes que l’actuelle constitution, « qu‘aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice. » C’est une pétition de principe, car la Nation a été constamment prise en otage par « une section du peuple » depuis le 10 août 1792, qui est la date de la fin de la royauté, mais aussi de la légitimité du pouvoir.

À moins de considérer que les artisans révoltés du quartier Saint-Antoine ou les grenadiers de Napoléon étaient représentatifs de la Nation et autorisés à décider à sa place, le coup de force du 10 août 1792 inaugure en effet une incroyable succession de coups de force, sans aucune légitimité « nationale », qui vont se succéder, sans compter les tentatives qui ont échoué,  à raison de six en huit ans, les 10 août 1792, 2 juin 1793, 27 juillet 1794, 4 septembre 1797, 11 mai 1798 et 9 novembre 1799.

Les quatre temps de la Révolution, le temps de la chute de la royauté, le temps de la Terreur, le temps du Directoire et le temps du Consulat et de l’Empire offrent chacun des enseignements précieux pour comprendre comment la France est dirigée aujourd’hui.

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