DE L'IMPORTANCE DE LA LARGEUR DE L'ARRIÈRE-TRAIN DES CHEVAUX ROMAINS
La distance standard entre 2 rails de chemin de fer en France est de 4 pieds et 8 pouces et demi (1,435m). C'est un chiffre particulièrement bizarre.
Pourquoi donc les chemins de fer en France ont-ils été construits avec un écartement de 4 pieds et 8 pouces et demi ?
Parce que les premières lignes de chemin de fer furent construites par les mêmes ingénieurs qui construisirent les tramways, et que c’est cet écartement de 8 pouces et demi qui était utilisé pour les tramways.
Mais alors, pourquoi les ingénieurs anglais ont-ils utilisé cet écartement pour les tramways ?
Parce que les premières personnes qui construisaient les tramways étaient les mêmes qui construisaient les chariots et qu'ils ont utilisé les mêmes méthodes et les mêmes outils que pour les chariots tirés par des chevaux.
Bon d’accord, mais pourquoi les chariots avaient-ils un écartement de 4 pieds et 8 pouces et demi ?
C’est simple à comprendre. Partout, en France comme en Europe, les routes avaient des ornières espacées de huit pouces et demi et un espacement différent aurait provoqué la rupture de l'essieu du chariot en circulant sur des routes avec ces ornières ainsi espacées.
Enfin, allons au fond des ornières, je veux écrire au fond des choses : pourquoi les routes européennes possédaient des ornières espacées de huit pouces et demi ?
C’est évident. Les premières grandes routes en Europe ont été construites par les Romains pour faciliter le déploiement de leurs légions dans l’ensemble de l’Empire.
D’accord, d’accord.
Mais enfin, pourquoi les Romains ont-ils déterminé cet espacement de huit pouces et demi pour leurs routes ?
Parce que les chariots romains étaient des chariots de guerre,
tirés par deux chevaux. Ces chevaux galopaient côte à côte et devaient être suffisamment espacés pour ne pas se gêner. Afin d'assurer une meilleure stabilité du chariot, les roues ne devaient pas se trouver dans la continuité des empreintes de sabots laissées par les chevaux, et ne pas non plus se trouver trop espacées pour ne pas dépasser de chaque côté du chariot, ce qui aurait pu causer un accident lors du croisement de deux chariots. D’où les huit pouces et demi entre les deux roues, qui permettent à la fois aux chevaux de ne pas se heurter, aux roues de ne pas se trouver dans les traces des chevaux et aux chariots de ne pas être trop larges.
Ainsi l'espacement des rails en Europe et pour 60% des trains dans le monde, en Amérique, en Afrique et en Asie est de 4 pieds et 8 pouces1/2, parce que 2000 ans auparavant, les chariots romains étaient construits en fonction de la dimension de l'arrière-train moyen de leurs chevaux de guerre.
Ajoutons un détail significatif :
Si nous regardons une photo de la navette spatiale américaine sur sa plate-forme de lancement, nous remarquons qu’elle possède deux réservoirs additionnels attachés au réservoir principal. La société qui fabrique ses réservoirs souhaitaient les faire un peu plus larges, mais ces réservoirs devaient être expédiés par train jusqu'au site de lancement. La ligne de chemin de fer entre l'usine et Cap Canaveral empruntant un tunnel sous les montagnes rocheuses, il fallait que les réservoirs additionnels puissent devaient passer dans ce tunnel, dont la largeur, déterminée par celle de la voie de chemin de fer, était à peine un peu plus large que celle de deux arrière-trains de chevaux.
On peut observer, que la construction de la navette spatiale américaine, qui est sans doute l’un des moyens de transport les plus modernes et les plus sophistiqué du monde, a du respecter des contraintes de conception vieille de plus 2000 ans, à savoir la largeur du cul de deux chevaux côte à côte !
En conclusion, les spécifications ont une durée de vie souvent insoupçonnée. Aussi, lorsque vous décidez d’en imposer aux autres sous forme de règles, de préceptes ou de normes, rappelez qu’elles risquent de durer beaucoup plus longtemps que vous et que les raisons qui les ont inspiré…
LA LIQUIDATION DES INDIENS D'AMÉRIQUE DU NORD
L’histoire de la colonisation de l’Amérique du Nord est celle de la liquidation des indigènes, à savoir celle des Indiens d’Amérique du Nord. Elle est révélatrice de l’idéologie, de l’attitude et du comportement des colons britanniques car elle est fondatrice de la politique américaine, constante des origines à nos jours.
