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Le blog d'André Boyer

Les Aubrac, des héros (communistes) français

25 Avril 2012 Publié dans #HISTOIRE

L’histoire officielle vous a livré la semaine dernière l’information suivante : « Raymond Aubrac, de son vrai nom Raymond Samuel, est mort mardi soir à l’âge de 97 ans à l'hôpital militaire du Val-de-Grâce. Grande figure de la Résistance, il avait été le co-fondateur du mouvement « Libération Sud » et était l'une des dernières personnalités à avoir côtoyé Jean Moulin. Il était le dernier survivant des chefs de la Résistance arrêtés en juin 1943 à Caluire dans le Rhône avec le chef du Conseil National de la Résistance. Après la guerre, il avait témoigné lors du procès du résistant René Hardy, accusé d'avoir dénoncé Jean Moulin à la Gestapo et acquitté au bénéfice du doute. Dans ses dernières années, Raymond Aubrac était resté un citoyen très actif. Sa femme Lucie Aubrac, également héroïne de la Résistance est morte en 2007, à l'âge de 92 ans. » (20 minutes, 12 avril 2012.)

lucieraymondaubrac1Cette histoire officielle se garde bien de mentionner que toute l’action de Lucie et Raymond Aubrac s’inscrit depuis leur adolescence dans le cadre de leur engagement auprès du PCF, même si Raymond Aubrac n’en faisait pas officiellement parti, pour des raisons d’affichage. Cet engagement, que les medias s’efforcent d’occulter, explique les incertitudes et les ambiguïtés qui entourent leur action et l’énorme effort de communication auquel ils se sont tous deux astreints jusqu’à la toute fin de leur vie.   

- Raymond et Lucie Aubrac, héros de la Résistance :

On sait que Jean Moulin, chef de la Résistance intérieure fut arrêté en juin 1943 lors du « rendez-vous de Caluire » dans la banlieue lyonnaise. Torturé puis mis à mort, on s’est demandé s’il n’avait pas été trahi. C’est ainsi que René Hardy a été deux fois accusé, notamment par Raymond Aubrac, d’avoir trahi Jean Moulin, mais a été deux fois acquitté. Il est vrai aussi que le rendez-vous de Caluire dans la villa du Dr Dugoujon était connu de beaucoup trop de gens pour ne pas finir en guet-apens.

Quant aux Aubrac, ils ont fourni des récits à géométrie variable. Devant le doute qui s’installait, le couple a demandé à un jury d’honneur de les entendre, un jury composé des historiens François Bédarida, Jean-Pierre Azéma, Laurent Douzou, Henry Rousso et Dominique Veillon, et surtout Daniel Cordier, compagnon de la Libération et secrétaire de Jean Moulin.

L’entretien s’est déroulé le samedi 17 mai 1997, au siège de Libération. La confrontation dura cinq heures. François Bédarida a ainsi interpellé Raymond Aubrac : « Les historiens sont par définition des gens curieux. Comment un homme comme vous qui contrôle son langage, peut-il avoir oscillé sans cesse entre le fait de dire tantôt : « non, je n’ai pas été reconnu comme Aubrac» et « oui, j’ai été identifié » ?

Les libertés de Lucie Aubrac avec des faits attestés par les archives sont remarquables. Par exemple, Lucie Aubrac a affirmé à plusieurs reprises et notamment en septembre 1945 dans le journal communiste La Marseillaise, qu’elle avait fait évader son mari de l’hôpital de l’Antiquaille le 24 mai 1943. Or, s’il y a bien eu une évasion à cette date de cet hôpital, Raymond Aubrac n’en a pas bénéficié : en effet, arrêté, sous le nom de François Vallet lors d’une réunion de résistants le 15 mars 1943, il avait été libéré deux semaines auparavant. L’avis de sa mise en liberté l’atteste, un avis signé le 10 mai 1943 par le gardien-chef de la prison de Saint-Paul et établi sur ordre du juge d’instruction Cohendy.

Il existe également des contradictions entre les différentes versions que Lucie Aubrac donne du second de ses exploits: l’évasion de son mari, arrêté à nouveau à Caluire, d’un fourgon cellulaire attaqué par la Résistance, en octobre 1943. Là aussi, d’autres témoignages et des documents d’archives la contredisent.

