REGARDER LA VÉRITÉ EN FACE?
8 Juillet 2021 , Rédigé par André Boyer Publié dans #PHILOSOPHIE
Si la science n’apparaît plus comme l’arme absolue pour découvrir la réalité du monde, que faire ?
Autrefois les hommes vivaient dans l’idée que le monde tournait autour d’eux, ce qui leur donnait un sentiment de sécurité. Depuis vingt générations environ, la science a fait pièce à cette prétention. Il a fallu que l’espèce humaine chasse de son esprit les vérités léguées par ses ascendants et à peine s’y était-elle résolue que la science avoue les limites de sa capacité à comprendre le monde.
Une contradiction est en effet apparue entre le doute engendré par le raisonnement scientifique et le besoin fondamental de vérité qui habite les hommes, vérité du monde, vérité de la vie, vérité du moi.
Ce besoin de vérité explique que l’homme ne demande qu’à avoir la foi, qu'il s’accroche à ce qu’il peut saisir, à la religion, à la tradition, à la raison, à la science, toujours à la recherche de chemins vers la vérité.
Or, le point faible des tenants de la vérité scientifique se niche dans la preuve. Avant la science, on pouvait croire sans preuve. La gloire de la science s’était construite sur sa prétention à apporter les preuves de ce qu’elle avançait.
Mais comme ces preuves se sont évanouies au moment précis où les scientifiques croyaient pouvoir disposer de tous les moyens pour les apporter, le doute est désormais omniprésent dans la démarche scientifique. En outre, la logique s’est démontrée à elle-même qu’elle se trouvait dans l’incapacité de prouver quoi que ce soit qu’elle ne savait déjà avant de commencer ses analyses.
Le doute s’est aussi niché dans la vision subjectiviste du monde qu’implique la suprématie de la raison. Désormais, la vérité émerge de l’individu. Tant qu’elle venait d'en haut, que ce soit de Dieu ou de la Science, l’homme y casait ses petites vérités personnelles qu’il cachait ou affichait, à son goût et à ses risques. Mais si la source de vérité devient individuelle, personne ne peut plus accepter une vérité collective, sauf si elle est compatible avec la sienne propre.
Nous sommes désormais libres de choisir ce que nous appelons « vérité », car personne n’est plus autorisé à se référer à une vérité qui le dépasse, en d’autres termes à une vérité transcendantale et, à l’autre bout de la chaine, personne n’est prêt accepter d’être dépossédé de sa vérité particulière.
Il reste que la démarche de l’homme depuis les origines de l’humanité exprime qu’il ne peut se résoudre à vivre dans un monde où ses actions seraient vides de sens, un monde qui lui serait hermétique.
Nous voilà à nouveau seuls au bord du chemin. Il nous faut une troisième fois, après avoir adhéré aux religions monothéistes puis à la science, réévaluer notre situation sur cette Terre. La science, à force de prétendre pouvoir tout comprendre, tout savoir, tout faire, nous avait érigés en démiurges, avant de nous faire redescendre de notre piédestal. Il reste que la conscience que nous avons du monde nous impose de donner un sens à notre présence, ce qui est la source de notre désarroi.
Lorsque nous prenons conscience que nous ne pouvons pas renoncer à la vérité, lorsque nous choisissons donc, par tous les moyens en notre possession, de nous en approcher le plus possible, encore faut-il accepter de la regarder en face cette vérité, personnelle, fragile et provisoire…
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