La liquidation des Indiens d’Amérique du Nord s’inscrit dans le cadre du récit que j’ai entrepris de la guerre entre les Français, les Canadiens et les Indiens contre l’armée et les colons britanniques. Cette guerre de conquête du Canada, qui s’achève en 1760, est appelée par les historiens américains « The French and Indian War » : elle est donc menée contre les Français ET les Indiens associés. Elle continuera contre les Indiens seuls jusqu’au début du XXe siècle, au moment où ces derniers, presque exterminés, ne représenteront plus aucune gêne pour les colons américains.
L’histoire tragique des Indiens d’Amérique du Nord commence avec l’arrivée des premiers êtres humains sur le continent américain pendant la dernière ère glaciaire, lorsque le détroit de Béring, pris par les glaces, forma un passage terrestre entre l’Asie et l’Amérique, qui fut sans doute emprunté par des populations asiatiques nomades.
La présence humaine est attestée en Alaska vers 20000 av. J.-C, sur la côte est des États-Unis vers 16000 av. J.-C. et en Floride vers 10000 av. J.-C.. Les premiers occupants vivent de la chasse, de la pêche et du ramassage de coquillages. Puis le climat de l'Amérique du Nord devenant plus chaud et plus sec, les populations amérindiennes se sédentarisent. Des civilisations avancées se développent autour d’une agriculture de plus en plus diversifiée, d’un artisanat raffiné et de la construction de lieux de culte monumentaux. Mais ces civilisations s’éteignent bien avant l’arrivée des Européens, sans doute en raison de nouveaux changements climatiques.
Apparaissent alors les tribus que vont découvrir les Européens, entre lesquelles les guerres sont fréquentes : les Sénécas affrontent régulièrement les Cherokees, les Sioux massacrent les Mandans et les Apaches s’attaquent fréquemment aux Pueblos, mais avec des armes rudimentaires, haches, tomahawks, flèches et arcs, massues, couteaux, qui limitent la portée des pertes humaines...
Vers 1500, à la veille de la conquête européenne, alors que la population de la France compte 18 millions de personnes, celle de l’Espagne 8 millions d’habitants et celle de l’Angleterre 4 millions d’habitants, les historiens évaluent à environ 10 millions d’habitants le nombre d'Amérindiens en Amérique du Nord, qu’ils regroupent en huit aires culturelles principales en fonction du milieu naturel, et surtout en 300 à 500 tribus dotées de langues différentes. C’est alors que la catastrophe s’annonce pour eux, quand s’engage la course entre les puissances européennes pour l’exploration et la colonisation de l’Amérique du Nord, qui implique l’asservissement et l’élimination des Amérindiens d’Amérique du Nord.
Dans l’ordre chronologique, les Espagnols, les Français et les Anglais commencent à s’aventurer prudemment en Amérique du Nord, les derniers arrivants, plus nombreux, finissant par expulser tous les autres et par exterminer les Indiens.
LE MAROC MONTRE LA VOIE
Le Maroc, investit, investit et investit encore en Afrique, devançant tous les grands pays industriels. Et il a mille fois raison.
Dans le dernier classement des entreprises africaines du magazine Jeune Afrique, parmi les 500 entreprises classées, 71 sont marocaines, soit 14 % des entreprises africaines dans leur ensemble. C’est une proportion énorme pour un pays de 34 millions d’habitants qui ne représente que 2,8 % de la population africaine et 4 % de son économie.
Le Maroc, qui tournait presque le dos à l’Afrique il y a trois décennies pour des raisons politiques, est devenu le premier investisseur francophone sur le continent et le deuxième grand investisseur africain après l’Afrique du Sud.
Ses compagnies d’assurances, de télécommunications, de construction et de grande distribution sont partout. Les agences bancaires marocaines sont désormais deux fois plus nombreuses que les institutions françaises en Afrique. Royal Air Maroc a multiplié par cinq le nombre de routes desservant le continent.