- Raymond Aubry, héros communiste :

Selon Stéphane Courtois, Directeur de recherches au CNRS et maître d'oeuvre du Livre noir du communisme, Raymond Aubrac était un membre important du réseau communiste international. On a notamment découvert dans les archives du PC à Prague des documents qui montrent qu'Aubrac y était reçu par Klement Gottwald, le chef historique du PC tchécoslovaque, qui fut aussi un agent important du Komintern.

Formellement, il n’avait pas sa carte du PCF parce que le Parti préférait qu’il n’ait pas de carte. Cela ne l'empêchait pas de participer à des réunions de cellules comme « observateur ». De même sa future épouse Lucie était elle-même communiste et proche d'André Marty, qui fut représentant du PCF au Komintern.

À la Libération, il est désigné commissaire régional de la République à Marseille. Or De Gaulle le congédie sans ménagement et sans explications. À Marseille, il avait en effet créé des CRS (Compagnies républicaines de sécurité) dont on découvrit plus tard qu'elles étaient entièrement infiltrées par le PCF.

En 1946, à la demande de Jacques Duclos, les Aubrac hébergent Hô Chi Minh, en tant que dirigeant communiste vietnamien, lorsqu’il vient en France. Plus tard, il servira de contact entre l'appareil communiste international et Henry Kissinger lui-même : ce n’était pas un petit agent…

Après guerre, il dirige officiellement le Berim (Bureau d'Études et de Recherches pour l'Industrie Moderne) qui est une société écran placée sous la responsabilité de Jean Jérôme, l'un des hommes les plus importants et les plus secrets du PCF. Le Berim est une des pompes à finances du PCF. Par elle, passe une partie des financements en provenance de l'Est sous la forme de contrats plus ou moins bidons…

 

Si vous voulez comprendre comment on s'efforce d'orienter vos jugements, il est intéressant d'observer que les medias passent sous silence le fait que toute la vie des époux Aubrac s’insère dans le cadre de l’action du PCF, en relation avec la politique soviétique, notamment par leurs liens avec Ho Chi Minh, qui relève de la politique du PCF. Les medias font comme si les Aubrac étaient des héros individuels, alors que Raymond Aubrac a créé « Libération-Sud » sur ordre du PCF, qu’il a été désigné comme Commissaire régional  de la République à Marseille et qu’il a accueilli Ho Chi Minh à la demande du PCF. Toute la mise en scène de leurs actions de résistance relève de la communication politique : le PCF et la gauche tenaient d’exemplaires héros de gauche à montrer à la population et en particulier aux enfants des écoles. 

 

Cela n’enlève rien à leur courage personnel ni au respect qui leur est dû, mais pourquoi cacher l'engagement de leur vie toute entière auprés du PCF sinon pour inverser la logique de leurs actions : fondamentalement, ils ont agi sur ordre du PCF et non pas, comme on veut le faire croire, dans l’ordre inverse des causes : ce seraient des héros qui avaient, naturellement puisqu’ils étaient des héros, des convictions de gauche. C’est pourquoi l’on s’efforce de cacher qu’ils étaient communistes, parce que cela fait un tout petit peu moins "politically correct" que "héros de gauche"...

 

 

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What can we do about France (fin)?

15 Avril 2012 Publié dans #ACTUALITÉ

Dans mon dernier blog, intitulé "What can we do about France (suite)", je concluais qu'il fallait prendre acte que l’Europe comme la France étaient en train de perdre toute maîtrise sur leur destin, une maîtrise dont elles disposaient presque totalement un siècle auparavant.

 

 

super durandNous savons bien ce qui nous attend, l’hégémonie de la Chine sur le monde, qui va se substituer à l’hégémonie actuelle des Etats-Unis. Cette évolution, qui signifie que les rôles de la France et de l’Europe sont ensemble en cours d’amoindrissement, n’implique aucune capitulation ni résignation, mais une volonté de fer afin de s’y adapter dans les meilleures conditions pour nous.

