LA PAIX SELON BONAPARTE
26 Avril 2015 , Rédigé par André Boyer Publié dans #HISTOIRE
Dans le cadre de ses efforts pour stabiliser la position de la France, Bonaparte essaie, au delà de la pacification religieuse, d’obtenir une paix qui permette à la France de digérer ses conquêtes en Europe.
Il n’y parviendra pas.
Pour contraindre l’Autriche à signer la paix, il commence par reprendre les hostilités en avril 1800. Les victoires qu’il engrange lui permettent d’obtenir les conditions de paix qu’il souhaite. En effet, après un succès initial des Autrichiens contre Masséna, la campagne de 1800 aboutit à leur retraite en Italie et en Allemagne. Un nouveau traité, remplaçant celui de Campo-Formio, est signé à Lunéville le 9 février 1801 qui permet à la France de contrôler la rive gauche du Rhin et une bonne partie de l’Italie, à l’exception de la Vénétie qui reste aux mains de l’Autriche.
Le Premier Consul s’affaire ensuite à isoler l’Angleterre pour la contraindre à signer également un traité de paix.
La France obtient de l’Espagne, par le traité préliminaire de Saint Ildefonse (1er octobre 1800), la totalité de la Louisiane qu’elle revendra ensuite aux Etats-Unis tandis qu’en contrepartie le Grand Duché de Toscane est remis au neveu du Roi d'Espagne. De plus, les troupes françaises sont autorisées à passer par l'Espagne pour obliger le Portugal à abandonner l'alliance anglaise.
En outre, la paix, signée à Florence le 28 mars 1801 avec le Royaume de Naples, oblige la Reine Caroline à fermer ses ports aux Anglais et à placer des garnisons à Tarente, Otrante, et Brindisi d’où il sera facile de faire partir une expédition pour renforcer l’armée d'Egypte. Bonaparte signe de plus un traité de paix avec les Etats-Unis et conclut des accords avec Alger, Tunis et Tripoli. Enfin, le Tsar Paul 1er, qui avait retiré ses troupes de la deuxième coalition après la prise de Zurich par Masséna, se détache de l'Angleterre qu'il accuse d'arraisonner illégalement ses navires et fonde avec la Suède, le Danemark et la Prusse, la Ligue des Neutres.
D’ailleurs, la paix, ou au moins une trêve, faisait aussi l’affaire de l'Angleterre qui, tout en conservant la maîtrise des mers, n'avait plus d'alliés susceptibles de se battre en Europe après le traité de Lunéville et voyait sa production industrielle anglaise souffrir du manque de marchés.
Aussi, les deux belligérants aboutirent au traité d'Amiens. À la suite des articles préliminaires signés à Londres le 1er octobre 1801, un traité « définitif » de paix fut signé le 25 mars 1802 entre la République Française, sa majesté le Roi d'Espagne et des Indes et la République Batave d’une part et Sa Majesté le Roi du Royaume Uni de la Grande-Bretagne et d'Irlande d’autre part.
Le traité prévoyait la restitution des prisonniers et des colonies conquises par les forces britanniques à l'exception de l'île de la Trinité et des possessions hollandaises dans l'île de Ceylan. L’île de Malte devait être rendu à l'ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem et les forces anglaises évacueraient tous les ports et îles qu'elles occupaient dans la Méditerranée ou dans l'Adriatique. En contrepartie, la France reconnaissait la souveraineté de la Turquie sur l’Egypte, et les troupes françaises évacuaient le royaume de Naples et l'État romain.
Les peuples espéraient une paix durable mais Bonaparte se refusa au traité de commerce que l’Angleterre espérait et continua à étendre son influence et sa souveraineté en Hollande, en Allemagne, en Suisse et en Italie. Le 26 août 1802, la France annexait l’île d’Elbe ; le 11 septembre, le Piémont, annexé à son tour, était organisé en quatre départements et le 9 octobre 1802, les troupes françaises entrent dans le duché de Parme. Pour couronner le tout, Decaen partait en mars 1803 tenter de reconquérir les comptoirs français des Indes.
En Allemagne, Bonaparte demanda à la Diète du Saint Empire Romain Germanique de remanier la carte politique de l’Allemagne qui aboutit à dissoudre en mars 1803 cent douze États et toutes les principautés ecclésiastiques, sauf une.
Le 1er Consul contraignit la Suisse, par un acte de médiation octroyé le 19 février 1803, à se transformer en Confédération Helvétique.
Pour couronner le tout, Decaen partait en mars 1803 avec une flotte pour tenter de reconquérir les comptoirs français des Indes.
Dans ce conditions, la paix avec le Royaume-Uni apparaissait pour ce dernier comme une forme de capitulation devant l’appétit territorial de Napoléon qui ressemblait beaucoup, un siècle et demi plus tard, à la politique agressive dite « des réunions » pratiquée par Louis XIV.
Il est remarquable que l’opinion française, sans cesse invitée par ailleurs à battre sa coulpe, ne soit jamais alertée sur les menées impérialistes de ces deux « grands » chefs d’État, Napoléon et Louis XIV, qui ont largement contribué à donner une image négative de la politique française en Europe. Une histoire ancienne sans doute, mais dont on retrouve les excroissances dans le comportement arrogant de nos dirigeants actuels…