Ce dynamisme s’explique par la volonté du Maroc de se doter de l’une des économies les plus diversifiées du continent. Le Maroc est le deuxième producteur automobile du continent, avec 346 000 voitures en 2016, après l’Afrique du Sud qui en produit 600 000. Cette année 2017, il sera le premier pays du continent à implanter un TGV. Aussi, quand on considère le classement de Jeune Afrique, secteur par secteur, on observe que six des cinquante premières sociétés africaines du secteur des boissons sont marocaines, quatre dans le secteur des télécommunications, quinze dans le secteur de la construction et dix dans celui des matériaux de construction.
Ce tropisme africain est le fruit de la stratégie de Mohammed VI depuis son accession au pouvoir, le 30 juillet 1999, une semaine après le décès du roi Hassan II. Tandis que la France se désintéressait du continent africain, la Chine et le Maroc prenaient provisoirement sa place.
Mohammed VI a lancé son pays à la redécouverte de l’Afrique francophone. Pour ce faire, il a personnellement dirigé plusieurs dizaines de visites officielles, souvent de fortes délégations composées de 300 à 400 personnes, dont une moitié d’hommes d’affaires. Cette action volontariste a eu des effets tangibles au bout de huit ans, lorsque les banques marocaines ont commencé à acquérir d’autres banques africaines, dont plusieurs filiales africaines de banques françaises. Les grandes entreprises marocaines, à commencer par l’OCP, l’Office Chérifien des Phosphates, se sont engouffrées dans la brèche, suivies par les PME.
De 2000 à 2013, l’économie marocaine a crû à une moyenne de 5 % par an, marquant un léger ralentissement de la cadence depuis 2013, avec une moyenne de 3,6 %, mais le taux de chômage et l’inflation ont été contenus. Ces succès ne sont pas de trop pour surmonter les difficultés du pays. La SAMIR, numéro un du raffinage au Maroc est en faillite. Le Rif, au nord-est du pays, est en révolte larvée depuis octobre 2016. Le Royaume s’efforce de réparer un système d’éducation en ruine qui balance entre l’arabisation et la francisation et de construire un solide système de protection sociale. Mais le Maroc tient le coup et continue d’avancer.
La pénétration des intérêts marocains sur le continent ne fait pas que des heureux. Le Sénégal, un peu débordé, s’en inquiète mais le Maroc joue fortement sur l’un de ses points forts, une diplomatie de grande qualité, tandis que les missions très fréquentes du roi en Afrique visent à calmer les aigreurs et à passer des accords commerciaux dans un cadre de coopération sud-sud qui demeure une exception. De plus le Maroc, grâce à ses accords de coopération avec l’Union européenne, constitue une importante porte d’entrée vers l’Europe pour le continent africain.
D’ailleurs, le Maroc vient de réintégrer l’Union africaine qu’il avait quitté il y a trois décennies en raison du débat sur le Sahara occidental entretenu par l’Algérie. Il tente actuellement de se faire accepter parmi la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Enfin, avec la tenue de la COP22 sur le climat en décembre 2016 à Marrakech, il ajoute désormais la diplomatie environnementale à ses nombreuses avancées. À l'extérieur du Maroc, on ignore souvent son investissement dans les énergies renouvelable. Il s'est notamment doté de l'une des plus grandes centrales d'énergie solaire du monde, Nour (la lumière) dans les environs de Ouarzazate, qui sera bientôt suivi d'une nouvelle centrale solaire, Nour 2, Nour 3 et Nour 4 étant déjà programmés. L'objectif est d'utiliser et d'exporter une énergie propre, en se dotant du plus grand site de production solaire du monde d'ici 2020.
Désormais, pour la coopération avec l’Afrique comme avec l’UE comme pour le développement durable, le Maroc est devenu à la fois un pont et un modèle. Que la France et l’Algérie en tirent toutes les leçons.
(D'après, en particulier, l’article de Jean-Benoît Nadeau dans le Devoir (Montréal) du 10 juillet 2017.)
LES PRISONNIERS DE FORT NIAGARA
Après la bataille de la Belle-Famille et la reddition de Fort Niagara, le traitement des prisonniers capturés en juillet 1759 est révélateur de la nature de la guerre au milieu du XVIIIe siècle.
Au cours de la bataille de la Belle-Famille, 116 français furent capturés et 250 tués, la plupart par les Iroquois. Sir William Johnson, le marchand irlandais qui était devenu un chef mohican et commandait maintenant les troupes anglaises, négocia avec les Iroquois. Ces derniers détenaient 150 scalps et avaient fait 96 prisonniers qu’ils refusèrent de rendre. On ne sait pas quelle proportion d’entre eux fut tuée, tandis que les autres étaient dispersés dans les campements iroquois pour servir d’esclaves et d’époux. On sait simplement que cinq prisonniers parvinrent à s’échapper.