C’est pourquoi l’enjeu, qui suppose une prise de conscience, une volonté et des moyens rassemblés est de permettre à la France de redevenir un espace de solutions pour elle-même, donc pour l’Europe et pour le monde, ou de renoncer à toute prise de décision autonome pour se livrer aux grands vents provoqués par les changements du monde.

J’ai écrit la France et non l’Europe, parce que je suis convaincu qu’il faut mobiliser les énergies au niveau de la France, pays centralisé s’il en est, avant de porter et de coordonner les options choisies au niveau de l’Europe. En effet, lorsque l’on examine les différentes dimensions des décisions à prendre, on prend conscience que le niveau national doit précéder le niveau européen dans leur conception et leur mise en œuvre. Il reste que le niveau européen ne peut pas être négligé, parce que la coordination et la convergence des efforts européens sont un des rares atouts qui nous reste face à la globalisation. 

Les dimensions du défi à relever sont clairement d’ordre éducatif, technique, écologique, sociale ou managérial :

 

Notre système éducatif doit redevenir performant, puisque tous les constats convergent pour montrer qu’il ne l’est plus et que rien ne peut plus être espéré dans le futur s’il ne le redevient pas.

Notre recherche doit investir lourdement dans les domaines les plus productifs, relativement à notre système économique, que ce soit dans certains secteurs industriels et agro-alimentaires ou dans les services.

Nous devons fournir un effort exceptionnel pour réduire notre consommation énergétique, dans des domaines aussi variés que l’habitat ou les habitudes alimentaires.

Nous devons faire tous nos efforts pour obtenir une cohérence sociale, ce qui signifie des changements volontaires, approuvés par la nation, dans la distribution des revenus et dans l’harmonisation des différences culturelles.

Nous devons mettre en place une organisation de l’État qui nous donne les structures les plus efficaces pour coordonner nos actions et gérer les collectivités.

 

Les voies précédentes, nous le savons, ont été tracées dans mille rapports remis à nos dirigeants, à nos « élites », à nos cadres. La prise de conscience existe donc à l’état latent, mais il reste à mobiliser et à s’organiser.

C’est là que le bât blesse. La mobilisation suppose au préalable la transparence, la confiance, l’adhésion voire la participation.

Elles manquent, tant les « élites » sont plus préoccupées d’imposer leurs choix, et bien sûr de se protéger, que de se livrer au « peuple » selon la démarche qu’elles dénoncent hypocritement sous le terme de « populisme ». Il faudra pourtant bien y aller au peuple, si l’on veut qu’il vous suive.    

Il manque aussi l’organisation, c’est-à-dire la mise en musique des réponses aux défis. Mais sur ce point le génie français, grâce à l’armature étatique qui le gêne tant par ailleurs, a toujours su produire les structures appropriées aux questions qui lui étaient clairement posées : que l’on se souvienne de la mise en place des industries nucléaires, aéronautiques ou du TGV.

Le rôle de l’Europe dans ce processus ne me paraît que second : des modèles existent en Europe, en Europe du Nord surtout mais aussi en Italie, qui peuvent nous inspirer, d’autres situations, comme celle de la Grèce, peuvent nous montrer quelles seraient les conséquences de nos renoncements. L’Europe peut aussi nous servir à nouer des alliances et à nous éviter de rester enfermé dans des logiques trop hexagonales. Mais je crains que ceux qui renvoient la solution de nos problèmes à la constitution d’une Europe fédérale ne nous parlent de calendes grecques que pour fuir la difficulté de résoudre ici et aujourd’hui les problèmes qui nous assaillent.

 

La question fondamentale reste, à mon avis, de mettre en place le processus qui nous permettra de nous imposer, face au monde, comme une source de solutions pour nous-même, pour l’Europe et pour le monde, plutôt qu’à nous résigner à devenir un espace de problèmes que le monde devra prendre en charge à notre place.

 

Sans revenir au temps où la France prétendait imposer sa conception de la République à l’Europe ou même au temps où elle prétendait apporter la civilisation à ses colonies, il n’est pas si loin le temps où la France, entre les USA et l’URSS, voulait offrir une troisième voie fondée sur l’indépendance énergétique, sur l’autonomie industrielle, sur la solidité monétaire et même sur une défense tous azimuts. Ce temps de la fierté recouvrée succédait à celui au cours duquel les gouvernements de la France couraient à Washington assurer leur fin de mois, un temps qui ressemble beaucoup au moment présent, qui voit les États européens aux pieds des banques.

L’histoire le montre donc, il est toujours possible de changer de chemin, à condition d’affirmer une volonté au nom d’une collectivité qui y adhère.

 

 

En allant voter dans quelques jours, pour choisir la tête de leur Président, les Français restent en attente de l’homme et de l’organisation qui permettront d’éviter que la France ne devienne un espace de problèmes sur lequel des experts étrangers se pencheront avec une  arrogante commisération, comme ils le font aujourd’hui sur la Grèce et comme j’espère très fort qu’ils ne vont pas le faire bientôt sur l’Espagne, puis sur la France. 

 

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What can we do about France (suite)?

12 Avril 2012 Publié dans #ACTUALITÉ

À la fin de mon blog précedent je concluais en observant que le problème de fond ne se situait pas dans la simple acceptation d’ajustements budgétaires, mais dans la mobilisation du pays  pour s’adapter au monde tel qu’il sera dans une ou deux générations.

 

Usa-China.jpgOr, sous la pression démographique et la croissance économique des trois autres continents, l’Europe en général et la France en particulier sont en train de changer de rôle dans le monde. Ils étaient au centre de la politique mondiale, ils n’y sont plus. Les débats sont ailleurs, entre les USA et la Chine, au Moyen Orient entre les puissances pétrolières, en Afrique avec le réveil du continent. Dans le reste du monde, tout le monde se fiche de ce qui se passe en Europe ou de ce que pense l’Europe des débats qui agitent le monde.

Non seulement l’Europe et la France n’ont déjà plus aucune importance politique, mais elles sont en train de perdre leur rôle de centre d’innovations techniques et de fournisseurs industriels. L’informatique, la télématique, Internet, les réseaux sociaux, tout ce qui a changé la communication entre les êtres humains leur a échappé. Elles n’en sont que les consommatrices, pas les conceptrices, sauf sur quelques créneaux limités, quelques chips, quelques jeux. Les machines-outils, l’automobile, la chimie, l’industrie nucléaire et aéronautique lui restent, à condition d’installer les usines en Asie, bientôt en Amérique du Sud et en Afrique et de transférer la technologie.     

En revanche, l’Europe comme la France demandent au reste du monde de leur fournir les capitaux qui leur manquent pour combler le déficit des États et renflouer les entreprises qu’elles vendent, bradent ou liquident. Il paraît désormais tout naturel que la Chine achète des emprunts grecs et que des entrepreneurs indiens possèdent notre industrie sidérurgique. L’Europe comme la France demandent au reste du monde de lui fournir ses ressources énergétiques en pétrole, en gaz et en uranium, devenant de plus en plus dépendantes du Moyen-Orient, de la Russie et de l’Afrique. Il en est de même pour leurs matières premières, à l’exception notable des produits alimentaires.

C’est ce que les experts de tout poil appellent par commodité la mondialisation, c’est-à-dire l’interdépendance entre les économies du monde. Ne voulant pas attirer l’attention sur les perdants et les gagnants de la mondialisation, ils se gardent d’affiner leur analyse en comparant les dépendances  relatives des différentes économies, qui restent, malgré la mondialisation, toujours nationales.

Ainsi se réfère t-on bien à  la Chine, et non à l’Asie dans son ensemble, pour évaluer sa dépendance énergétique et c’est bien de la production à bas prix chinoise dont  on ne peut se passer aujourd’hui sans voir s’effondrer le niveau de vie du reste du monde.

Ainsi les USA prennent-ils grand soin à dépendre le moins possible du reste du monde, quitte à utiliser la force militaire pour maintenir en leur faveur les rapports de force avec leurs « partenaires ».

Ainsi le Japon, dépendant de tous, a t-il su forger une indépendance culturelle et un niveau technologique de pointe qui lui permettent de résister aux pressions d’où qu’elles viennent, en particulier d’Asie.