Avec l’arrogance des vainqueurs, Sir William Johnson ne concéda que des conditions très dures pour la reddition des troupes françaises, négociée avec le Capitaine Pierre Pouchot qui commandait Fort Niagara : il n’accorda ni leur retour au Canada en échange de prisonniers anglais, ni les honneurs de la guerre qui leur auraient permis d’être libres en échange de leur engagement de ne pas combattre.
Au contraire, il les conduisit tous en captivité jusqu’à Schenectady dans l’État de New-York, à l’exception de 26 femmes et enfants, d’un prêtre et d’un serviteur qui furent escortés jusqu’à une ile française à l’entrée du Saint-Laurent. Cependant 12 autres femmes décidèrent de suivre leurs époux en captivité, 9 prisonniers s’échappèrent en cours de route dont 4 furent recapturés et 10 prisonniers allemands changèrent de camp en s’engageant dans les troupes du Royal American.
Le total des prisonniers français, hommes, femmes et enfants s’élevait à 634, ce qui était un nombre inhabituellement élevé. Ils furent aussitôt dispersés entre les États de New-York, du New Jersey et du Connecticut où les colons avaient l’intention de les faire travailler pour une somme si faible que 30 d’entre eux refusèrent de travailler, préférant aller en prison.
Les officiers furent mieux traités. On leur avança immédiatement 50$ pour leurs frais de subsistance, encore que cette générosité fut ensuite prise en charge par la France.
Entretemps, une convention franco-anglaise concernant les prisonniers avait été signée en février 1759 à Sluis (Pays-Bas) applicable dans toutes les zones de conflit dans le monde puisque la guerre de Sept Ans était la première guerre mondiale de l’histoire. Selon cette convention, chaque partie en conflit acceptait de payer pour l’entretien de ses soldats capturés, à condition que soient respectés un certain nombre de conditions concernant la manière dont les prisonniers étaient traités. Ils ne devaient pas être contraints de travailler pour se nourrir et ils devaient être bien logés. Il était spécifié que la paille de leurs lits devait être changée tous les huit jours, qu’ils devaient recevoir la même ration de pain que le soldats en activité et un pécule quotidien, dont le montant était spécifié, pour acheter de la nourriture. En outre, les prisonniers ne devaient pas être sollicités pour s’engager dans l’armée ennemie et ils avaient la possibilité d’écrire une fois par mois pour décrire leur situation.
Les blessés et les malades devaient être soignés de manière appropriée et être libérés dés que possible en prenant le chemin sûr le plus court. En outre, les officiers devaient bénéficier de prêts qui seraient remboursés par leur pays. Cette convention était rendue effective par un échange mensuel de comptabilité et un prompt règlement des dettes.
En Amérique, l’administration anglaise prit conscience qu’elle était loin de répondre aux exigences de la convention de Sluis. La liste complète des prisonniers était inexistante, les officiers avaient été séparés de leurs hommes, ces derniers avaient été mis en partie au travail et ils n’avaient pas reçu le penny et demi anglais par jour qui était prévu dans la convention.
Aussi le général en chef Amherst envoya t-il ses officiers marchander avec les officiers français de plus haut rang pour accepter un arrangement qui éviterait des contestations ultérieures. Puis il négocia un échange de prisonniers avec le Marquis de Vaudreuil, le Gouverneur de la Nouvelle-France. Les Français libérèrent 270 prisonniers anglais, dont 68 civils, 48 territoriaux, 90 militaires anglais, 47 rangers et 16 officiers. Amherst laissa partir en échange 211 prisonniers français, dont 53 soldats, 35 troupes de marine, 107 soldats canadiens et 16 civils.
Pour la plupart d’entre eux, leur captivité n’avait duré que quelques mois et ils furent de retour à temps pour Noel 1759, à temps pour participer à la défense désespérée de la Nouvelle-France en 1760.
Quand on songe à la barbarie des guerres du XXe siècle, on se dit, qu'à condition d'échapper aux Iroquois, ils étaient vraiment bien traités, ces prisonniers des guerres du XVIIIe siècle !