Ainsi la Russie, puissance aux pieds d’argile, cherche t-elle son autonomie dans ses ressources énergétiques.

Ainsi l’Amérique Latine assure t-elle son développement dans une forte autonomie continentale.

Ainsi l’Afrique, forte de sa démographie, de ses ressources énergétiques et de sa pauvreté, n’est nullement en position de quémandeur.

Mais l’Europe et la France, si demandeurs par ailleurs, qu’ont-ils à offrir d’indispensable au monde ? des produits industriels dans des créneaux technologiques de plus en plus restreints, l’industrie du luxe et de la mode tant que la vieille Europe symbolisera le chic pour les autres continents, un site touristique de premier plan et le premier réceptacle d’immigration des trois autres continents. En somme, ce qu’attend le monde de la part de l’Europe, ce ne sont ni des matières premières, ni des produits industriels, ce ne sont que quelques produits alimentaires, du vin, des produits de luxe et d’être le régulateur démographique du reste du monde.

L’Europe et la France seraient rayées de la carte comme l’ont été les cent millions d’indiens d’Amérique que la marche du reste du monde n’en serait guère troublée, sauf quelque nostalgie pour un art de vivre oublié.

 

Il faut donc prendre acte que l’Europe comme la France sont en train de perdre toute maîtrise sur leur destin, une maîtrise dont ils disposaient presque totalement un siècle auparavant.

 

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What can we do about France?

10 Avril 2012 Publié dans #ACTUALITÉ

 

Tandis que je crains de lire, dans dix ans, dans vingt ans, un article à la une du China Daily, intitulé « What can we do about France ? what can we do about Europe ? », il semble bien que les enjeux de la prochaine élection présidentielle se résument, pour nombre de Français, à décider de la tête qu’ils verront le soir de l’élection et les cinq années suivantes. Et rien de plus.

 

EMEUTECela signifie qu’ils ont compris que leur avenir n’était nullement remis en question tous les cinq ans, en d’autres termes que leur vote n’avait aucune influence sur leur destin collectif. Puis, lorsqu’ils auront voté et que le gouvernement, une fois installé, commencera à prendre des décisions forcément désagréables, ils protesteront et ils se résigneront.

Il y a des  raisons à un tel comportement de citoyens qui ne sont pas plus irresponsables que d’autres, mais qui voient bien que la démocratie française n’est pas celle d’Abraham Lincoln, celle qui devrait être « d’un gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ». En France, la démocratie se réduit à choisir la tête du prochain Président. Il suffit de se rappeler avec quelle désinvolture a été traitée par les « élites » l’opinion de la majorité des citoyens exprimée par le referendum sur la constitution européenne. Du coup, la difficulté à mobiliser malgré tout les énergies de personnes et de groupes que l’on dédaigne de consulter devient un problème majeur pour permettre au pays de répondre aux défis auxquels il doit faire face.

Pourtant les enjeux demeurent, en dehors de cette fameuse tête à sélectionner. Dans l’immédiat, ils sont d’ordre économique et n’offrent guère d’autres alternatives que la rigueur, sous forme d’accroissement des impôts et de baisses des dépenses. C’est ce constat qui inspire l’étonnement rituel de The Economist, étonnement qu’il a exprimé dans un article retentissant intitulé « A country in denial » le 31 mars dernier, un article qui lui permet de faire, comme d’habitude, la leçon aux Français. 

Dans cet article, le journal britannique observe que dans la zone euro, les Italiens, les Espagnols et bien sûr les Grecs sont conscients des problèmes économiques auxquels doit faire face leur pays. À contrario, le journal se dit frappé par le quasi-silence de la campagne électorale française sur « l’impasse économique désastreuse du pays » et par le constat que personne ne présente de programme « sérieux » pour « réduire le taux d’imposition pathétique de la France ». Pathétique !

Il nous rappelle que la France n’a pas équilibré son budget depuis 1974, si bien que sa dette publique s’élève à 90% du PIB, que la dépense publique atteint 56% du PIB, engloutit une plus grosse part de la production que dans n’importe quel autre pays de la zone euro, que le taux de chômage atteint des niveaux records et que les exportations stagnent. Nous savons tout cela par coeur.

Le journal constate aussi qu’avec la crise financière la France ne peut plus vivre à crédit, et nous menace de la fuite des  investisseurs devant le marché obligataire français si le prochain Président de la République ne poursuit pas assidûment un programme de réformes raisonnables…

On peut rassurer The Economist : la France poursuivra une politique de réductions des dépenses et d’accroissement des impôts, parce qu’elle n’a pas d’autre choix à court terme. Nul besoin de lire l’article condescendant de The Economist, tous les électeurs français le savent.

Mais si cette politique, aussi imbécile qu’obligatoire, dit beaucoup sur le laxisme passé, elle n’est pas en mesure de répondre aux défis du long terme, sauf au titre de condition préalable : s’il arrivait en effet  que les Français refusassent cette contrainte de court terme, à fortiori seraient-ils dans l’incapacité de se mobiliser pour résoudre leurs problèmes de fond, qui engagent le long terme…

 

En effet, le problème de fond ne se situe pas dans la simple acceptation d’ajustements budgétaires, mais dans la mobilisation du pays  pour s’adapter au monde tel qu’il sera dans une ou deux générations.

À SUIVRE...

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Un chemin de Vie (suite)

7 Avril 2012 Publié dans #PHILOSOPHIE

Et mon ami Driss Alaoui M’Daghri  de poursuivre (voir mon blog du 31 mars dernier ) :

driss.jpgLa surprise, oui ! Il est fondamental de garder une certaine naïveté face au monde, naïveté qui favorise la surprise. Il n’y a rien de pire que d’être blasé...

Cette attitude favorise le regard attentif et la réflexion approfondie. Elle permet de ne pas se laisser obnubiler par les apparences et de voir le réel sous différentes perspectives.

Cet étonnement a favorisé la recherche de l’information  et donc de la lecture, qui a profondément conditionné mes rapports avec mon entourage familial et mon implication, plus tard, dans des activités de documentation et de communication. En fondant avec quelques amis l’Association Marocaine d’Intelligence Economique dans les années 2000, j’étais dans la continuité de cette démarche.

Face à n’importe quelle personne, n’importe quel paysage, il faut avoir à l’esprit que c’est un monde tout entier qui s’ouvre à nous et qu’un grain de poussière contient tout l’univers.

Puis il y a le point, sans oublier le contrepoint :  

Le point semble indiquer la fin de quelque chose. Il est en effet important de savoir en finir avec certaines choses, tourner la page et regarder ailleurs. Et c’est pour cela qu’il est nécessaire chaque fois d’invoquer le contrepoint qui permet un éclairage autre, qui permet de trouver des solutions inattendues et d’explorer des territoires en friche. 

C’est aussi un certain esprit de contradiction qui conduit à regarder à tribord quand tout le monde regarde à bâbord.

 J’ai nombre d’exemples concrets puisés dans mon vécu professionnel et personnel. Pour n’en citer qu’un, je prendrai celui du gazoduc Maghreb Europe, mais je pourrai prendre celui de la crise de l’électricité ou de la deuxième chaine de télévision marocaine. Peu de gens, même parmi les responsables de premier plan, croyaient à la faisabilité du gazoduc Maghreb Europe, parce qu’il impliquait trois pays entre lesquels les relations étaient plus ou moins tumultueuses, l’Algérie, l’Espagne et le Maroc. Comme Dominique Strauss Kahn  est déjà en mauvaise posture, je ne vais pas l’accabler en faisant état d’une lettre qu’il m’avait envoyée dans laquelle il exprimait sous forme de circonlocutions diplomatiques son scepticisme, mais aujourd’hui, ce projet d’un milliard de dollars tourne à plein régime à la satisfaction des pays partenaires et montre la voie d’une coopération euro-méditerranéenne réussie dans un domaine d’importance.

Après le point, la parenthèse :

Dans la vie professionnelle comme dans la vie personnelle, nous faisons des choses qui nous dévient de la route  empruntée et qui nous amènent sur des chemins de traverse. Ce sont autant d’occasions de progresser dans la connaissance de soi et des autres, ainsi que dans l’accomplissement de notre destin. Ces parenthèses peuvent être heureuses ou malheureuses, mais sans elles, la vie ne serait qu’un long fleuve tranquille, sans aspérité, sans relief et sans saveur.

Un drame familial m’a ainsi obligé à scruter au plus profond de moi-même ce qui faisait sens et à revoir la façon dont je conduisais ma vie. Sans pouvoir en dire plus, j’ai fait en sorte que cette parenthèse, longue au demeurant, ne m’empêche pas de continuer mon chemin de vie, avec  moins d’arrogance et plus de recul. Bien des années plus tard, une amie disparue trop tôt, Mary Weed, vivra quelque chose du même ordre qui lui fera écrire un petit livre « Work life Harmony », qui fonctionne comme le ying et le yang des chinois. Elle écrira aussi  sur son lit d’hôpital une belle pièce de théâtre « Les amazones du crabe » qui parle du cancer tout en étant un hymne à la vie, que j’ai eu la joie de jouer avec quelques amis de différentes cultures à Casablanca,  à Genève, à Cergy et dans d’autres lieux.

Regardons maintenant les « références » : j’ai mis des guillemets pour ces références qui sont des  citations, des emprunts et des leçons que nous apprenons des autres. Quand on me dit par exemple encore « Monsieur le ministre ’, si parfois cela flatte mon égo, la plupart du temps, cela me fait rire intérieurement parce qu’on ne tient jamais autant à cette appellation que quand on a cessé de l’être. C’est pourquoi la sagesse consiste à mettre cela entre guillemets.

J’ai appris une chose en effet, de mon long séjour - 10 ans en compagnie des princes qui nous gouvernent -, qui est de veiller à sculpter sa vie en veillant à être quelqu’un avant, quelqu’un pendant et quelqu’un après, c’est-à-dire à être quelqu’un qui a une vie juste. Je l’ai appris en observant la vie, le comportement de mes semblables et, pour cette tranche de mon vécu, maints hommes d’état qui ont su réaliser de belles choses, voire une œuvre grandiose, tout en gardant la tête froide.

Puisque les guillemets annoncent des citations, gardons celle-ci de Montesquieu : « Le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument », et cette autre de Baltasar Gracian : « A quoi sert le savoir, s’il ne se met pas en pratique ? Savoir vivre est aujourd’hui le vrai savoir ».

Il est donc temps de retourner aux étoiles :

Je me réfère à la création, à l’esprit d’entreprise, à la poésie, à l’art…

Nous venons probablement des étoiles. Nous sommes les enfants des étoiles et nous retournerons aux étoiles. C’est peut-être pour cela que nous rêvons, que nous créons. En tout cas, chacune de nos créations participe à la création de la vie.

Dans mon évolution, cela a toujours été présent. Cela ne l’a jamais été autant que ces dernières années. Par exemple, la croisière Maghreb Europe pour la création de l’entreprise a consisté à embarquer 500 jeunes maghrébins et méditerranéens en les encadrant pour la création de leur propre entreprise. Plus tard, la création de l’ensemble poético-musical Damana, fondé sur le dialogue créatif des cultures, à partir du « Livre des Secrets Perdus » qui traite du chemin de la liberté et qui nous a amené à faire des représentations à Dakar, à Washington, à Casablanca, à Rabat et à Milan.

Pour clore ces propos en poésie, voici l’un des poèmes que l’on retrouve dans le spectacle de Damana, sous le nom de Caravane :

 

Regarde, au loin, regarde,

Les riches caravanes gorgées d’épices et de trésors,

Les amples abayas blanches

Et les chamelles d’une délicate nonchalance.

Le geste hiératique et souverain d’un prince des dunes

Marque l’arrêt

Tandis que s’assombrit le ciel

Et que se déploie, étincelante,

La sarabande des étoiles qui s’allument tour à tour

Jusqu’à couvrir le désert

D’un manteau immaculé de lumière.

Le pas rapide des femmes qui se déhanchent se fait mol.

Je rêve et je m’en vais;

Là-bas je m’en vais;

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Les riches caravanes gorgées d’épices et de trésors;

Les amples abayas blanches

Et les chamelles d’une délicate nonchalance.

D'une délicate nonchalance...

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